Le projet d’immeuble de 26 logements s'appelle "Edison Lite", et doit être construit pour fin 2018 à Paris, place d’Italie. Les appartements sont depuis le 4 mars mis en vente sur Internet à un prix inférieur de 30% à celui du marché (tout de même 7.990 euros le m2...), et les acheteurs ne devraient pratiquement pas supporter de charges de copropriété ! Est-ce possible ?
En fait il s'agit d'un des projets primés au concours "Réinventer Paris", la Ville de Paris lui ayant attribué une parcelle de terrain pour sa construction, ce qui déjà fait une différence avec une opération classique. Il y a ensuite le mode de commercialisation, purement Internet et "inversée", explique Benjamin Delaux, chez Nouvelles Fonctions Urbaines, la société auteur du concept, dans un entretien avec Les Echos. "L’immeuble sera conçu en fonction de la demande des acquéreurs, et il n’y a donc pas de risque commercial. L’absence de publicité, de frais de commercialisation, de crédit bancaire d’accompagnement et autres coûts financiers des logements tardant à se vendre, est censée permettre d'économiser de 20% à 23% sur le coût du logement . Le terrain a aussi été vendu à Edison à la valeur d’expertise de France Domaine, et non via les classiques enchères dont se plaignent les promoteurs car elles font déraper les prix. Mais l’économie sur le foncier n'excéderait pas 5% du coût du logement, assure Benjamin Delaux, qui préfère insister sur la baisse des coûts due au fonctionnement en plate-forme Internet collaborative avec les acquéreurs. A voir...
En tous cas, cela permet au promoteur de faire cadeau à la copropriété de surfaces commerciales en rez-de-chaussée et en sous sol, que le syndicat des copropriétaires va pouvoir mettre en location au profit des copropriétaires, revenu qui permettra de financer les charges de l'immeuble. Le locataire du commerce serait déjà sécurisé avec un bail commercial : il s’agit d’une filiale de Cofely (groupe Engie, ex GDF Suez), partie prenante dans le projet. "Nous avons estimé les revenus locatifs annuels à 40.000 euros, contre environ 33.000 euros de charges de copropriété (23 euros le mètre carré, chauffage collectif inclus), indique Maximilien Motto chez Loftissime, co-promoteur d’Edison, rapporté par Les Echos. "Les 7.000 euros de surplus iront à un fond de financement des travaux à prévoir à long terme, de type toiture, façade ou aléas divers" : en fait un fonds de travaux, de toutes façons obligatoire à compter du 1er janvier 2017. Et pour que les copropriétaires ne tuent pas la poule aux oeufs d'or, en fait qu'ils ne vendent les locaux commerciaux pour empocher le produit de cession, la copropriété est engagée à les conserver dix ans !
Il n'en reste pas moins que le calcul semble optimiste, même si l'immeuble est au top de la performance énergétique. Pour tenir le budget, il est quand même recommandé aux copropriétaires de ne pas recourir à un syndic professionnel... A ce prix, un m2 de local commercial loué 500 euros du m2 annuel (la moyenne à Paris) compense 20 m2 de charges et le tour serait joué. On oublie aussi un élément dans le prévisionnel : le loyer perçu sur les locaux commerciaux constitue un revenu foncier imposable pour les copropriétaires. Il faut peut-être les avertir !
Bref ! En fait d'expérimentation, il vaudrait mieux plutôt parler d'opération de communication ! Le "zéro charges" n'est obtenu que par le prix préférentiel du terrain et par l'apport des locaux commerciaux à la copropriété, mais en réalité, ils font partie du prix de vente des appartements ! En d'autres termes, les acquéreurs achètent un logement avec une quote-part de commerce censé leur financer leurs charges, au moins à certaine hauteur... Sans cela le prix d'achat aurait pu être inférieur !
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