ACTUS
Adaptation des règlements de copropriété : gare à la précipitation et aux prestations factices !
Le
22/1/2003
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La question sera dès 2003 à l'ordre du jour de toutes les assemblées de copropriétaires, et à vrai dire ce n'est pas trop tôt : sauf report du délai, il reste désormais moins de trois ans pour appliquer une des obligations créées par la loi "SRU", à savoir apporter au règlement de copropriété 'les adaptations rendues nécessaires par les modifications législatives depuis leur établissement'. Le problème est que de l'inertie générale constatée jusqu'à présent - la loi date quand même de décembre 2000 ! - on risque de passer à la précipitation, et que les copropriétaires, pas forcément motivés par cette affaire, se laissent prescrire par les syndics des prestations trop stéréotypées, et surtout trop chères pour le résultat qu'ils peuvent en attendre...
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Cette fois c'est parti ! Réalisant qu'ils n'ont plus que trois assemblées générales annuelles devant eux pour faire voter une prestation, faire adopter le principe de modifications et faire adopter un modificatif définitif (voir notre article), les syndics s'apprêtent, dans les assemblées qu'ils convoqueront en 2003, à proposer chacun sa solution pour l'adaptation des règlements de copropriété : quelques rares proposeront une prestation (facturée) de leurs services juridiques internes, mais la plupart proposeront un prestataire extérieur - cabinet d'avocats, notaire, cabinet juridique, voire officine créée pour le besoin - avec lequel ils auront, diront-ils, négocié des conditions pour l'ensemble de leur parc de copropriétés gérées...
Et comme toujours dans ces cas-là, il y aura des propositions sérieuses, et d'autres qui ne le seront pas ! Comment les reconnaître ?
Voici quelques conseils :
Refuser toute proposition totalement forfaitisée
Les prestations proposées pour un prix ferme et définitif, jusqu'au dépôt du modificatif pour sa publication, sont forcément minimalistes : elles ne peuvent prévoir en réalité que la mise en conformité textuelle du règlement à la législation dans son état actuel (suppression des clauses contraires aux règles "d'ordre public", modification de celles reprenant des règles qui ont changé au fil du temps, comme les règles de majorité pour les assemblées ou le nombre de pouvoirs qu'un copropriétaire peut recevoir, etc.).
Quelque fois bon marché, mais souvent chères (2.000 à 3.000 euros), ces prestations forfaitaires ne peuvent prévoir d'analyse des besoins de la copropriété, de rencontres avec le conseil syndical, ni d'étude et proposition d'améliorations qui pourraient être adoptées en même temps que l'adaptation du règlement de copropriété. A fortiori, elles ne peuvent prévoir la modification de grilles de répartition non conformes !
Outre le gaspillage d'argent qu'elles causeront pour un travail de pure forme, confié - ne nous faisons pas d'illusions - à des armées de stagiaires recrutés pour l'occasion, elles risquent aussi de représenter une occasion perdue pour les immeubles qui y souscriront !
Les praticiens de la copropriété s'accordent en effet pour considérer qu'il serait dommage que l'adaptation prescrite par le législateur ne soit pas l'occasion d'une réflexion de la copropriété sur ses règles de fonctionnement et qu'il ne soit pas tiré parti du chantier ouvert pour apporter quelques autres modifications ou améliorations - certes à voter aux majorités appropriées, double majorité voire unanimité, qui ne sont pas nécessairement impossibles à réunir notamment dans les petits immeubles - de nature à corriger des injustices, permettre une meilleure acceptation des règles communes et aussi se donner les moyens de combattre plus efficacement des manquements au respect du patrimoine commun ou de la tranquillité des résidants !
L'ARC (Association des responsables de copropriété - organisation de consommateurs spécialisée dans la copropriété) qui a été un des plus ardents défenseurs de l'insertion dans la loi "SRU" de la disposition créant l'obligation d'adaptation des règlements, ne dit pas autre chose quand elle remarque que "si la mise à jour est considérée ainsi, le travail fait non seulement permettra une véritable appropriation du règlement par la copropriété mais surtout permettra à la copropriété de disposer d'un règlement bien adapté à ses besoins"...
