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Il faut sauver la GRL ! Le 11/12/2010
UI - Actus - 11/12/2010 - Il faut sauver la GRL !
Il paraît que la GRL (Garantie des risques locatifs), dispositif d'assurance loyers impayés promu par l'Etat et Action logement (le 1%) ne "marche pas" : on entend parler d'échec, de "ratage". Le gouvernement qui a flanché sur le chemin d'une "GURL", garantie "universelle" c'est à dire obligatoire pour tous les bailleurs privés, pourtant inscrite au programme du candidat Nicolas Sarkozy, s'en émeut et cherche une solution car la sécurisation du bailleur privé devrait être au coeur de sa politique de développement de l'offre locative et de l'accès au logement pour les jeunes et les bas revenus. Un amendement sénatorial à la loi de finances pour 2011 le pousse à sortir du bois...

GRL 1 et GRL 2 : l'inconvénient des demi-mesures



La diffusion de la nouvelle GRL (garantie des risques locatifs ou GRL 2) est en panne : il était espéré 400.000 contrats la première année, il n'y en a eu qu'à peine 62.500 à septembre 2010. Le dispositif, qui devait être obligatoire et supplanter la garantie impayés classique (la "GLI"), sous Christine Boutin, ministre du logement au moment de la négociation du passage de la GRL1 à la GRL 2, est resté facultatif (1). Les assureurs, que la ministre n'a pas osé affronter, et qui devaient choisir entre la GLI et la GRL, ont très majoritairement choisi de rester à la GLI, alors même que pour leur forcer la main, le gouvernement insérait dans la loi "Boutin" du 25 mars 2009 une disposition interdisant désormais le cumul d'une garantie de loyers et d'une caution personnelle.

Le résultat de cette demi-mesure était prévisible : les souscriptions n'ont pas été le raz de marée escompté, la mutualisation des risques est insuffisante - les souscriptions ont tendance à concerner prioritairement les mauvais risques - et l'équilibre économique du système est fragilisé.

Les raisons de fond sont multiples : le produit suscite une méfiance chez les propriétaires qui ont du mal, notamment dans les zones tendues où ils trouvent facilement des candidats locataires, à renoncer à la caution personnelle ; même chose pour les administrateurs de biens professionnels qui ont de surcroît leurs habitudes avec leurs courtiers et la GLI, et qui expriment une hostilité quasi-idéologique à l'égard d'un produit censé encourager la location avec des taux d'effort élevés, susceptible selon eux de déresponsabiliser les locataires. L'expérience prouve pourtant que la GRL couvre à ce stade des locataires dont le taux d'effort ne dépasse pas 35%, au lieu de 30% pour les locataires soumis à la GLI, donc loin des 50% du maximum fixé !

Tous sont aussi sensibles à l'idée reçue qui circule, encouragée par l'UNPI (Union nationale de la propriété immobilière) et de larges milieux professionnels (malgré la position courageuse prise en faveur de la GRL par la FNAIM), selon laquelle le traitement des sinistres ne fonctionnerait pas et que leur multiplicité condamnerait le système à la faillite. Il est vrai que les débuts quelque peu chaotiques de l'APAGL, filiale de l'UESL (Union des entreprises et des salariés pour le logement, organisme fédérateur des collecteurs du 1% logement et porteur du projet de la GRL) chargée du recouvrement et du traitement social ou judiciaire des impayés, a pu indisposer les bailleurs qui avaient souscrit, ce qui lui a fait mauvaise réputation. On a aussi fait courir le bruit que l'APAGL allait maintenir les débiteurs dans les lieux indéfiniment, que le traitement "social" était complaisant, et que les propriétaires auraient beaucoup de mal à récupérer leur logement en cas d'impayé longue durée, alors que l'APAGL a d'emblée déclaré un taux de traitement judiciaire des impayés de 50%, et qu'elle s'engage à procéder au relogement, grâce au réseau des ESH (les organismes HLM du 1%) de tous les locataires incapables de rétablir leur situation...

Une autre cause est également la résistance des assureurs : seuls trois ont à ce stade basculé dans la GRL - DAS, filiale des Mutuelles du Mans, CGAIM, l'assureur et caisse de garantie de la FNAIM et la Mutuelle d'Alsace-Lorraine -, les autres continuant à miser sur une GLI, pourtant "plombée" par l'interdiction de se contre-garantir par une caution personnelle, une telle attitude ne se comprenant que par la conviction de l'explosion prochaine de la GRL et d'un retour arrière du gouvernement.

