Manque d’appétence ou de moyens ?La rénovation énergétique des logements ne décolle pas ! Si 80% des ménages voudraient réduire la facture énergétique de leur logement qui ne cesse d'augmenter, seuls 12% d'entre eux ont fait des travaux en ce sens, selon le baromètre annuel "10.000 ménages" de l’ADEME publié le 19 septembre 2013 (1). Et ce taux ne cesse de reculer : il était de 13% en 2011, 14% en 2010 et 15% en 2009 ! Pourtant, leur facture s'est encore alourdie de 160 euros en 2012 à 1.403 euros par ménage. Les dépenses de gaz sont celles qui ont le plus augmenté (879 euros en 2012 contre 640 euros en 2007), relève l'Agence. L'objectif présidentiel de rénover 500.000 logements par an d'ici à 2017 (contre 150000 en 2012 et probablement moins en 2013...), et ainsi de diminuer de 38% la consommation d'énergie dans le secteur du bâtiment à horizon 2020, est encore loin ! En grande majorité, note l'ADEME, les ménages reconnaissent que les travaux réalisés ont amélioré au final le confort de leur habitat (97%) et ont aidé à réduire les dépenses énergétiques (88%). L'obstacle est en réalité financier pour 77% des ménages interrogés. Pour ceux qui se sont lancés dans des travaux en 2012, le budget moyen a été de 4.359 euros par ménage. Ce budget est en baisse (4.517 en 2011). Autre obstacle : l'ignorance des aides. Parmi celles disponibles, le crédit d'impôt est le plus souvent cité, mais sa notoriété est en baisse (73% des ménages le connaissent contre 86% en 2009). L'éco-prêt à taux zéro est aussi moins cité qu'auparavant : 37% des ménages disent le connaître contre 54% en 2010. Les banques, censées le distribuer, se sont en effet faites discrètes... Un nouveau départ pour la rénovation énergétique ?Le 20 septembre, le président de la République en ouverture de la Conférence environnementale annonçait plusieurs mesures pour relancer la rénovation énergétique des logements, dont la plus spectaculaire était celle de l'application d'une TVA à 5% à tous les travaux de rénovation énergétique à compter du 1er janvier 2014. C'est une réduction de 5 points par rapport au taux de 10% qui s'appliquera aux autres travaux d'entretien du bâtiment à compter de 2014. Ces annonces avaient été précédées la veille par le lancement de la campagne "J'éco-rénove, J'économise" de l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie). Pour inciter les Français à engager des travaux de rénovation énergétique dans leur habitat et de les aider dans leurs démarches, le gouvernement table sur deux principaux leviers : un réseau de 450 "points rénovation info service" (PRIS) répartis sur l'ensemble du territoire (les espaces Info énergie (EIE) de l'ADEME, les agences locales de l'énergie (ALE) crées par les collectivités territoriales, les bureaux locaux de l'ANAH, les ADIL, etc.) et le renforcement des aides aux particuliers pour financer la rénovation énergétique de leur logement : le plafond de ressources donnant accès aux aides de l’ANAH a été relevé de sorte que 46% des Français y sont désormais éligibles. Par ailleurs, les ménages auront droit à l'une ou l'autre de deux primes sous conditions de ressources : une de 3.000 euros pour les ménages les plus modestes et une de 1.350 euros pour les autres. Crédit d'impôt et prêt à taux zéro : du neuf avec du vieux...Egalement annoncée le 19 septembre, une réforme du crédit d’impôt en faveur du développement durable (CIDD) et de l’éco-prêt à taux zéro (Eco-PTZ). Le CIDD sera simplifié par la substitution, aux 10 taux actuellement applicables, de deux taux selon que la dépense est réalisée en action seule ou dans le cadre d’un bouquet de travaux, avec des taux incitatifs de 15% pour les actions seules et de 25 % pour les opérations conduites dans le cadre d’un bouquet de travaux ; mais il faudra au moins deux actions pour en bénéficier, seuls les ménages modestes conservant la possibilité de réaliser plus progressivement des rénovations, en bénéficiant de l’incitation fiscale au titre des actions simples. Par ailleurs, le dispositif sera recentré sur deux composantes : l’isolation thermique de l’habitat et les équipements de production d’énergie qui utilisent une source d’énergie renouvelable qui ne bénéficieraient pas déjà de soutien public. En seront donc exclus le photovoltaïque, les appareils de régulation de chauffage ainsi que les équipements de récupération et de traitement des eaux pluviales. Enfin, les dépenses réalisées par des propriétaires bailleurs, déjà déductibles de leurs revenus fonciers, ce qui encourage leur réalisation, ne seront plus éligibles à l’avantage fiscal. L’ Eco-PTZ, prolongé jusqu’au 31 décembre 2015 en cohérence avec la durée d’application du CIDD, sera réservé, au titre de l’ "éco-conditionnalité", en à la réalisation des travaux par des entreprises satisfaisant des critères de qualification (le label "Reconnu Grenelle Environnement" ou RGE). Pour les Eco-PTZ collectifs accordés à des syndicats de copropriétaires, toujours en attente de leur décret d’application, la durée maximale de réalisation des travaux est portée de deux à trois