ACTUS
Copropriétés et salariés des immeubles : pourquoi tant d'histoires ?
Le
11/12/2002
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Gardiens logés et employés d'entretien font indéniablement les sujets favoris des disputes dans les copropriétés qui en sont dotées ! Rares sont ceux, on s'en doute, qui font l'unanimité, et quand ils ont la mauvaise idée de se mettre dans le collimateur de quelques copropriétaires influents ou revendicatifs, la zizanie n'est pas loin, et avec elle la division rapide de la copropriété en deux camps irrédentistes : celui des trop compréhensifs et celui des jamais contents... Curieusement, on note la plupart du temps un grand absent au débat : le syndic, pourtant le vrai 'patron' des salariés ! Il est vrai qu'il n'a pas grand avantage à mettre le doigt dans une mécanique infernale qui tôt ou tard finit par se retourner contre lui...
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Un sujet de dispute favori
Nos forums en témoignent : rares sont les sujets - à part peut-être le syndic - capables de mobiliser et diviser autant les copropriétaires que ce qui touche aux gardiens et employés d'immeuble !
Il est vrai qu'intervenant, et même, pour les gardiens, vivant dans l'immeuble, ils sont inévitablement plongés dans le quotidien des résidants, et peuvent, s'ils ne gardent pas leurs distances et une neutralité sans faille, attiser des tensions préexistantes et devenir les enjeux de conflits de voisins ou d'oppositions de personnes qui n'attendent qu'un prétexte pour exploser ! Quand ils n'y contribuent pas eux-mêmes : car s'il est de nombreux employés consciencieux se tuant à la tâche et néanmoins injustement harcelés par de véritables esclavagistes, d'autres ne se privent pas de semer et entretenir la discorde : attitude "à la tête du client", petits services par ci, indiscrétions par là, rien de plus facile que de monter les habitants d'un immeuble les uns contre les autres, contre le conseil syndical ou contre le syndic qui a toujours bon dos...
Mais les conflits naissent aussi ou s'aggravent en raison de la complexité des relations entre les parties prenantes et intervenants dans la gestion de l'immeuble - copropriétaires (bailleurs ou résidants), conseillers syndicaux et syndic - et de la difficulté pour les uns et les autres de se figurer leurs rôles et leurs responsabilités respectives ! Sans mentionner les employés eux-mêmes qui peuvent souvent se demander qui est leur véritable "patron"...
Copropriétaires, syndic et salariés : chacun son rôle
Premiers concernés bien entendu, les copropriétaires : qu'ils jouent aux petits chefs ou qu'ils versent au contraire dans l'excès de familiarité, ils ont du mal à trouver la bonne attitude face aux salariés de la copropriété ; a fortiori lorsque, membres du conseil syndical, avec un syndic en général aux abonnés absents, ils se sentent seuls investis de la mission de veiller au grain !
Et il est vrai qu'à cet égard, le fonctionnement des copropriétés n'est pas simple, et rares sont ceux qui savent en faire la pédagogie : indivision pour la propriété des parties communes, la copropriété est aussi un organisme collectif dont chaque copropriétaire est obligatoirement membre : le syndicat des copropriétaires.
Comme dans une association, les décisions importantes sont prises par l'assemblée générale et la gestion quotidienne est surveillée par un conseil, dont les membres sont nommés parmi les copropriétaires.
Par contre, à la différence de ce qui se passe dans une association - encore que la forme coopérative pour laquelle tout syndicat des copropriétaires peut opter s'en rapproche - la gestion proprement dite est assurée par un mandataire, le syndic, qui peut être un copropriétaire, mais qui est très souvent un professionnel extérieur, la plupart du temps une société employant un personnel nombreux et varié, et respectant des conditions d'exercice bien précises.
Et c'est de là que vient la principale difficulté : lorsque le syndicat emploie du personnel salarié pour l'entretien des parties communes et la mise en oeuvre des services collectifs, la question se pose de savoir qui en est réellement l'employeur : le syndic ou la copropriété, que les copropriétaires voient dans ce cas plus volontiers incarnée par le conseil syndical ?