Face à cette situation, les sénateurs ont voulu traiter le problème à leur façon en votant, la veille du congrès de la FNAIM où les grands acteurs de la GRL devaient se croiser, un amendement au projet de loi de finances pour 2011 instituant une taxe de 25% sur les primes d'assurance de la GLI, en vue d'alimenter un fonds de mutualisation des risques avec la GRL. Cet amendement a eu - c'était peut-être l'intention de ses auteurs - l'effet d'un coup de pied dans la fourmilière. Le gouvernement, par la bouche de Benoist Apparu, et Action Logement, porteuse de la GRL et "réassureur" des contrats, par celle du président de l'UESL, Jérôme Bédier, présents au congrès, ont annoncé qu'ils se donnaient une semaine (il faut trancher le problème avant l'examen du budget par la commission mixte paritaire) pour mettre autour de la table les parties prenantes, et notamment les assureurs pour trouver les solutions permettant de remettre sur pied la GRL.


Le gouvernement va-t-il sauver la GRL ?



Celle-ci reste un élément central de l'accès au logement par les couches de population, de plus en plus larges, qui ne peuvent en raison de la pénurie avoir accès au parc HLM, alors que 60% par exemple des locataires en Ile-de-France ont un niveau de ressources qui les rend éligibles, et qui sont aussi écartés du logement privé, soit parce qu'ils ne peuvent avoir de caution, soit parce que leurs ressources sont insuffisantes, ou encore, et ils sont de plus en plus nombreux, parce qu'ils sont temporairement au chômage ou en emploi précaire (intérim, CDD, etc.). Ces derniers sont 40% des candidats au logement, deux fois plus qu'il y a dix ans !

"C'est une réponse idéale pour diminuer la vacance", plaidait encore mardi le président de la FNAIM, René Pallincourt au congrès de sa fédération. Et le complément nécessaire au statut du bailleur privé qu'il appelle de ses voeux : un statut fiscal qui proportionne l'allègement de l'impôt sur le revenu au sacrifice fait sur les loyers et à l'acceptation de locataires aux ressources plus modestes ou plus précaires que ce qu'il accepterait normalement, avec une sécurisation efficace à la clé !

Comme il fallait s'y attendre, l'amendement des sénateurs qui vise à mutualiser les risques entre la GRL et la GLI, et rééquilibrer les deux dispositifs a attiré toutes les critiques, y compris de Benoist Apparu, qui ne l'avait pourtant pas exclu il y a quelques semaines... "Cela revient à demander que ceux qui ont souscrit un bon contrat d'assurance payent pour un mauvais système", a déclaré sans attendre Jean Perrin, président de l'UNPI, au magazine l'Expansion. Depuis le lancement de la GRL, il dénonce ses effets pervers, tant pour les propriétaires que pour les locataires. "Aujourd'hui, si un candidat à la location se présente avec une demande de GRL, le propriétaire se dit qu'il n'a pas le meilleur dossier. Alors quand en zones tendues, un bailleur a quarante dossiers à sa disposition, ce n'est pas lui qu'il va retenir", explique t-il. Même écho à la CNL (Confédération nationale du logement) : "Tant que les propriétaires ne sont pas obligés d'accepter la GRL, ça ne résoudra rien sur le terrain. Trop de locataires sont encore obligés d'avancer des cautions importantes ou ne trouvent pas de logements", déclare Didier Pavageau, son secrétaire confédéral, dans des propos rapportés par le même hebdomadaire.

Le fait de rendre la GRL obligatoire n'est pas exclu, y compris par le secrétaire d'Etat Benoist Apparu, qui s'est laissé aller à quelques confidences en ce sens fin octobre. L'UNPI réclame une GURL obligatoire, mais tient contre vents et marées à y faire participer les locataires, pour des raisons plus idéologiques que pratiques, car il est facile pour les bailleurs de répercuter le coût d'une assurance payées par eux à leurs locataires...

Un bras de fer va en tout état de cause avoir lieu dans les jours qui viennent ; reste à savoir qui sera le vainqueur de ce billard à 5 bandes dont dépend l'avenir de l'accès au logement tant promis !


(1) Universimmo.com - 25 janvier 2010 : "Bailleurs - locataires : la GRL se met en place mais se heurte à des réticences idéologiques"

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