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Immeubles neufs : l'impossible sans faute Le 16/4/2003
UI - Actus - 16/4/2003 - Immeubles neufs : l'impossible sans faute
Retards de construction, immeubles pas vraiment finis à la livraison, défauts et malfaçons à foison, copropriétaires inexpérimentés et un syndic souvent gêné aux entournures : tel est le cocktail - explosif - qui fait l'ordinaire des copropriétés d'immeubles neufs, en général vendus sur plans (en termes exacts 'en état futur d'achèvement'...) ! Le tout dans un contexte légal et contractuel d'une effrayante complexité, faisant la part belle à ceux qui savent en tirer parti... Pas étonnant que les copropriétaires qui y ont goûté une fois, et qui ont pu vérifier à quel point leurs protections et recours étaient illusoires, n'aient pas toujours envie de recommencer de sitôt !

Spécificité du bâtiment, qui n'a pas encore réussi à se muer en véritable industrie, et où règnent encore trop souvent des moeurs douteuses, amateurisme de nombreux promoteurs, incapacité des maîtres d'oeuvre à maîtriser des plannings tendus, insuffisance des garde-fous protégeant les acquéreurs encourageant le laxisme ? Toujours est-il que le catalogue des risques qui guettent l'acquéreur qui s'aventure dans un achat neuf est impressionnant, et ses recours dans chaque cas bien incertains !

Tentons une brève et néanmoins édifiante revue (probablement non exhaustive) des principales sources de problèmes :


Retards de construction

C'est le premier désagrément auquel est exposé l'heureux acquéreur ou réservataire d'un appartement dans un immeuble en construction ou à construire : le chantier prend retard sur retard et la date de livraison ne cesse d'être reportée par un promoteur sincèrement désolé devant tant d'accumulation de calamités : intempéries, mauvaises surprises dans le sous-sol, ou des faillites à répétition des entreprises avec lesquelles il a contracté... Bref des cas de force majeure que le contrat ou l'avant-contrat a pris soin de mentionner comme exonérant le promoteur de sa responsabilité !

Contrat ou avant-contrat qui bien entendu ne comportent pas de clause de pénalité de retard, pas obligatoire, et que les acquéreurs, qui se voient proposer un contrat-type, ne sont en général pas en position de faire insérer quand il le faudrait, c'est à dire dès la réservation !

Le client n'est pas pour autant sans recours : la responsabilité du promoteur peut être mise en jeu même en l'absence d'une clause de pénalité, mais c'est plus difficile : il faut faire valoir et chiffrer un préjudice et surtout contester le caractère de force majeure des arguments invoqués ; une expertise est inévitable, pour prouver que les intempéries n'étaient pas si imprévisibles, que les entreprises choisies étaient déjà au bord de la faillite, ou que les études de sol n'ont pas été faites avant le démarrage du chantier...

Bref, des frais avancés importants et une procédure qui peut prendre des années...

Le préjudice est bien entendu très différent suivant que l'appartement a été vendu achevé ou en "VEFA" (Vente en état futur d'achèvement) : dans le premier cas, seul un dépôt de garantie, d'un montant en général faible, a été versé à la réservation et le solde du prix doit être versé à la signature de l'acte de vente, quasi-concomitant à la livraison, alors que dans le second, la signature chez le notaire intervient très en amont, et 70% du prix de l'appartement ont pu être déjà versés si les retards commencent à s'accumuler après la mise "hors d'eau" !

Si la garantie d'achèvement - obligatoire - protège l'acquéreur d'une défaillance totale du promoteur, elle ne remédie en rien au fait qu'il doit supporter au moins les intérêts de son crédit sur les sommes débloquées, pour un bien dont il ne pourra profiter qu'avec retard, soit pour y habiter, soit pour en tirer un revenu locatif...

Le préjudice sera alors la valeur locative du bien pendant la durée du retard, plus le cas échéant d'autres coûts induits, si par exemple l'acquéreur a eu la mauvaise idée de faire confiance dans les engagements du promoteur et a vendu son domicile actuel à effet à la date prévue de livraison (hebérgement temporaire, garde-meubles, etc.) !


La livraison des parties privatives et ses ratés

Deuxième déconvenue, hélas fréquente : l'appartement livré est plein de défauts, de prestations ou finitions non réalisées, voire pas terminé du tout ! S'ouvre alors pour l'acquéreur un dilemme cornélien : refuser la livraison, ou l'accepter avec réserves et compter sur le promoteur pour les lever après la livraison...

Refuser la livraison, c'est faire valoir que le vendeur a manqué à son obligation de délivrance (articles 1603 et 1604 du Code civil et expose à ce que le promoteur engage une action en vue de faire constater le caractère "livrable" du bien : le refus n'est donc à conseiller que s'il y a non conformité manifeste de la chose livrée au descriptif (surface, défauts graves, prestations importantes inférieures à celles promises et non "rattrapables") ou si l'état de non-finition rend le bien impropre à sa destination !