En fait la réponse est plus complexe qu'il n'y paraît : le personnel attaché à l'immeuble a un contrat avec le syndicat des copropriétaires - contrat qui se poursuit sans nécessité de modification ni d'avenant en cas de changement de syndic - mais le syndicat n'ayant d'existence légale que représenté par son syndic, c'est ce dernier et lui seul qui exerce les fonctions de l'employeur : embauche, supervision, paye, augmentation du salaire et octroi de primes, remplacement, sanctions et licenciement ! Et sous sa totale responsabilité en cas d'erreur ou faute vis à vis du syndicat des copropriétaires...
Somme toute, le syndic est toutes proportions gardées dans la fonction de la direction d'une entreprise par rapport à son personnel, alors que les copropriétaires sont dans celle des actionnaires, et le conseil syndical dans celui du conseil d'administration ! Or on n'a jamais vu des actionnaires ou des administrateurs d'une entreprise se prendre pour des "patrons" et donner des ordres aux salariés derrière le dos de la direction...
Conseil syndical et syndic : des erreurs à ne pas commettre
Nombre de conflits naissent ou sont aggravés par la confusion des genres, tolérée quand elle n'est pas encouragée par le conseil syndical ou le syndic ! Petit catalogue des erreurs les plus fréquentes :
- tolérer les services aux résidants : c'est la porte ouverte aux dérives des prestations rémunérées et aux favoritismes sélectifs aux conséquences explosives !
- laisser les copropriétaires faire des remontrances au personnel, lui donner des instructions, voire même régler son emploi du temps : même membres du conseil syndical, les copropriétaires ne doivent en aucun cas endosser les habits de l'employeur et se substituer au syndic qui perd alors toute autorité... A fortiori, seul ce dernier est en droit d'émettre des courriers à l'intention des salariés, et ces courriers n'ont en aucun cas à être diffusés ou - pire - affichés dans les parties communes de la copropriété !
- soumettre à l'assemblée des décisions d'augmentation, de sanction ou de licenciement de salariés : le rôle et la responsabilité de l'employeur, incombant exclusivement au syndic ne se partage pas et il doit être rappelé avec force que l'assemblée n'a à se prononcer que sur le "nombre et la catégorie des emplois" (article 31 du décret du 17 mars 1967)...
- mêler les copropriétaires à une procédure de sanction ou de licenciement : si le conseil syndical a son mot à dire sur les prestations et les performances des salariés, cette prérogative s'exerce uniquement vis à vis du syndic et il ne peut être question pour des copropriétaires, sous peine de voir le syndicat condamné aux prud'hommes pour vice de procédure, de participer à un entretien préalable !
- inviter les salariés devant le conseil syndical ou - pire - devant l'assemblée pour évoquer avec eux la qualité de leur travail, l'exécution de leurs tâches, voire des questions relevant de leur salaire (sans commentaire)...
- recruter des copropriétaires en qualité de salariés : c'est la pire des "bonnes idées" qu'on puisse avoir, fût-ce avec les meilleures intentions : la double qualité de copropriétaire, donc participant aux assemblées - et de salarié est la plus sûre façon de mettre la copropriété à terme à feu et à sang, et l'expérience prouve que ça marche ! On a même vu le cas de copropriétaires-gardiens qui ont été nommés présidents de conseil syndical, et là, comme on dit, ce fut très dur... Il est vrai que rien ne peut empêcher un gardien ou un employé d'immeuble d'acheter un lot dans la copropriété, mais au moins que la calamité soit subie et non délibérément provoquée !
Copropriétaires : choisir son camp à bon escient
Rude dilemme pour les copropriétaires obligés de choisir entre deux camps qui s'affrontent : qui a tort, et qui a raison ? Le gardien ou l'employé mis en cause est-il victime ou manipulateur ? Les conseillers syndicaux qui veulent "sa peau" défendent-ils les intérêts de la collectivité ou poursuivent-ils, même inconsciemment une vindicte personnelle ? Faut-il enfin se laisser guider par son sens de la justice plutôt que par ses intérêts de copropriétaire, et risquer en donnant des armes au salarié attaqué - par la signature de pétitions, fourniture d'attestations voire en venant le soutenir devant les prud'hommes comme cela se voit fréquemment, y compris de la part de conseillers syndicaux - de faire les frais d'une condamnation qu'il est la plupart du temps illusoire de pouvoir imputer au syndic ?...
Décidément, la vie en copropriété n'est pas toujours un long fleuve tranquille !
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