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Sérieux toilettage des règles de fonctionnement des copropriétés Le 9/6/2004
UI - Actus - 9/6/2004 - Sérieux toilettage des règles de fonctionnement des copropriétés
On n'en a pas encore fini avec la loi "SRU" ! Si plusieurs dispositions sont successivement entrées en vigueur depuis sa promulgation en décembre 2000 - nouvelles règles de majorité, annualisation de la gestion, simplification du recouvrement des charges impayées, carnet d'entretien, etc. - d'autres restaient encore à traduire dans le décret d'application de la loi qui régit la copropriété. C'est enfin chose faite, avec cependant presque trois ans de retard par rapport au délai normal de publication des décrets d'application ! Et il restera encore un dernier morceau de résistance : la fixation des règles comptables spécifiques que devront adopter les syndicats de copropriétaires - gérés ou non par des syndics professionnels - dont le décret, préparé de longue date par l'administration, n'a cessé d'être remis sur le métier sous la pression des milieux intéressés, organisations professionnelles de syndics, grands groupes et organisations de consommateurs...

La loi "SRU" (loi du 13 décembre 2000 relative à la Solidarité et au renouvellement urbains) visait, en s'intéressant au fonctionnement des copropriétés, reconnues comme constituant un élément clé du paysage urbain et des difficultés apparues au cours des dernières décennies, à prévenir leur dégradation et leur paupérisation par le rétablissement de la confiance et l'amélioration des mécanismes de prise des décisions relatives à l'entretien et à la délivrance des services collectifs nécessaires, dans les petits comme dans les grands ensembles immobiliers.

Le décret d'application (1) creuse le même sillon et, au delà des nécessaires adaptations du décret du 17 mars 1967 pour tenir compte des nouvelles disposition insérées dans la loi du 10 juillet 1965, il ajoute plusieurs innovations par forcément attendues à sa parution...


Le conseil syndical organisé et responsabilisé

"A moins que le règlement de copropriété n'ait fixé les règles relatives à l'organisation et au fonctionnement du conseil syndical", l'assemblée pourra lui fixer de telles règles ou les modifier dorénavant à la majorité de l'article 24 de la loi (majorité simple des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés).

Par ailleurs, le conseil syndical devra désormais systématiquement rendre compte à l'assemblée, "chaque année, de l'exécution de sa mission"...

Enfin en cas de changement de syndic, il aura à connaître la liste des documents transmis au nouveau syndic et aura donc la charge de s'assurer de la non déperdition des archives du syndicat...


Le syndic mieux encadré

Le syndic devra, "pour l'information des copropriétaires", joindre à la convocation de l'assemblée annuelle "l'état détaillé des sommes perçues [...] au titre de sa rémunération", donc y compris les honoraires débités directement aux copropriétaires.

Par ailleurs, la notion de "contrat du syndic" fait pour la première fois son entrée dans les textes ; du fait du double statut du syndic, de mandataire et de prestataire, il est désigné en tant que "contrat de mandat" et devra désormais être voté à la majorité de l'article 25 de la loi (majorité des voix de tous les copropriétaires) et non plus à l'article 24 (majorité des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés) comme il était prévu pour ce qui était appelé "les conditions de la rémunération du syndic (...) ainsi que les modalités particulières d'exécution de son mandat"...

La question se posera dorénavant de savoir si un syndic bénévole est lui aussi tenu à l'obligation de soumettre un contrat : la réponse semble devoir être affirmative, de même a fortiori pour un syndic copropriétaire non professionnel rémunéré !

La notion de renouvellement du mandat du syndic disparaît : désormais il s'agit à chaque fois d'une nouvelle désignation ; par ailleurs si un ou plusieurs syndics sont proposés en concurrence avec le syndic sortant, l'assemblée "ne peut procéder à un second vote à la majorité de l'article 24 qu'après avoir voté sur chacune des candidatures à la majorité de l'article 25" ! Rappelons que l'ordre dans lequel sont examinées les candidatures relève du seul président de séance et qu'il n'y a juridiquement pas de priorité pour le syndic sortant...

La mise en concurrence par le syndic des fournisseurs et entreprises pour les marchés de travaux et les contrats de fournitures, que l'assemblée peut imposer au dessus d'un montant fixé, est définie avec précision : c'est "la demande d'une pluralité de devis ou [...] l'établissement d'un devis descriptif soumis à l'évaluation de plusieurs entreprises"...

