Convention fibre ARCEP : machine arrière, toute !
retour fibre otpique
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Au travers de nos articles ou formations consacrés à la fibre optique, vous avez compris que le déploiement de cette nouvelle technologie - pourtant essentielle… - est loin d'être "un long fleuve tranquille" et que la prudence s'impose pour éviter déconvenues et difficultés….
En signant une première convention-type 18 mois avant l'ARCEP, en instruisant les dossiers de litiges de ses adhérents et en n'hésitant pas à dénoncer une convention avec un opérateur peu soucieux du respect de ses engagements, l'ARC montre qu'elle est la principale association s'investissant dans la défense des attentes de ses adhérents et, plus généralement, des usagers de la fibre…. Ceci lui a permis de jouer un rôle de premier plan dans l'élaboration de la convention ARCEP, même si elle regretta dès l'origine le formalisme de ce document, de sérieuses lacunes et surtout la part insuffisante faite aux attentes des usagers, autant de reproches résumées dans un document consultable sur la rubrique "fibre optique" de notre site à l'adresse
http://www.unarc.asso.fr/site/fibre...ionARCEP.pdf.
Où en sommes-nous aujourd'hui ?....
Depuis l'automne dernier, l'ARCEP reçoit systématiquement copie de tous nos dossiers de litiges "fibre" afin d'avoir une idée précise de leur nature. De son côté, l'Autorité a organisé un "chat " le 21 décembre 2010, qui confirma les carences et attentes précédemment évoquées par nos soins. Ceci l'amena à organiser une réunion le 2 mars dernier afin d'améliorer le texte existant…
Analyse du projet de convention modifiée dont nous venons de recevoir le texte… très décevant !
I. Une avancée qui n’en est pas une
Nullité pour les opérations de fibrage non effectuées dans les six mois
Situation : c'est LE principal problème actuel, surtout avec des opérateurs comme FREE, pour lequel il constitua le principal motif de dénonciation de la convention signée avec l'ARC. En fait, ces opérateurs jouent sur une ambiguïté du décret n° 2009-54 du 15 janvier 2009 qui stipule que "Les travaux d’installation des lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique dans l’immeuble doivent être achevés dans un délai de six mois à compter de la signature de la convention". Les opérateurs le traduisent à leur avantage en estimant qu'ils respectent le décret du moment qu'ils installent le réseau vertical dans ce délai… Or, la Loi de Modernisation de l'Economie du 4 août 2008 stipule simplement que la convention "fixe aussi la date de fin des travaux d’installation, qui doivent s’achever au plus tard six mois à compter de sa signature", texte ne limitant nullement les travaux d'installation à l'immeuble et dont on présume qu'il concerne également le fibrage horizontal, car à quoi sert un réseau vertical s'il n'est pas relié à un NRO (Nœud de Raccordement Optique) opérationnel ?
Projet ARCEP : le projet prévoit qu'en cas de non exécution des travaux sous six mois, la convention serait résolue de plein droit 15 jours après envoi d'une mise en demeure restée infructueuse. Progrès certes, mais, comme on l’a vu, les opérateurs s'arrangent toujours pour réaliser le fibrage vertical dans ce délai et le véritable problème se situe au niveau du raccordement horizontal….
Or, non seulement le projet n'étend pas ce délai de six mois au raccordement horizontal mais la mention relative au "raccordement des lignes à un réseau de communications électroniques à très haut débit ouvert au public" disparaît purement et simplement… on croit rêver mais l'ARCEP l'a fait !
Proposition ARC : L'ARC demande que ces dispositions s'appliquent dorénavant à un fibrage OPERATIONNEL, c'est-à -dire "fibres allumées", ce qui provoque d'ores et déjà l'opposition de certains opérateurs… n'auraient-ils pas confiance dans leurs capacités de déploiement ?....
