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Agents immobiliers sans mandat exclusif intervenant sur le même bien : y voit-on plus clair ? Le 13/11/2002
UI - Actus - 13/11/2002 - Agents immobiliers sans mandat exclusif intervenant sur le même bien : y voit-on plus clair ?
Coup sur coup, deux arrêts de la Cour de cassation ont tenté de clarifier le difficile sujet du droit à commission de l'agent immobilier agissant sous mandat non exclusif, source d'un abondant contentieux et probablement une des causes principales de la mauvaise image de cette profession dans le grand public ! Il n'est pas douteux qu'à court terme cette clarification évitera quelques conflits, mais des zones d'ombre et des pièges subsistent ; quant à savoir si elle va dans le bon sens et sert les intérêts à long terme des professionnels ou de leurs clients, rien n'est moins sûr...

Le cas de figure est tellement fréquent qu'il en est presque banal : un candidat acquéreur visite un bien avec un agent immobilier, mandaté par le vendeur sans exclusivité, revisite ultérieurement avec un second agent immobilier également sous mandat "simple", et négocie puis signe la vente par l'entremise de ce dernier. Question : le premier agent, qui a fait le premier connaître le bien à l'acquéreur, peut-il réclamer une commission ou à tout le moins une indemnité pour ses peines et soins ?

La Cour de cassation répond clairement non, dans deux arrêts du même jour (1), confirmant ainsi solennellement quelques jurisprudences antérieures allant dans le même sens mais qui avaient pu être relativisées : en cas de pluralité de mandats de vente non exclusifs, seul le mandataire menant à bien la négociation jusqu'à la conclusion effective de l'affaire - jusqu'à la signature de l’acte authentique, et donc après levée des conditions suspensives éventuelles - a droit à une rémunération, même si l'acheteur avait été trouvé et présenté au vendeur par un autre mandataire !

L'acquéreur exonéré

Le principal avantage de cette clarification est d'exonérer l'acquéreur de toute obligation de déclaration au vendeur de sa visite avec un agent immobilier autre que celui par l'intermédiaire duquel l'affaire est en voie de se conclure : on pouvait craindre en effet antérieurement que cet agent immobilier puisse réclamer une indemnité au vendeur - n'ayant pas conclu la transaction, il n'avait de toutes façons jamais droit à la commission prévue au mandat - et que celui-ci puisse sans une telle déclaration (nécessairement en recommandé) mettre en cause la responsabilité de l'acquéreur, lui reprochant de l'avoir laissé négocier par l'entremise du second agent alors qu'il l'aurait fait avec le premier s'il avait eu connaissance de la première visite...

Rien de tel désormais : les acquéreurs peuvent librement visiter et négocier successivement avec plusieurs agences immobilières, voire même directement avec le vendeur si celui-ci en prend le risque, sans craindre de se voir réclamer quoi que ce soit par les agents abandonnés en cours de route ; et ce qu'ils aient signé ou non un "bon de visite", invention des agents immobiliers destinée précisément à leur permettre de faire valoir leur droit à indemnité au cas où le vendeur traiterait sans leur entremise !

Une atténuation importante

Les arrêts mentionnés maintiennent toutefois une condition au principe énoncé : que les parties à la transaction n'aient pas fait preuve d'un comportement et de manoeuvres visant à priver un ou plusieurs des agents immobiliers mandatés sans exclusivité de la réalisation de la vente, auquel cas le ou les agents évincés auraient droit à des dommages et intérêts !

Cette condition vise principalement le vendeur qui a consenti plusieurs mandats de vente non exclusifs : encourrait notamment de tels dommages et intérêts le vendeur qui conclut la vente directement avec le candidat présenté par un des agents mandatés, preuves à l'appui (la meilleure preuve est en fait la lettre recommandée de "dénonciation du client", le bon de visite n'ayant force probante que si l'agent immobilier peut prouver que le vendeur a eu connaissance de la visite)...

Ou encore celui qui, ayant refusé (par écrit) une diminution du prix à l'un des agents l'aurait consentie simultanément à un autre, lui permettant d'emporter l'affaire ! Par contre, aucun risque si une négociation non aboutie avec une agence reprend et se conclut quelques jours après avec une autre, plus "accrocheuse"...

Attention aux mandats de recherche !

L'atténuation introduite par la Cour de cassation concerne aussi les mandats de recherche non exclusifs que de nombreux agents immobiliers font signer aux candidats acquéreurs de préférence aux "bons de visite", et vient d'être confirmée par un autre arrêt (Cass. 1ère Ch. civ. 15 mai 2002, lui-même confirmant un autre arrêt de la même chambre, du 8 juillet 1994) : un tel mandat crée un droit à commission pour l'agent qui l'a obtenu dès lors que la transaction est conclue avec un vendeur présenté dans le cadre de ce mandat !

L'acquéreur signataire d'un mandat de recherche se doit en effet, dès lors qu'il souhaite négocier une affaire présentée par l'agent mandaté en passer nécessairement par ce dernier, que ce soit pour négocier en direct avec le vendeur, ou par l'entremise d'un agent immobilier mandaté par ailleurs en exclusivité par le vendeur : dans ce cas, les agences savent s'arranger pour partager leur commission, et la ramener ainsi à un niveau raisonnable, évitant ainsi la double commission, que la loi n'interdit pas dès lors qu'elle est le fait de deux mandataires intervenant au titre de mandats distincts...

Dire qu'il convient d'être particulièrement vigilant quant à la portée de ce qu'on signe, et qu'un mandat de recherche n'équivaut pas à un bon de visite devrait aller de soi, mais il n'est pas inutile de le répéter !

Un encouragement aux mandats non exclusifs ?

L'intérêt des clarifications successives auxquelles nous assistons ne peut être contestée : les procédures et litiges à tiroirs nés de la complexité extravagante des relations contractuelles en la matière ruinent inexorablement la confiance dans une profession par ailleurs mal armée pour offrir au client une prestation satisfaisante .

On peut simplement regretter qu'elles risquent de conforter chez le client la pratique des mandats non exclusifs, qui constitue à notre avis en elle-même une des principales causes du marasme des agents immobiliers (voir notre article de juin 2002 à ce sujet)...

Encore faudrait-il que les professionnels acceptent de regarder en face les maux qui les minent et offrent à ce client de vraies contreparties en échange de l'exclusivité, condition nécessaire d'une saine relation avec un professionnel apte à s'investir dans la mise en oeuvre de son mandat !

(1) 3ème Ch. civ. 9 juillet 2002, n°00-13410 et 01-00627

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