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abcyz
Contributeur senior
82 réponses |
Posté - 06 août 2008 : 18:59:40
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Pour comprendre le phénomène de baisse des prix dans l'immobilier, il faut d'abord comprendre la hausse.
Commençons par le commencement. A tous ceux qui répètent que l'immobilier ne baisse jamais, je rappelle que ceux qui ont acheté en 91 et vendu en 96 ont perdu de l'argent.
Depuis 1996, les prix montent. Ce fut d'abord une hausse modérée puis l'envolée jusqu'en 2006.
Pourquoi les prix montent-ils ? 1°) Parce qu'ils étaient bas. 2°) Parce que les gens veulent acheter. - envie d'être propriétaire - envie de se constituer un capital 3°) Parce que les gens peuvent acheter - bonne santé économique - accès aisé au crédit immobilier
Comment s'opère la hausse des prix ? Lors qu'un vendeur met son bien immobilier sur le marché, il s'efforce d'en fixer le meilleur prix, c'est-à-dire le prix maximum auquel il peut trouver un acheteur. Il va donc observer le marché des biens comparables au sien en terme de localisation, surface, ancienneté, prestations, etc. (biens "concurrents") Il va également étudier la demande. En période de hausse, l'offre est rare et la demande forte. Le vendeur aura tendance à proposer son bien à un prix supérieur au prix pratiqué sur les biens concurrents ces dernières semaines. Les acquéreurs qui ont peu de choix ne seront pas en position de force et accepteront d'acheter sans négocier le prix, ou avec une négociation faible. Le bien se vendra alors à un prix supérieur au prix pratiqué antérieurement sur les biens concurrents.
En résumé, le mécanisme de hausse nécessite 3 facteurs - les acquéreurs "veulent" acheter - les acquéreurs "peuvent" acheter - l'offre est réduite
En 2006, deux facteurs favorables à la hausse viennent soutenir un marché historiquement haut : - du fait d'une conjoncture internationale favorable, les banques français prêtent facilement à leurs clients. - les taux d'intérêt sont historiquement bas Pour comprendre l'impact des conditions du crédit sur le marché immobilier, prenons l'exemple d'un ménage qui peut mettre 1000 € par mois dans une acquisition immobilière. A 5% sur 20 ans, il aura un budget (frais de notaire inclus et hors apport personnel) de 151 K€ et de presque 210 K€ à 4% sur 30 ans soit près de 40% de hausse !
Comment s'opère le retournement ? A partir de 2006, les prix atteignent leur maximum : les acquéreurs ne peuvent plus acheter. Encore cette situation n'affecte-t-elle que les primo-accédants (ceux qui achètent avec un crédit immobilier). Les autres, ceux qui revendent pour acheter, ne sont impactés que sur le différentiel de prix (différence entre le prix de vente de leur bien et le prix d'acquisition du suivant) En particulier, les vendeurs d'un bien important peuvent trouver un intérêt à une hausse de l'immobilier.
un exemple sera plus clair. Soit un appartement 3P dont le prix hors frais de notaire passe de 200 K€ à 250 K€ sur une période de 3 ans soit une hausse de 25% - au début de la période Mr et Mme Dupont gagnent 3600 €/m, ils peuvent payer cet appartement en 25 ans à 4,5%. Mr et Mme Deschamps vendent un petit appartement 100 K€, ils doivent trouver 114 K€ frais de notaire inclus pour payer la différence. Mr et Mme Dupuis vendent une maison 400 K€, ils encaisseront un différentiel de prix de 186 K€.
- à la fin de la période Mr et Mme Dupont ne peuvent plus payer cet appartement, il est trop cher pour eux. Mr et Mme Deschamps vendent leur appartement 125 K€, ils doivent trouver 142,5 K€ au lieu des 114 K€ soit 28,5 K€ de plus et non 53,5 K€ soit une hausse de 13,3% seulement. Mr et Mme Dupuis vendent leur maison 500 K€, ils encaisseront un différentiel de 232,5 K€. Pour encaisser ce montant trois ans plus tôt, ils auraient dû acheter l'appartement 156,5 K€ soit une baisse de prix de 21,75 %.
C'est pour cela que même lorsque l'immobilier est "trop cher", le nombre de ventes ne chute pas brutalement. Il ne fait que diminuer. Mais comme le nombre de biens immobiliers mis sur le marché chaque mois reste à peu près constant, le nombre de biens à vendre augmente.
En résumé, depuis 2006 - certains acheteurs ne peuvent plus acheter - l'offre est de plus en plus importante
A cela sont venus s'ajouter en 2008 trois facteurs aggravants : - la crise des subprimes aux Etats-Unis a touché les banques françaises qui ne souhaitent plus prêter autant qu'avant. - la remontée des taux du crédit - la crise pétrolière qui touche tous les biens à l'exclusion des centres villes.
Pour finir, les acheteurs-revendeurs perçoivent la difficulté de vendre et deviennent prudents tandis que les banques rechignent à faire des prêts relais.