II. Pour le reste, machine arrière, toute...
Nullité pour les conventions non accompagnées du procès verbal de l'AG
Situation : l'article 24-2 de la loi du 10 juillet 1965 soumet la signature d'une convention "fibre" à une décision de l'AG et la convention ARCEP rappelle cette obligation en préliminaire en stipulant "dûment autorisé après délibération de l'Assemblée Générale datant du ….". Sauf que, en pratique, un certain nombre de syndics peu scrupuleux n'hésitent pas à signer des conventions sans la moindre décision d'une assemblée générale, ce qui s'appelle une fausse déclaration.
De plus, l'opérateur est également engagé dans cette irrégularité en tant que cosignataire. Certains, comme SFR, ont fait preuve d'éthique en proposant immédiatement d'annuler une convention viciée et de retirer le réseau vertical implanté illégalement. D'autres, comme NUMERICABLE, ont beaucoup moins de scrupules et laissent la copropriété gérer le litige avec son syndic… "chassez le naturel, il revient au galop".
Projet ARCEP : après protestation de l'UNIS, qui s'inquiéta de la charge de travail supplémentaire (vous pensez ! Une ou deux photocopies pour éviter un fibrage illégal) l'ARCEP propose simplement de "tenir à disposition de l'opérateur la résolution extraite du procès verbal d'AG"…. Qui a la naïveté de croire que tous les opérateurs la demanderont systématiquement ? Les abus ont encore de beaux jours devant eux.
Proposition ARC : l'ARC demande que le nouveau texte impose SOUS PEINE DE NULLITE la fourniture d'une copie du procès verbal de l'AG.
III. Modification de la durée de la convention
Situation : nous avons toujours clairement déclaré notre hostilité pour une durée de quinze ans renouvelable par tacite reconduction avec un préavis de douze mois et annonce quinze mois avant échéance, ce qui ne laisse que trois mois pour solliciter l'avis de l'assemblée générale.
Projet ARCEP : Nos interlocuteurs n'ont visiblement pas compris le message et évoquent maintenant - tenez vous bien - une nouvelle durée de convention de 25 ans, en se basant abusivement sur les droits d'usage de la fibre.
De plus, l'allongement de cette durée créerait des "conventions à trois vitesses", avec des conventions "pré ARCEP" sans indication de durée, des conventions ARCEP à 15 ans et une éventuelle convention ARCEP modifiée à 25 ans… vous avez dit cohérence ?
Proposition ARC : l'ARC refuse évidemment cette modification et propose en alternative une convention de 15 ans reconduite par un contrat à durée indéterminée avec des modalités de dénonciation identiques. Formule présentant un double avantage :
Ø analogie avec les contrats de téléphonie mobile proposés par ces mêmes opérateurs,
Ø aucune nécessité de convoquer systématiquement une AG pour reconduire ou résilier une convention, car celle-ci pourrait l'être à tout moment au-delà de la période d'engagement.
Si cette formule ne convient pas à certains opérateurs, elle serait susceptible de recevoir, par contre, l'assentiment d'un d'entre eux et nous continuons la concertation sur ce point.
IV. Une multi fibre a géométrie… très variable.
Rappel :
Ø la multi fibre ne concerne que le fibrage vertical entre le point de mutualisation et l'abonné à ne pas confondre avec le "point-à -point" ou le "point-à -multipoint" qui concerne l'amont du point de mutualisation,
Ø cette multi fibre fut présentée comme le "remède miracle" pour résoudre les problèmes passés de mutualisation, alors que ceux-ci résultaient de l'absence d'accords de mutualisation entre opérateurs,
Ø la multi fibre permet de souscrire des abonnements simultanés avec plusieurs opérateurs - si vous en avez le courage - ou, beaucoup plus intéressant, de coordonner les dates de passage entre deux opérateurs de façon à n'avoir aucune coupure de service, inévitable avec la mono fibre.
Situation : selon les textes actuels, tout opérateur signant une convention doit informer ses concurrents et leur proposer de co-investir dans des fibres supplémentaires. Pas de réponse et la copropriété reste en mono fibre - ce qui risque d'être le cas pour les petites copropriétés -, dans le cas contraire, fibrage en multi fibre (quadri fibre normalement).