Enfin, les syndics - ceux des grands groupes mais pas seulement - ayant des liens d'actionnariat avec des entreprises intervenant pour la copropriété sont soumis a des obligations d'informations des copropriétaires renforcées.


L'assemblée générale mieux organisée

Cela commence à la convocation : lorsqu'un marché de travaux ou un contrat de fourniture est d'un montant supérieur à celui au dessus duquel une mise en concurrence est obligatoire (décision de l'assemblée prise en application de l'article 21 de la loi), les "conditions essentielles" de tous les contrats proposés doivent être jointes à l'ordre du jour, notamment pour la réalisation de travaux.

Les règles pour demander l'inscription de questions à l'ordre du jour sont simplifiées : cette demande en vue d'une assemblée peut être faite "à tout moment" mais "si la ou les questions notifiées ne peuvent être inscrites à cette assemblée compte tenu de la date de réception de la demande par le syndic, elles le sont à l'assemblée suivante" ; il n'y a donc plus de possibilité de demander un "additif" comme auparavant dans les six jours de la réception d'une convocation...

La possibilité en assemblée d'examiner des questions non inscrites à l'ordre du jour est désormais admise, mais "sans effet décisoire".

La feuille de présence "constitue une annexe du procès-verbal avec lequel elle est conservée". Pour la première fois les nouvelles technologies font leur apparition : "elle peut être tenue sous forme électronique dans les conditions définies par les articles 1316-1 et suivants du Code civil !

Pour la constitution du bureau, la notion de scrutateur fait son entrée, mais l'élection d'un ou plusieurs scrutateurs reste facultative.

Enfin, et ce n'est pas la moindre des innovations, le procès-verbal de l'assemblée devra désormais être établi et signé "à la fin de la séance" ! Lui aussi pourra toutefois être établi et signé "sous forme électronique", de même que le registre dans lequel les procès-verbaux doivent être conservés chronologiquement...


Une distinction claire budget prévisionnel et dépenses hors budget prévisionnel

La loi "SRU l'avait voulu, le décret l'a fait : la distinction est fournie très clairement entre les dépenses pouvant être autorisées globalement dans le cadre du budget prévisionnel et celles qui doivent être autorisées de façon spécifique par l'assemblée avec chacune un budget distinct à ne pas dépasser ; en fait le critère est simple : ne doivent pas être inclus dans le budget prévisionnel les "travaux de conservation ou d'entretien de l'immeuble", ou "portant sur les éléments d'équipement communs" qui ne sont pas de "maintenance", les "travaux d'amélioration", les "études techniques, telles que les diagnostics et consultations" et "d'une manière générale, aux travaux qui ne concourent pas à la maintenance et à l'administration des parties communes ou à la maintenance et au fonctionnement des équipements communs de l'immeuble".

Les travaux de maintenance sont définis : ce sont "les travaux d'entretien courant, exécutés en vue de maintenir l'état de l'immeuble ou de prévenir la défaillance d'un élément d'équipement commun ; ils comprennent les menues réparations". Il est également précisé que sont "assimilés à des travaux de maintenance les travaux de remplacement d'éléments d'équipement communs, tels que ceux de la chaudière ou de l'ascenseur, lorsque le prix de ce remplacement est compris forfaitairement dans le contrat de maintenance ou d'entretien y afférent", ainsi "les vérifications périodiques imposées par les réglementations en vigueur sur les éléments d'équipement communs".

Par ailleurs, le conseil syndical ne pourra plus recevoir délégation pour engager des dépenses hors budget dans les limites d'un certain plafond, sauf pour un objet spécifié dans la délégation ; c'est donc la fin des "budgets" votés pour des petits travaux à la discrétion du conseil syndical...


