L'heure de l'euphorie est passée sur le marché de la construction de logements neufs. Le dernier Stat@Info Logement Construction révèle qu'en 2017, 497.000 logements (en données brutes) ont été autorisés à la construction (permis de construire) et 418.900 logements ont été mis en chantier, soit une augmentation respectivement de 8,2% et 15,7% par rapport à l'année 2016. Mais les chiffres du dernier trimestre sont moins brillants : les autorisations de logements à la construction en données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables fléchissent (-4,8% après +3,7%) par rapport au trimestre précédent. Les logements collectifs (y compris en résidence) sont en net repli (-12,4% après +4,3%) alors que les logements individuels accélèrent de 2,7% à 7,6%, mais sans compenser en nombre. Toujours en données trimestrielles corrigées, les mises en chantier se contractent (-2,9%) après une légère hausse (+0,3%) au 3ème trimestre ; l'individuel et le collectif sont orientés à la baisse, à respectivement -2,3% et -3,4%.
L'enquête trimestrielle dans la promotion immobilière confirme le retournement : en janvier 2018, les promoteurs sont moins nombreux qu'en octobre 2017 à estimer que la demande de logements neufs est forte. Le solde d'opinion correspondant diminue pour le deuxième trimestre consécutif et passe au-dessous de sa moyenne de longue période pour la première fois depuis deux ans. Du coup, les perspectives de mises en chantier se réduisent de nouveau. Dans le détail, le solde sur les logements destinés à la vente diminue de nouveau tout en restant au-dessus de sa normale ; celui sur les logements destinés à la location baisse encore un peu après être passé en octobre au-dessous de son niveau moyen. Dans le même temps, les promoteurs ne sont pas plus nombreux qu'en octobre 2017 à signaler une hausse de leur stock de logements invendus. Le solde correspondant est quasi stable et se situe légèrement au-dessus de sa moyenne de long terme.
La raison pour laquelle le recul de la construction au dernier trimestre ne doit pas être regardé comme un simple "trou d'air" vient du logement social, qui absorbe une part importante de la production, y compris désormais de celle des promoteurs privés. Le nombre d’agréments de logements sociaux est en nette baisse, augurant une diminution importante de la production de logements sociaux à court terme. Dès 2017, le nombre d’agréments est passé de 100.300 logements en 2016 à 92.900, soit un repli de 7.400 logements. Ce repli est notable pour la catégorie de logement social standard, le "PLUS" (-5.100 logements) et pour la catégorie des logements destinés aux populations aux revenus les plus modestes, le "PLAI" (-2.300 logements). Les agréments de logements destinés aux populations aux revenus les moins modestes, mais aussi à certains publics spécifiques comme les étudiants (les PLS) restent à leur niveau de 2016.
La baisse est valable dans la plus grande partie des régions françaises ; en masse elle est particulièrement marquée en Ile de France (-2.500) et en Provence-Alpes-Côte d’Azur (-2.000) où de nombreux ménages rencontrent les plus grandes difficultés à accéder à un logement abordable.
Cette baisse des agréments va se traduire dans les deux ans qui viennent par un repli des constructions et donc de la commande au secteur du bâtiment, puis par une baisse des logements livrés et donc de l’offre de logements HLM alors que la demande reste à un niveau élevé.
Ce repli est à relier d’une part à la réduction des crédits alloués par l’État au Fonds national des aides à la pierre (-96 millions d'euros) au cours de l’été et d’autre part à l’inquiétude soulevée par les baisses de ressources pour les organismes HLM qu’entraîne la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS). Dans la perspective de réduire les aides à la personne de 800 millions euros en 2018 et 2019 et 1.5 milliards en 2020 pour alléger la charge budgétaire de l’Etat, la loi de finances a en effet mis en œuvre une baisse parallèle des APL et des loyers dans le parc HLM, qui si elle ne pénalise pas le pouvoir d’achat des locataires en place, va conduire les organismes à réduire le service rendu et va réduire mécaniquement leur capacité à investir.
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