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Dépassement du montant des travaux votés : qui doit prendre en charge ? Le 25/7/2001
UI - Actus - 25/7/2001 - Dépassement du montant des travaux votés : qui doit prendre en charge ?
Les dépassements de budgets de travaux sont monnaie courante dans le bâtiment et en particulier en copropriété : étude insuffisante, oubli de postes venant alourdir la facture, imprévus liés à l'état de l'existant ou encore pénalités et intérêts de retard pour paiement tardif des entreprises : tous les cas sont possibles et parfois se combinent ! Dans quels cas ces dépassements sont fautifs, et imputables à un ou plusieurs des intervenants dans le processus de décision ou de conduite des travaux : syndic, maître d'oeuvre, entreprise, etc. ? Deux jurisprudences de la Cour de cassation précisent ou infléchissent les jurisprudences antérieures...

Il faut être franc : les travaux ne sont rarement votés en assemblée sur la base de dossiers rigoureux et complets ! Manque de recul par rapport à la date de l'assemblée, longueur des délais pour obtenir les devis, surcharge des gestionnaires d'immeubles, hésitation aussi à investir du temps et de l'effort personnel, mais aussi ceux des entreprises sans connaître les chances que les travaux soient votés : tous ces facteurs concourent à une improvisation largement répandue, et à l'utilisation commode de la technique consistant à faire voter l'assemblée sur une estimation - ou sur la base d'un seul devis - et en cas de vote positif faire voter un mandat au conseil syndical pour poursuivre l'étude et l'appel d'offres avec le syndic et choisir le ou les prestataires pour l'exécution des travaux...

Résultat : de fréquents dépassements par rapport au budget voté "à la louche", et dans lequel on oublié de compter ou bien on a sous-estimé la police dommages-ouvrage, le coordonnateur "SPS" (Sécurité, protection de la santé - intervenant obligatoire dès lors que deux entreprises au moins interviennent sur le chantier...), voire même des postes comme des dévoiements provisoires de canalisations ou l'installation de protections pour la durée des travaux.

Parfois, c'est la technique retenue pour l'exécution des travaux qui se révèle inadéquate par rapport à la nature ou l'état des supports et qui doit être remplacée au pied levé par une technique ou des matériaux plus coûteux.

Sans compter le cas où d'importants travaux supplémentaires peuvent être nécessités par la découverte de dégradations de la structure porteuse sous l'enduit de façade...

Enfin, il n'est pas rare que le syndic, autorisé voire encouragé à demi-mot par des membres du conseil syndical, se laisse entraîner à donner son feu vert à des travaux non prévus initialement mais qu'il est tellement plus intéressant d'effectuer dans la foulée pendant que les entreprises sont sur place !...

Certes, tous ces dépassements ne donnent pas lieu à conflit, fort heureusement. Mais ils jettent pour la majorité des copropriétaires une suspicion légitime sur le sérieux avec lequel syndic et conseil syndical engagent les dépenses pour leur compte, et dans de nombreux cas ces copropriétaires qui ont voté les travaux peuvent se sentir légitimement floués par une sous-estimation coupable, voire victimes d'un vice du consentement : par exemple dans le cas où les travaux engagés ont été acceptés parce qu'ils étaient d'un montant raisonnable et qu'ils ne l'auraient pas été en connaissance du montant réel vu d'autres urgences à traiter en priorité...

Jusque là, en pareil cas, les tribunaux se contentaient de s'assurer de la réalité des travaux ayant causé le dépassement et du bien fondé des montants facturés, considérant que, les copropriétaires bénéficiant de la prestation fournie, le fait de mettre le dépassement à la charge du syndic ou du maître d'oeuvre constituerait un enrichissement sans cause, du moins si le syndic n'avait pas transgressé une autre limitation imposée par l'assemblée, celle du montant des marchés et contrats au dessus duquel il doit demander l'autorisation du conseil syndical...

La Cour de cassation a singulièrement réduit cette tolérance, considérant dans un arrêt du 11 juillet 2001 que l'omission dans l'estimation des travaux par le maître d'oeuvre du coût d'un coordonnateur SPS constituait pour le syndicat des copropriétaires, qui voyait le coût des travaux votés alourdi par ce poste imprévu, un préjudice indemnisable.

Un arrêt précédent, du 16 mai 2001, avait éclairé d'un jour nouveau la responsabilité du syndic dans le cas où celui-ci commande les travaux votés par l'assemblée mais n'est pas en mesure d'honorer les situations et factures dans les délais contractuels faute de trésorerie suffisante : tout en reconnaissant qu'il n'était pas responsable de l'impécuniosité du syndicat des copropriétaires mais qu'il était fautif, connaissant la situation de trésorerie difficile et l'ayant tue à l'entreprise, de ne pas avoir attendu de réunir les fonds nécessaires avant de commander les travaux !

Ces deux arrêts ouvrent de nouvelles possibilités d'action des copropriétés qui se voient confrontées à des dépassements, même autorisés par le conseil syndical, ou des pénalités de retard, voire des dommages et intérêts en cas de paiement tardif des entreprises...

Peut-être ainsi les assemblées se verront-elles présenter des dossiers de travaux mieux ficelés...

(Pour en savoir plus, voir nos dossiers Prévoir, décider et financer les gros travaux et Travaux avec ou sans maître d'œuvre, ainsi que notre fiche sur La fixation par l'assemblée du montant des marchés et contrats à partir duquel la consultation par le syndic du conseil syndical est obligatoire)

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