Une préparation du texte pour accueillir les nouvelles règles comptables

Les terminologies et concepts développés dans le cadre du décret comptable en préparation sont mis en place : les états devant être diffusés en vue de l'approbation des comptes s'appellent désormais "l'état financier du syndicat des copropriétaires et son compte de gestion général" ; le syndic est désormais habilité à appeler aux copropriétaires les sommes suivantes :

- "l'avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété", en fait le traditionnel "fonds de roulement", qui est au passage plafonné à "1/6 du montant du budget prévisionnel" ;

- "les provisions du budget prévisionnel" ;

- "les provisions pour les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel", en fait les provisions pour travaux ;

- "des avances correspondant à l'échéancier prévu dans le plan pluriannuel de travaux adopté par l'assemblée générale" ; c'est une nouveauté qui n'était même pas prévue par la loi "SRU" et doit être observée de près car elle annonce peut-être des mesures à venir en vue d'encourager le provisionnement à long terme des travaux...

- "des avances constituées par les provisions spéciales prévues au sixième alinéa de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965" : ce sont les provisions spéciales en vue de faire face aux travaux d'entretien ou de conservation des parties communes et des éléments d'équipement commun, susceptibles d'être nécessaires dans les trois années à échoir et non encore décidés par l'assemblée générale...

Suivent quelques définitions édifiantes :

"Les charges sont les dépenses incombant définitivement aux copropriétaires, chacun pour sa quote-part". Il est également rappelé au passage que "l'approbation des comptes du syndicat par l'assemblée générale ne constitue pas une approbation du compte individuel de chacun des copropriétaires" ! C'était peu connu, même des syndics, et pourtant établi par la jurisprudence....

"Au sens et pour l'application des règles comptables du syndicat :

"- sont nommées provisions sur charges les sommes versées ou à verser en attente du solde définitif qui résultera de l'approbation des comptes du syndicat ;

"- sont nommés avances les fonds destinés, par le règlement de copropriété ou une décision de l'assemblée générale, à constituer des réserves, ou qui représentent un emprunt du syndicat auprès des copropriétaires ou de certains d'entre eux".

"Les avances sont remboursables".

On notera l'apparition encore d'un concept nouveau : l'emprunt pour couvrir une situation financière grevée par exemple par des impayés, ce que n'est pas censé faire le "fonds de roulement", réserve pour des imprévus ou une forte saisonnalité des dépenses...

Les "appels de fonds" par courrier deviennent obligatoires (même pour les syndics non professionnels qui ne les pratiquent pas forcément !)...

Il est également préconisé que le budget prévisionnel soit voté avant le début de l'exercice qu'il concerne, mais le décret admet que ce ne soit pas toujours possible : dans ce cas, "le syndic, préalablement autorisé par l'assemblée générale des copropriétaires, peut appeler successivement deux provisions trimestrielles, chacune égale au quart du budget prévisionnel précédemment voté". L'inconvénient est que, s'il est fait usage de cette faculté, le syndic ne peut en cas d'impayé d'une provision faire jouer la "déchéance du terme" et exiger d'un coup le reste des provisions de l'exercice comme l'y autorise l'article 19-2 de la loi...


Ventes de lots : la fin des litiges ?

Ils n'y étaient pas obligés et pourtant ils l'ont fait : les rédacteurs du décret se sont attaqués à ce qui constitue un des principaux points de friction entre les copropriétaires et les syndics, en rétablissant, précisions à l'appui, la stricte neutralité du syndicat des copropriétaires entre vendeur et acquéreur en cas de vente de lots, telle qu'elle était induite par l'article 20 de la loi, mais dont les professionnels se sont à tort éloignés par la pratique, sous la pression des copropriétaires et des notaires !

Dorénavant seules les provisions "exigibles" avant la vente seront dues par le vendeur au syndicat, y compris pour les travaux, et les provisions devenant exigibles ultérieurement seront dues par l'acquéreur ; les conventions différentes entre parties sont confirmées comme non opposables au syndicat, et il n'y a plus lieu de pratiquer un prorata temporis sur les charges lors de l'apurement de l'exercice : "le trop ou moins perçu sur provisions, révélé par l'approbation des comptes, est porté au crédit ou au débit du compte de celui qui est copropriétaire lors de l'approbation des comptes" !

Par contre, les avances perçues de la part du vendeur lui sont remboursables ("fonds de roulement" mais aussi les provisions "article 18" - voir ci-dessus), et peuvent être reconstituées par appel à l'acquéreur.

Le résultat est que le compte du vendeur pourra être établi le lendemain de la signature de la vente, et son solde créditeur éventuel remboursé sans délai, et sans qu'il y ait lieu d'y revenir après la fin de l'exercice, ce qui devrait éliminer d'un coup ces soldes non réclamés pendant des années...