Encore faut-il dans ce cas distinguer entre la vente d'un bien achevé et la "VEFA" ! En effet :

- en vente "achevé", l'acquéreur est, sous réserve de livraison, engagé à acheter, et verser le solde du prix à la signature de l'acte authentique, et s'il refuse, le vendeur peut engager une action en vue de l'exécution forcée de la vente ;

- en VEFA, il a déjà acheté et il est déjà propriétaire des ouvrages au fur et à mesure de la construction ; s'il refuse la livraison, et le règlement du solde du prix (hors retenue de garantie) qui y est lié, le vendeur peut engager une simple action de recouvrement sur le versement omis...

S'il n'y a que des problèmes d'ordre mineur, fussent-ils nombreux, l'acquéreur a intérêt à accepter la livraison, quitte à relever avec beaucoup de soin tous les manquements du promoteur !

Là encore, le contexte juridique diffère du tout au tout selon le mode d'achat :

- en vente "achevé", l'acquéreur n'a pas droit à l'erreur : tout défaut, malfaçon ou manquement contractuel normalement visible lors de la livraison et non consigné dans la liste des réserves est réputé accepté !

Pas de panique cependant ! Et inutile de se faire assister d'un expert chevronné : normalement visible veut dire pour un client non professionnel, sans connaissances "pointues" ni nécessité de procéder à des sondages et analyses...

Les défauts ou non-façons consignés qui relèvent des marchés passés par le promoteur avec ses entreprises, comme d'ailleurs tous les défauts ou désordres non visibles à la livraison et qui apparaîtront ultérieurement doivent être réglées dans l'année de la garantie dite "de parfait achèvement" ; celle-ci, d'une durée d'un an, commence comme toutes les garanties légales non pas à la livraison mais à la date de réception des ouvrages par le promoteur vis à vis de chaque entreprise ; l'acquéreur bénéficie de ces garanties de la part des entreprises intervenues et le promoteur est tenu de les garantir pour le cas où elles ne s'exécuteraient pas : l'acquéreur a jusqu'à la fin de ce délai pour entreprendre une action qui interrompe la prescription, à savoir une assignation en justice ou au moins un commandement par huissier...

- en "VEFA", l'acquéreur dispose de plus de droits : il dispose d'un mois après la livraison pour compléter la liste des réserves de tous genres, et il dispose de la part du promoteur d'une garantie spéciale, dite des "vices apparents", qu'il peut faire jouer (judiciairement) dans un délai d'un an après la livraison si les réserves ne sont pas levées ; l'acquéreur est alors admis à demander soit l'annulation de la vente, soit la réduction du prix, à moins que le promoteur ne s'engage à y remédier (articles L261-5 et suivants du Code de la construction et de l’habitation ! Autre avantage : il peut consigner jusqu'à 5% du prix de vente jusqu'à ce que les réserves soient levées : cela s'appelle une retenue de garantie (article R261-14 du même code)... En fin, pour les défauts ou désordres non visibles à la livraison et qui apparaîtront ultérieurement, il dispose des mêmes garanties que l'acquéreur d'un bien achevé.


Le copropriétaire a-t-il son mot à dire sur les parties communes ?

Vendeurs et acquéreurs limitent en général l'état des lieux de la livraison aux parties privatives : ils ont tort, car l'acquéreur d'un lot de copropriété acquiert aussi une quote-part des parties communes dont il devient propriétaire en "indivision" ; au demeurant, les parties communes sont partie intégrante de la qualité du bien acheté et en conditionnent la jouissance ; elles font à juste titre partie du descriptif détaillé annexé au contrat de réservation ou à l'acte d'achat en "VEFA" ! S'en remettre au syndic - nommé par le promoteur - pour émettre les réserves appropriées lors de la livraison des parties communes, et le cas échéant à un conseil syndical qui ne sera peut-être pas encore constitué lors de cette livraison est pour le moins imprudent, d'autant que le tout neuf syndicat des copropriétaires, s'il est compétent pour défendre les intérêts des copropriétaires concernant les malfaçons, ne l'est pas du tout pour les prestations prévues au descriptif et non réalisées !

Tout acquéreur averti est donc bien avisé, doit-il pour cela faire preuve de quelque fermeté vis à vis d'un représentant du vendeur qui ne peut manquer de protester de l'inutilité de l'exercice, de faire le tour des parties communes et noter sur le procès-verbal de livraison toutes les réserves nécessaires...

De surcroît, avoir couché sur le procès-verbal de livraison, en plus des problèmes intérieurs à l'appartement, que les voiries n'étaient pas encore faites, que l'accès au parking se faisait dans la boue ou que les ascenseurs n'étaient pas encore en service, est un bon moyen d'appuyer une demande de dommages et intérêts pour troubles de jouissance si le promoteur n'a pas mis tout le zèle nécessaire à remédier à ses manquements !


A suivre...

La semaine prochaine : pourquoi les copropriétés d'immeubles neufs naissent-elles dans la douleur ?

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Des réponses à vos questions !!!

Pour estimer la valeur d'un appartement ou d'une maison à la vente ou à la location : consultez l'Argus du logement
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