ACTUS
L'acquéreur immobilier, objet de toutes les sollicitudes ? Le 5/6/2003
UI - Actus - 5/6/2003 - L'acquéreur immobilier, objet de toutes les sollicitudes ?
A parcourir les synthèses des travaux de commissions et les interventions au 99ème congrès des notaires la semaine dernière, on pourrait le croire : au delà du plaidoyer pro domo et de la défense et illustration des vertus intangibles d'une profession incontournable, ce congrès, organisé sur le thème "la vente d'immeuble : sécurité et transparence", a été en effet l'occasion d'une mise à plat du droit de la vente immobilière et des conditions d'une protection efficace de l'acquéreur ! Et aussi la révélation que celle-ci est encore loin d'être entrée dans les moeurs de nos chers notaires, dépositaires pourtant d'une parcelle de l'autorité publique...

Si les professions peuvent mesurer leur cote politique au nombre et au rang des ministres qu'elles font venir à leur congrès, celle des notaires, aussi crainte que choyée, a fait nettement mieux que les autres : pas moins de deux ministres, celui de la justice, Dominique Perben, et celui entres autres du logement, Gilles de Robien, ont fait le déplacement la semaine dernière à Deauville et apporté le point de vue du gouvernement sur le thème central du congrès cette année : la vente d'immeuble : sécurité et transparence.

Ceci étant, ils n'ont fait que très prudemment écho aux demandes des notaires, qui, sur certains points ne manquaient pas d'audace...


La protection de l'acquéreur : une notion peut-être encore trop récente ?

Droit de rétractation ou de réflexion, diagnostics obligatoires, interdiction de recevoir un versement à l'appui d'une offre ou d'une promesse d'achat unilatérale, le droit de la vente immobilière s'est considérablement transformé depuis quelques années au grand dam des professionnels - notaires mais aussi agents immobiliers - gagnés plus que modérément à "l'esprit consommateuriste" et ne voyant à ces évolutions que des sources de complication dans la conclusion des transactions...

Petite consolation : le ministère de la justice ne serait pas opposé à remplacer le délai de réflexion, s'appliquant aux avant-contrats (promesse ou compromis de vente) conclus devant notaire, et intervenant nécessairement avant sa signature, par un délai de rétractation, intervenant après celle-ci comme pour les avant-contrats signés sous seing privé...

Mais las ! Un nouveau danger les guette : une directive européenne n°99/44 instaurant pour les ventes de biens de consommation un régime d’action en garantie uniforme pour tous défauts de conformité au contrat et pour tous vices cachés : sa transcription dans le droit français empêcherait dorénavant l'inclusion dans les actes de vente de ces clauses - quasi systématiques et la plupart du temps à l'insu des signataires - d'exonération des vices cachés.

Or ces clauses sont aujourd'hui source de préjudices considérables pour les acquéreurs qui, découvrant parfois des horreurs (vices de construction graves, travaux réalisés en dépit du bon sens, défauts de conformité manifestes, etc.), ne peuvent mettre en cause la responsabilité du vendeur qu'à la condition hypothétique de pouvoir prouver qu'il en avait connaissance et qu'il les a tus !

Les notaires défendent pourtant cette pratique bec et ongles, allant même jusqu'à prétendre "que l’existence d’un vice ignoré des parties peut être source d’un aléa sur lequel les parties doivent pouvoir librement stipuler", alors que l'on sait bien que cette clause est la plupart du temps insérée subrepticement dans les sections de l'acte sur lesquelles le notaire évite de s'étendre, et échappe à la quasi-totalité des acquéreurs non juristes !

L'interdiction de l'exonération des vices cachés ferait selon eux peser un "risque économique grave [au] vendeur profane de bonne foi", et le ferait "devenir garant comme un professionnel de tous vices ou défauts affectant l’immeuble alors qu’il n’est pas assuré contre ce risque", ajoutant sans rire et noir sur blanc "que c’est également protéger l’acquéreur d’immeuble que de pouvoir le protéger lors de la revente de son immeuble des conséquences d’un vice non révélé qu’il aura toujours ignoré"...