Tous les voyants sont alors au rouge : - les acquéreurs ne peuvent plus acheter o prix élevés o difficulté d'accès au crédit - les acquéreurs ne veulent plus acheter o difficulté pour revendre o attentisme - l'offre est importante
Avant qu'un krach ne se produise, les vendeurs ont pourtant une stratégie toute simple : baisser les prix par rapport à la concurrence. Les acquéreurs auront le sentiment de "faire une bonne affaire" par rapport aux prix pratiqués. Si le krach se produit; il n'y plus de solution. Les acheteurs étant trop peu nombreux, l'offre devient pléthorique ce qui inquiètent les acquéreurs, les prix baissent, donnant raison à ceux qui ont attendu. Le marché s'effondre, faute de demande.
Cette analyse est une première mouture. J'attends avec plaisir vos commentaires, critiques, corrections et suggestions.
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abcyz |
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a.joseph
Pilier de forums
394 réponses |
Posté - 06 août 2008 : 19:23:48
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Citation : Initialement posté par a.joseph
Exane BNP Paribas évoque trois scénarios assortis d'une probabilité de réalisation :
- un scénario d'atterrissage en douceur (0 à + 5 % par an) dont la probabilité de réalisation est estimée à 40 % ;
- un scénario d'atterrissage brutal (- 10 à - 40 % sur deux ans), du fait d'une hausse du chômage ou des taux d'intérêt, dont la probabilité est estimée à 20 % ;
- un scénario de poursuite de la hausse des prix, encouragée par des taux d'intérêt bas ou des mesures législatives sur l'offre de crédit, dont la probabilité est estimée à 40 %. Ce scénario augmente la probabilité d'atterrissage brutal après 2007.
abcys : Vous n'évoquez pas les mesures que peuvent prendre les pouvoirs politiques pour stabiliser, favoriser ou augmenter le prix de l'immobilier. La baisse des prix peut être passagère du fait de la morosité de la situation économique. Moi je pense qu'il faut attendre au moins le second trimestre 2009 pour tirer une conclusion. Et comme dirait PRADOS il faut bien une consolidation (comme en bourse)
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Scorpion
Pilier de forums
1366 réponses |
Posté - 06 août 2008 : 20:22:48
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Excellente analyse, je dis bravo.
Beaucoup de gens ont acheté car ils ont compris que les prix montraient et qu'ils allaient s'enrichir au passage. Ils ont également acheté car ils ont compris qu'ils pouvaient acheter aujourd'hui ce qu'ils n'auraient plus le moyens d'acheter plus tard. La hausse a nourrie la hausse.
Et c'est exactement les mêmes raisons qui vont nourrir la baisse. Pourquoi acheter 80 m2 aujourd'hui si demain on pourra avoir 100 m2 pour le même prix ? Seulement il y a des divorces, des décès, des mutations, et le marché sera toujours actif.
En ce qui concerne la durée et l'ampleur de la baisse, c'est impossible à prévoir. Il y a tellement d'aspects économiques ET psychologiques qui rentrent en jeu. Enfin pour donner des chiffres, je dirais 35% minimum de baisse sur 5 ans.
Sinon une remarque concernant cette analyse : pas une fois les mots spéculation et psychologies ont été cités |
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abcyz
Contributeur senior
82 réponses |
Posté - 22 août 2008 : 12:59:51
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Merci pour vos remarquesCitation : Initialement posté par a.joseph Exane BNP Paribas évoque trois scénarios assortis d'une probabilité de réalisation : - un scénario de poursuite de la hausse des prix, encouragée par des taux d'intérêt bas ou des mesures législatives sur l'offre de crédit, dont la probabilité est estimée à 40 %. Ce scénario augmente la probabilité d'atterrissage brutal après 2007.
a.joseph L'analyse que vous citez est intéressante puisqu'elle date apparemment d'avant 2007. Je pense que c'est le scenario 3 cité ci-dessus qui s'est réalisé. Pour ma part, je ne crois pas à la possibilité d'un atterrissage en douceur. Celui-ci ne pourrait avoir lieu que s'il y avait grosso modo corrélation entre l'offre et la demande. Or la situation présente est celle d'une offre de plus en plus importante en face d'une demande devenue moins solvable du fait de la remontée des taux. Il devient difficile de vendre. Seuls vendent les vendeurs pressés qui se fichent du prix (ex : héritage, divorce, saisie) mais ils ne sont pas la majorité.
Je n'ai pas évoqué les mesures gouvernementales parce que je pense qu'elles n'affectent pas le marché immobilier, leur influence sur le niveau des prix étant négligeable.
Sorpion Votre remarque est pertinente. Les agents immobiliers connaissent parfaitement l'usage de l'argument "A ce prix, c'est une affaire, vous n'aurez aucun mal à revendre plus cher dans x années." Mais je crois cependant que dans l'ensemble, le marché immobilier n'est pas spéculatif : la plupart des acheteurs cherchent à se loger et ne pensent pas à la revente (contrairement à la bourse, où l'on achète les actions d'une entreprise dans le but principal de les revendre). C'est pourquoi je n'ai pas trop insisté sur cet aspect dans mon analyse, même si je l'évoque quand j'écris "les acheteurs qui ont peu de choix ne seront pas en position de force...". C'est l'effet que vous résumez dans votre formule "La hausse nourrit la hausse." |
abcyz |
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