ans pour les éco-PTZ. La mesure est globalement équilibrée au plan budgétaire. Les certificats d'économie d'énergie : un financement prometteur, mais plus tard...Les ménages qui entreprennent des travaux peuvent aussi bénéficier d'une autre "coup de pouce" grâce aux certificats d'économie d'énergie (CEE). Les fournisseurs d'énergie ou de produits énergétiques sont en effet astreints depuis 2006 à faire réaliser par leurs consommateurs des travaux permettant d'économiser une certaine quantité d'énergie, faute de quoi ils sont à la fin de la campagne tenus de payer des pénalités. Ce sont les "obligés". Toute personne qui réalise des travaux permettant d'économiser de l'énergie peut les inscrire au compte de l'un d'entre eux qui va obtenir grâce à cela un certificat lui permettant de justifier de l'atteinte de son objectif et éviter une pénalité. A noter que les "obligés" versent actuellement en contrepartie pour les obtenir entre 2,5 et 4 euros du MWh "cumac" (megawatt/heure cumulé actualisé sur la période de la vie de l’équipement ou de l'immeuble - les économies sont calculées forfaitairement au moyen de "fiches d'opérations standardisées"), alors que la pénalité qu'ils encourent est pour la campagne en cours (2010-2013) de 20 euros... En fait, les CEE bénéficient au client final via une "prime" versée par les vendeurs et installateurs de chaudières (y compris les magasins de la grande distribution), ou encore par les fournisseurs d'énergie quand ils proposent des travaux d'économie via leurs filiales ou leurs réseaux d'entreprises, mais ils peuvent aussi être encaissés directement par les propriétaires qui entreprennent une rénovation. Dans le premier cas, ils se traduisent par une réduction du prix des travaux facturés par l'entreprise qui les réalise, celle-ci se chargeant de les encaisser auprès d'un "obligé". Dans le second, le propriétaire peut s'adresser directement à un obligé, ou de préférence, pour avoir un meilleur prix, passer par un courtier spécialisé qui fait régulièrement des appels d'offres et les propose au mieux disant. Bien entendu dans ce cas, le courtier prend une commission au passage Si les sommes obtenues actuellement sont de quelques centaines d'euros (3 à 400) pour une chaudière ancienne remplacée par une chaudière à condensation, quelques milliers d'euros pour des travaux collectifs plus importants, elles sont appelées en principe à augmenter nettement avec la 3ème campagne (2014-2017) en cours de négociation. A suivre... Les copropriétés : pour le moment laissées pour compte !Si sur un parc immobilier total de 34 millions de logements, 14 millions sont des maisons individuelles, dont 10 occupées par leurs propriétaires, 8,5 millions de logements sont en copropriété, dont au moins 8 en immeubles collectifs ; et sur les 600.000 copropriétés qui regroupent ces logements, 250.000 sont en chauffage collectif. Or force est de constater que pour elles, les dispositifs d'encouragement sont plutôt homéopathiques... Les copropriétaires peuvent certes bénéficier pour leur logement des mêmes aides (CIDD, Eco-PTZ et primes pour travaux ceux qui y sont éligibles), pour leurs parties privatives, pour des isolations par l'intérieur, le changement de leurs fenêtres ou leur chaudière individuelle s'ils ne sont pas en chauffage collectif, mais aussi pour les parties communes en cas de travaux d'économie d'énergie menés par la copropriété : isolation par l'extérieur et/ou de la toiture, rénovation de la chaufferie, voire même recours aux énergies renouvelables : pompe à chaleur, bois, solaire etc. Le fait est que les économies d'énergie pouvant être réalisées par des travaux sur les parties privatives seules sont assez limitées : l'initiative individuelle reste en général minoritaire, par la force des choses : un changement de chaudière fait certes faire un peu d'économies, mais il est assez vain si le copropriétaire ne procède pas en même temps à une isolation ; or une isolation par l'intérieur ne peut se faire que lors de gros travaux de rénovation du logement, et elle a l'inconvénient de réduire la surface. Les changements de fenêtres sont quant à eux soumis à l'agrément de la copropriété - l'assemblée des copropriétaires a la main sur tout ce qui touche à l'aspect extérieur de l'immeuble -, quant au modèle et la matière (bois, aluminium, PVC, etc.) : si la copropriété ne décide pas un changement général des fenêtres, les copropriétaires sont freinés par les limitations qu'impose un changement à l'identique... Restent donc les travaux collectifs. Mais là, les aides individuelles sont plus compliquées à obtenir, et dépendent beaucoup de la copropriété. Selon ce qui est prévu, le CIDD recentré exigera, comme l'Eco-PTZ individuel aujourd'hui, un "bouquet" d'au moins deux types de travaux menés en même temps, ce qui rend les choses plus difficiles en copropriété, où on a tendance à voter les travaux les uns après les autres... Quant aux aides de l'ANAH, elles sont sous le régime du programme "Habiter mieux" ("aide de solidarité écologique" ou ASE, octroyée en complément d'une