Le succès du dispositif Pinel au 1er semestre 2015 a "boosté" les ventes d'immobilier neuf et redonné le moral aux promoteurs. Il marque un premier retour des investisseurs privés dans le logement intermédiaire que le dispositif d'incitation fiscale cherche à encourager. Mais le 1er semestre 2015 pourrait aussi bien marquer le retour dans ce segment de l'immobilier d'une autre catégorie d'investisseurs qui avait déserté l'immobilier résidentiel : les institutionnels (assurances, caisses de retraites, banques).
En dix ans, la part du logement dans le portefeuille des investisseurs institutionnels était en effet tombée à environ 10% des actifs immobiliers et moins de 1% du total de leurs actifs. Les raisons sont connues : des prix perçus comme élevés, le poids des nouvelles normes de solvabilité pour une part importante de ces institutionnels, les risques d'image liés aux contentieux avec les occupants et, plus généralement, le coût de la gestion locative, beaucoup plus lourd ramené au m2 que celui de bureaux, locaux commerciaux et autres bâtiments de logistique...
Selon Vincent Mahé, secrétaire général du groupe SNI (Société nationale Immobilière), filiale de la Caisse des dépôts et acteur engagé en pointe dans le retour vers le logement intermédiaire, quatre facteurs au moins contribuent à faire bouger les lignes.
Le premier est conjoncturel : avec la baisse des taux d'intérêt et du rendement des obligations, l'immobilier est une alternative peu risquée, par exemple à la dette d'Etat. Du coup, "le logement affiche un bon équilibre entre rendement et risque, avec une prime de l'ordre de 2 % sur les emprunts d'Etat, des taux de vacance faibles dans les grandes villes, une performance résiliente quelle que soit la situation économique".
Le second est plus structurel : la démographie est plus importante pour le logement que les variations du cycle d'activité. Les grandes villes françaises affichent le taux de croissance le plus fort d'Europe, sous la poussée démographique plus dynamique que dans les autres pays, des tendances sociales (liées aux divorces et à la décohabitation) qui multiplient le nombre de ménages à population constante, et surtout une augmentation continue du taux d'urbanisation, passé de 74 % à 87 % depuis 1990, et qui devrait atteindre 93 % en 2020. Or d'après les études de l'INSEE, près de la moitié de la croissance démographique future devrait se concentrer sur 1 % du territoire français, situé principalement en région parisienne et dans quelques métropoles de province. Les besoins qui résultent de ce mouvement de population sont encore renforcés par l'inadaptation du parc actuel aux normes environnementales et aux typologies recherchées par les locataires, qui demandent plus de petites surfaces, remarque la SNI. "Entre le cœur de Paris, où les prix se sont envolés, et des territoires ruraux où ils marquent un recul, apparaissent ainsi des zones tendues où le logement présente de solides perspectives de valorisation, portées par ce déséquilibre structurel entre l'offre et la demande de logements", explique-t-il.
Le troisième facteur est que les pouvoirs publics ont fait leur part du chemin. La loi ALUR a été amendée avant même d'entrer en vigueur, et le statut du logement intermédiaire créé par la loi de finances pour 2014 offre une TVA à taux réduit et une exonération de taxe foncière. Le logement intermédiaire retrouve ainsi une rentabilité locative nette de 3,5 à 4% (à comparer à la performance de 2,8% constatée par l'institut IPD en 2014 pour l'ensemble du secteur immobilier, incluant le tertiaire).
Enfin, les institutionnels semblent vouloir, en investissant dans le logement, saisir l'occasion de se montrer vertueux, soutenir l'emploi en France et faire oauvre d'exemplarité en mettant en oeuvre des normes environnementales exigeantes. "Sans prendre le pas sur l'analyse financière, ces éléments de responsabilité sociale et environnementale jouent un rôle important pour des investisseurs institutionnels de plus en plus sensibles à la cohérence globale de leurs choix", confirme la SNI.
A noter que la SNI et la Société du Grand Paris ont signé le 24 juin un protocole de partenariat visant à accroître la production de logements (sociaux et intermédiaires) dans les futures gares du réseau du Grand Paris Express.
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