Or pour cela, il n'y a pas deux méthodes, une fois l'ensemble des éléments du règlement de copropriété - règlement d'origine et tous les modificatifs, y compris des décisions d'assemblées non publiées - répertoriés et rassemblés : il faut que la prestation proposée au vote de la première assemblée saisie du problème se compose d'une première étape de rencontre avec le conseil syndical pour évaluer les besoins de la copropriété, d'une phase de rédaction des adaptations textuelles de pure conformité nécessaires, mais aussi d'analyse des améliorations qui pourraient être apportées au règlement, et enfin d'une dernière rencontre avec le conseil syndical pour présenter les résultats et discuter des améliorations envisageables, avant de saisir le syndic de l'évaluation du coût de ces améliorations : réalisation de nouvelles grilles de répartition, rédaction de clauses spéciales, etc.
La prestation forfaitisée devra nécessairement s'arrêter là, d'une part parce que la suite dépend d'une décision de principe et d'engagement de dépense relevant une nouvelle fois de l'assemblée générale (ce devra être à l'ordre du jour des assemblées de 2004), et aussi parce que l'ampleur du travail à réaliser ne peut être prévue avant l'exécution de cette première prestation !
Testez vous-même le sérieux de la proposition
Quelques questions pièges permettent de savoir à qui on a affaire :
- la rédaction des adaptations textuelles de mise en conformité légale du règlement peut-elle être finalisée immédiatement ? La réponse est non : il reste encore à y intégrer les dispositions du décret modificatif du décret du 17 mars 1967, pas encore paru, et qui doit répercuter dans le décret d'application de la loi sur la copropriété les modifications intervenues dans cette dernière (ce n'est toujours pas fait et les ministères concernés - la justice et le logement - sont très en retard, d'où les rumeurs de report du délai...) ;
- la nature des modifications possibles dans le cadre du régime dérogatoire est-elle indépendante de la date d'établissement du règlement de copropriété ? La réponse est non : seules les modifications législatives intervenues depuis son établissement peuvent être prises en compte (voir notre article) !
- les frais de publication sont-ils proportionnels à la taille de l'immeuble ? la réponse est non : le régime dérogatoire permet la publication du modificatif au droit fixe, soit 75 euros ; à condition bien entendu qu'il se limite aux adaptations légales...
Gare aux arnaques !
L'imagination de ceux qui contemplent avec gourmandise un fromage tombé du ciel, et essayent de profiter de la naïveté de certains syndics -quand il ne s'agit pas de complicité pure et simple - est sans limite :
- ceux qui proposent le remplacement du règlement actuel par un règlement type : tout règlement comporte des clauses spécifiques, créant des droits ou obligations ou établissant des règles au delà du minimum prévu par la législation ; ces dispositions ne peuvent être modifiées à la majorité dérogatoire permise par la loi pour les adaptations (la majorité de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965, soit la majorité des voix "exprimées" des copropriétaires présents et représentés) mais à celle prévue pour les modifications du règlement de copropriété concernant "la jouissance, l'usage et l'administration des parties communes", (double majorité de l'article 26, soit la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix) ; la proposition d'un règlement type est un travail bâclé et une occasion manquée de mettre en place des règles adaptées à la copropriété !
- ceux qui proposent d'emblée un recalcul général des surfaces : sauf cas très particuliers, la grille des tantièmes généraux ne peut être modifiée qu'à l'unanimité de tous les copropriétaires, et même pour les grilles concernant les charges spéciales, les possibilités de les modifier dans le cadre du régime dérogatoire sont très limitées ; sans intention particulière de modifier des répartitions, c'est donc un travail aussi inutile que coûteux !
- ceux qui forcent sur les tarifs : l'ARC mentionne des propositions jusqu'à 20.000 euros ! En réalité, 2.000 à 3.000 euros TTC doit être considéré comme un maximum pour une adaptation qui ne comporte pas de réalisation de nouvelles grilles ou la réécriture quasi complète d'un règlement antédiluvien...
Bref, le meilleur conseil que l'on puisse donner est encore celui de ne pas céder à la précipitation, ni à une argumentation appuyée, mettant en avant des tarifs prétendument négociés, voire l'affirmation fallacieuse de la nécessité de recourir au prestataire du syndic pour des motifs techniques ou de connaissance des immeubles : il s'agit bien d'une prestation comme n'importe quelle autre, et il n'y a aucune raison de ne pas demander plusieurs devis avant de s'engager !
Et de s'assurer aussi à chaque étape que l'ensemble des dépenses ont été prises en compte : honoraires du syndic (tous en demanderont aussi même si le travail est fait par un prestataire extérieur), du notaire pour la publication, du géomètre si des grilles doivent être modifiées ou créées, d'un spécialiste pour les cas très particuliers (exemple : les grilles d'ascenseur), et les droits si la modification excède la stricte adaptation légale...
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