On croit rêver : traduit en clair, cela signifie : "peu importe qu'on se fasse arnaquer si on peut arnaquer le suivant en faisant semblant de ne pas s'en être rendu compte" !...

Faut-il inciter les auteurs d'une telle perle à relire la définition des vices cachés donnée par le Code civil (article 1641) : " des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus"...

Cela n'a évidemment rien à voir avec la vétusté : les vices en question ne peuvent résulter que d'une faute (en général des travaux faits "au noir" par des gens non qualifiés), ou d'un sinistre dont il ne peut être question de laisser la charge à l'acquéreur de bonne foi ! Que fait la police ?...


La floraison des diagnostics

Amiante, saturnisme, termites, installation gaz, sans oublier le mesurage "Carrez", et bientôt risques technologiques et naturels (la loi est toujours en discussion au Parlement), les obligations s'accumulent, chacune en vertu de législations différentes, certaines dans des périmètres géographiques précis, et avec des modalités distinctes : certaines pour la signature, d'autres dès avant l'avant-contrat !

Ce n'est donc pas sans raison que les notaires demandent au moins une harmonisation : ils seront plus qu'exaucés puisque, c'est confirmé, les deux ministres préparent de concert, dans le cadre d'une loi "Habitat pour tous" annoncée pour cet automne, un diagnostic technique du bâtiment - on avait jusque là parlé de carnet de santé - qui devrait être intégré dans le Code civil ou dans le Code de la construction et de l’habitation pour offrir un "lieu juridique unique dans lequel seront décrites toutes ces obligations"...


Quelques autres revendications

Ce n'est pas non plus sans raison que les notaires demandent la définition d'une «superficie légale de référence» pour remédier à l'existence de pas moins de neuf définitions distinctes de surface : entre autres la "surface habitable", la "surface utile", la "SHON", la surface "Carrez", etc.

Préoccupation légitime également concernant la compétence des différents diagnostiqueurs : ils demandent que "tout diagnostic ou état obligatoire soit établi par un professionnel ayant obtenu nécessairement une attestation de compétence, délivrée par l'administration" et que "soit tenue et mise à jour par les pouvoirs publics une liste des experts habilités et consultable par les particuliers"...

Enfin, parmi les autres bonnes idées, notons la création d'un statut de la vente en état futur de lotissement et d'un statut de la vente en état futur de rénovation, inspirés tous deux de celui de la vente
en état futur d’achèvement...


Vers la fin du monopole de fait de la rédaction des actes de vente ?

Dans la perspective d'une libéralisation sous la pression de la communauté européenne, des juristes commencent à s'organiser pour revendiquer le droit de conclure des actes de mutation immobilière sous seing privé et les déposer au rang des minutes d'un notaire en vue de la publicité foncière comme l'impose l'article 4 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, sans pour autant supporter des émoluments plein tarif comme pour un acte dressé par le notaire lui-même !

Ceci bien entendu en dehors des cas où la forme authentique est prescrite par la loi, à savoir en l'occurrence les ventes en l’état futur d’achèvement et les constitutions d’hypothèques.

Une plainte a même été déposée auprès de la Commission des communautés européennes pour non-respect par la France du droit européen de la concurrence, du fait de l'existence et du maintien d'un barème obligatoire des émoluments des notaires...

Ceci n'expliquerait-il pas les accents lyriques de Claude Jacquet, président du 99è congrès, dans sa défense de l'authenticité des actes juridiques, meilleur rempart contre une "société à l’américaine où l’autorégulation aboutit au triomphe de la loi du plus fort, du plus riche, du plus puissant" au contraire d'une "société de liberté fixant des règles qui protègent les plus faibles, où l’on recherche l’accord plutôt que l’affrontement" ?...


(1) Discours des intervenants consultables sur le site des Notaires de France

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