subvention aux travaux classique de l'ANAH et d'une aide à l'accompagnement pour l'élaboration, le montage et le suivi du projet de rénovation), et donc sous conditions de ressources pour les occupants et sous conditions de conventionnement pour les bailleurs. Les aides collectives, quant à elles, ne brillent ni par leur importance, ni par leur simplicité ! L'ANAH peut accorder une subvention au syndicat des copropriétaires pour la réalisation de travaux d'économie d'énergie portant sur les parties communes, en complément des ASE ; comme elles, elle est versée aux copropriétaires afin de financer la quote-part des travaux leur incombant. Ne sont concernés que les copropriétaires satisfaisant aux conditions d'éligibilité (propriétaires occupants aux ressources modestes ou très modestes). Mais il faut que les travaux atteignent 35% d’économie d’énergie... Le syndicat des copropriétaires peut aussi mobiliser les CEE, mais on a vu que leur montant reste pour le moment modeste. Enfin, les copropriétés pourront, sous réserve de parution d'un décret d'application, et de la bonne volonté de banques pour le distribuer, obtenir un Eco-PTZ collectif : la loi sur la copropriété a été modifiée pour légaliser les emprunts des copropriétés en 2013 l'extension aux syndicats de copropriétaires de l'Eco-PTZ avait été voté dès la loi de finances de 2011 !... En attendant le tiers financement ?Conscient du caractère modeste de ces dispositifs incitatifs pour un parc en copropriété prenant une large part de la consommation d'énergie et l'émission des gaz à effet de serre, le gouvernement semble compter en réalité sur l'émergence à grande échelle du "tiers financement" : défini dans le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové ("ALUR") comme caractérisé, dans le champ d’opérations de rénovation de logements, par "l’intégration d’une offre technique, portant notamment sur la réalisation des travaux, à un service comprenant le financement partiel ou total de ladite offre, en contrepartie d’une rémunération sous forme de redevance globale, régulière et limitée dans le temps". En fait, le tiers financement s'applique en complément à un "contrat de performance énergétique" ou CPE, dont les travaux sont financés par un tiers et que la copropriété rembourse sur les économies réalisées. Les grands groupes de BTP et les grands fournisseurs d'énergie ont déjà lancé des expérimentations (Bouygues, Gaz de France Provalys...), qui ne paraissent pas pour le moment optimisées, en tous cas pour les copropriétés concernées : l’ARC (Association des responsables de copropriété), qui a "disséqué" les contrats qu’elle s’est procurés, a émis de sérieuses réserves sur leur économie générale et même sur les conséquences sur les locataires des copropriétaires bailleurs... Pas étonnant en fait : ces grands groupes financent ces opérations sur capitaux internationaux et exigent une rentabilité importante. Un financement aidé par l'Etat et les collectivités territoriales, et la constitution à leur initiative de structures de tiers financement ou de tiers investissement, au plan national comme au plan local, peut permettre de réaliser et financer des opérations plus intéressantes pour les copropriétés ; ainsi, le Conseil régional d’Ile-de-France a décidé dans le cadre du Plan Climat de la région la création d’une société d’économie mixte (SEM) appelée "Energies Posit’if" : elle aura pour mission le développement d’aides à la rénovation thermique des logements et des énergies renouvelables. Orientée vers les copropriétés, les petits bailleurs sociaux et le parc des bâtiments des collectivités territoriales, elle apportera le financement initial et sera remboursée sur 15 ou 25 ans. Les obstacles restent néanmoins encore nombreux sur cette voie, à commencer par la mise au point des conditions juridiques et assurantielles de la garantie de performance énergétique, pièce indispensable d'un CPE avec tiers financement, mais aussi de la capacité des sociétés de tiers financement ou de tiers investissement à proposer des opérations qui se traduisent pour les copropriétés par une économie substantielle immédiate sur leur facture énergétique et pas seulement après remboursement du financement, condition sine qua non de l'obtention d'une décision favorable des assemblées de copropriétaires ! Pourquoi s'engager dans une aventure complexe dont on n'est pas sûr de tout comprendre, et pleine d'aléas qu'on n'est pas sûr de maîtriser, pour une économie nette dérisoire, voire négative après paiement de la redevance du "tiers financeur", avec de surcroît le risque d'avoir à la fin du remboursement à réinvestir dans le remplacement de matériels dont la durée de vie n'excèderait pas la durée du contrat ? (1) ADEME - 19 septembre 2013 : baromètre TNS Sofres 2013 "10 000 ménages" Suite : 2ème partie : Le (très) difficile passage à l'acte des copropriétés -*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-* Inscrivez-vous pour revevoir gratuitement notre lettre Des réponses à vos questions !!! 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