Notons également (cela annonce une option dans le décret sur les règles comptables à paraître) que le décret considère que le compte des copropriétaires n'est crédité ou débité du trop ou moins perçu sur provisions de l'exercice qu'après approbation des comptes et non avant comme cela se pratique par presque tous les syndics actuellement ! Cette disposition est à prendre au sérieux pour les cas où la signature intervient entre la fin de l'exercice et l'approbation des comptes : le crédit ou le débit relatif à l'exercice clos revient ou incombe à celui qui est copropriétaire lors de l'approbation des comptes...

Quant à la nécessaire information des acquéreurs, elle est sans surprise confirmée comme relevant du seul vendeur et non du syndic : "lorsque le candidat à l'acquisition d'un lot ou d'une fraction de lot le demande, le propriétaire cédant est tenu de porter à sa connaissance le carnet d'entretien de l'immeuble ainsi que le diagnostic technique"...

Normal : une information directe non contrôlée par le vendeur peut être considérée comme la cause d'une transaction compromise si le candidat acquéreur n'a pas aimé ce que le syndic trop disert lui a fait découvrir...


Des syndicats coopératifs et des unions de syndicats mieux contrôlés

Les syndicats coopératifs devront s'afficher comme tels ; l'assemblée pourra désigner, à la majorité de l'article 24, "le ou les copropriétaires chargés de contrôler les comptes du syndicat, à moins qu'elle ne préfère confier cette mission à un expert-comptable ou à un commissaire aux comptes". C'est une nouveauté indispensable : certains syndicats coopératifs gèrent des budgets de plusieurs millions d'euros ! Il est ajouté fort logiquement que "le ou les copropriétaires désignés, l'expert-comptable ou le commissaire aux comptes rendent compte chaque année à l'assemblée générale de l'exécution de leur mission" ; par ailleurs, "le mandat du ou des copropriétaires désignés pour contrôler les comptes du syndicat ne peut excéder trois ans renouvelables. Il ne donne pas lieu à rémunération"... Enfin, bien entendu, ces mandataires ne peuvent avoir de liens familiaux avec le syndic-président du conseil syndical !

Il était temps de prévoir un mode de contrôle qui soit externe au conseil syndical, puisque le syndic le préside et que jusqu'ici il était censé se contrôler lui-même...

Notons aussi que le "syndic-président" peut se faire assister dans sa tâche par un prestataire, mais "sous sa responsabilité", à charge pour lui en cas de faute de rechercher la responsabilité du prestataire, lui-même étant personnellement responsable à l'égard du syndicat...

Par contre, les unions de syndicats pour la gestion des syndicats coopératifs, éliminées sur le papier par la loi "SRU", refont leur apparition : "les syndicats de forme coopérative peuvent, même si les immeubles ne sont pas contigus ou voisins, constituer entre eux des unions coopératives ayant pour objet de créer et gérer des services destinés à faciliter leur gestion". Ces "unions" bénéficient du statut juridique des unions de syndicats, forme de personne morale entièrement définie par la loi sur la copropriété, et forcément très souple, sans les contraintes des associations de loi de 1901, et constitueraient potentiellement de redoutables concurrents pour les syndics s'il n'y avait pas de freins puissants au développement de la copropriété coopérative...

Les "Unions" classiques de syndicats (l'union est un groupement doté de la personnalité civile, dont l'objet est d'assurer la création, la gestion et l'entretien d'éléments d'équipement communs ainsi que la gestion de services d'intérêt commun entre un ou de plusieurs syndicats de copropriétaires, des sociétés immobilières, et de tous autres propriétaires dont les immeubles sont contigus ou voisins) sont dotées de procédures permettant aux membres et notamment à ceux qui sont des syndicats de copropriétaires d'en contrôler les décisions et la gestion.

Dernière précision : les dispositions liées aux nouvelles règles comptables et aux états qui devront être fournis entreront en vigueur à la date où ces règles sont censées devenir applicables, à savoir le 1er janvier 2005. La plupart des autres dispositions entreront en vigueur le 1er septembre 2004, sauf celles concernant le fonds de roulement et le budget prévisionnel qui sont d'application immédiate...

(1) décret n° 2004-479 du 27 mai 2004 modifiant le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis

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