Les députés Christophe Caresche (PS) et Michel Piron (UDI), rapporteurs de la mission d'évaluation et de contrôle sur l'optimisation des aides à la construction de logements sociaux, ont présenté le 18 juillet devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, au terme d'une série d'auditions des acteurs du secteur menées depuis le début de l'année 2013, 51 recommandations pour optimiser la construction de logements sociaux.
Ils recommandent d'abord un renforcement des "dispositifs d'identification des besoins du terrain et de connaissance des loyers des marchés locaux". En fait ce renforcement est prévu par le projet de loi "ALUR" et a même commencé à être expérimenté par le ministère de l'égalité des territoires et du logement. Ils estiment à cet égard que "l'observation des loyers doit, au moins, être faite en lien avec celle des niveaux de revenus", et recommandent que l'État récupère et synthétise des données qui "remonteraient des territoires intercommunaux et régionaux". Par ailleurs, ils invitent les collectivités à "croiser leurs études avec le diagnostic patrimonial dressé par les bailleurs sociaux dans leurs plans stratégiques de patrimoine".
Comme la Cour des comptes et l'USH, ils recommandent "la définition d'un zonage propre à la programmation de logements sociaux", afin de privilégier réellement le développement du logement social dans les zones où les besoins sont les plus importants, même s'il faut éviter le risque de sacrifier les "attentes légitimes" des autres zones ; ils recommandent de "tenir compte des bassins d'emplois prioritaires et de l'offre en capacité de mobilité des territoires".
Sans en faire une fin en soi, les deux rapporteurs préconisent vivement le regroupement des bailleurs sociaux "au sein d'entités de taille conséquente disposant des mêmes ressources, compétences et expertises, et constituant de ce fait une véritable force de frappe en vue de la construction de logements sociaux, en association avec les collectivités locales". La loi ALUR facilitera les choses en imposant aux offices HLM d'être rattachés à un EPCI à compter du 1er janvier 2017 : sans les obliger à fusionner, une telle mesure vise clairement à favoriser les rapprochements et mutualisations entre organismes. A noter qu'un mouvement en ce sens est engagé dans l'autre branche du logement social, les ESH d'Action Logement.
En ce qui concerne la mobilisation des moyens financiers, les deux députés "rappellent la nécessité d'intégrer les besoins d'entretien et de rénovation des logements sociaux existants dans les projections financières et les programmations relatives au développement du parc" et recommandent d'étudier une prolongation des exonérations de (taxe foncière (TFPB) dont profitent les nouvelles opérations de logements sociaux.
Par ailleurs, ils reprennent à leur compte les propositions de la Caisse des dépôts, visant à optimiser les prêts qu'elle délivre aux bailleurs sociaux. Il s'agirait ainsi de réaménager la dette existante et d'augmenter temporairement la quotité de prêt pour les opérations nouvelles, ou encore d'allonger temporairement, par exemple de 10 ans, la durée des prêts proposés. Ils recommandent également de baisser la commission de centralisation des livrets A versée par la CDC aux établissements bancaires...
Afin de faciliter la vente des logements aux locataires (la "vente HLM"), de nature à apporter des ressources nouvelles aux organismes, les rapporteurs insistent sur la nécessité d'appliquer fermement le dispositif des suppléments de loyer de solidarité, et proposent que les préfets puissent autoriser les mises en vente avant que les travaux de remise aux normes ne soient entrepris ; il faudrait aussi, pour rassurer les collectivités, réfléchir à tout ce qui permet une meilleure gestion des copropriétés, notamment quand il existe une mixité entre logements sociaux et propriétaires occupants. Enfin, les deux députés estiment que l'accession à la propriété d'un logement social doit être réversible dans de bonnes conditions pour les anciens locataires accédants, et suggèrent d'étudier les moyens de relancer le levier du prêt à taux zéro (le "PTZ+") pour les ventes HLM. La possibilité d'en bénéficier existe actuellement, mais elle serait peu utilisée...
Concernant la création de logements sociaux nouveau, le rapport préconise de privilégier la construction neuve, seule garante d'un développement de l'offre d'ensemble et plus riche en emplois, à la transformation de logements privés existants pour produire du logement social, du moins "en fonction de la densité ou plus précisément du niveau de disponibilité foncière du territoire cible". Ils recommandent un "durcissement plus net des taxes foncières sur les terrains à bâtir en zones tendues", afin de favoriser leur construction ou accélérer leur mise sur le marché, et accessoirement apporter un supplément de recettes locales toujours bienvenu...
Ils saluent par ailleurs les mesures favorisant la densification adoptées dans le cadre de la loi d'habilitation du gouvernement à procéder par ordonnances pour accélérer les projets de construction, susceptibles selon eux de contribuer à dégager des marges foncières, trop rares en zones tendues, pour répondre aux objectifs de construction de nouveaux logements.
Ils rappellent leur attachement à un pilotage intercommunal de la politique de développement du logement social et recommandent de "viser l'instauration d'un dossier unique de financement des logements sociaux et l'harmonisation du calendrier des financeurs".
Enfin, Michel Piron et Christophe Caresche suggèrent que l'octroi des aides à la construction puisse être conditionné à l'existence d'accords de régulation du marché ou à des conventions d'objectifs entre les préfets et les intercommunalités qui comprendraient, entre autres, des engagements en termes de localisation domicile-travail et de taux de mobilité. En cas de refus de délivrance des permis de construire nécessaires à la production de logements sociaux dûment prévue dans les documents de planification, ils proposent la substitution d'office des intercommunalités aux communes, et s'interrogent sur la possibilité de moduler la dotation globale de fonctionnement en cas d'insuffisance des efforts de rattrapage des communes en matière de construction de logements sociaux ou, a minima, en cas de constat de carence...
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