Pour "corser" le tout, le choix se fait aussi selon les communes. Ainsi, la quadri fibre serait la règle à Paris mais, passé le périphérique, vous pouvez fort bien être relié en mono fibre si votre résidence n'attire pas les opérateurs….
Enfin, s'agissant du futur fibrage des zones moins denses, la mono fibre serait la règle.
Nous gardons le meilleur (sic) pour la fin : FREE - jadis grand défenseur de la multi fibre et qui fibrait alors systématiquement en bi fibre - affirma lors de cette réunion qu'il fibrait dorénavant en mono fibre si les conditions en décidaient ainsi…. Machines arrière, toute !
Proposition ARC : là encore, nous soutenons le même argument que dans le passé : la bi fibre est la solution tout à la fois nécessaire et suffisante et nous vous engageons à négocier fermement ce point avant toute signature de convention….
V. Droit d'accès à la boucle locale fibre ou comment contourner l'obligation de gratuité
Situation : l'article 1 du décret du 15 janvier 2009 stipule que "L’installation, l’entretien, le remplacement et le cas échéant la gestion des lignes se font aux frais de l’opérateur signataire de la convention."
Les opérateurs ne pouvant donc facturer les opérations de fibrage, certains d'entre eux tentent de contourner cette obligation en instaurant un "droit d'accès à la boucle locale fibre" dans les abonnements "triple play" : 3 € / mois pour SFR et même 5,99 € / mois pour l'offre "Révolution" de FREE… qui a tout compris. De plus, ils tentent de le faire passer inaperçu au milieu des révisions tarifaires dues à la hausse de TVA.
Si ce droit d'accès était justifiable lors des opérations de dégroupage en raison du coût d'accès à la boucle locale cuivre de France Télécom, il n'a plus la moindre justification pour la fibre optique… surtout quand l'opérateur qui vous l'impose dans son abonnement "triple play" est le même qui fibre votre immeuble.
Proposition ARC : nous n'hésitons pas à dire qu'il s'agit d'un contournement de fait du décret ci-dessus évoqué. Nous vous conseillons donc de refuser cette situation inadmissible et tout abonnement Très Haut Débit Fibre surtaxé, surtout si l'augmentation de débit ne vous apporte aucun avantage pratique par rapport à votre abonnement ADSL, dont le débit est généralement bon en zone urbaine dense (13 à 20 Mbits…).
A titre de conclusion très provisoire
En guise de conclusion de cette réunion du 2 mars, l'ARC a bien rappelé aux différents acteurs qu'ils peuvent fort bien tenter d'imposer des clauses contraignantes pour les usagers ou refuser de prendre en compte leurs attentes, mais qu'ils n'oublient pas deux réalités intangibles :
Ø que les représentants des copropriétés sont souvent des seniors qui ne veulent pas céder aux "sirènes" des nouveautés technologiques si celles-ci leurs apportent plus de difficultés que d'avantages tangibles,
Ø que les usagers sont leurs clients, qu'ils sont les décideurs finaux, et, qu'à ce titre, ce sont eux qui conditionneront l'évolution, le succès ou l'échec du programme fibre….
Au moment où 10% seulement - nous disons bien 10%... - des usagers éligibles à la fibre ont souscrit un abonnement Très Haut Débit, les opérateurs seraient bien inspirés de tenir compte de cet avertissement et de se préoccuper un peu mieux de leurs attentes.
C'est en rappelant ces réalités que notre Président Fernand CHAMPAVIER a signifié à l'ARCEP le 9 mars dernier que l'ARC refuse désormais de s'associer à une convention type qui, non seulement ne prend pas en compte vos attentes légitimes mais, sur certains points (délai de fibrage opérationnel, durée de convention…), constitue un véritable retour en arrière….
Forte de son expérience, l'ARC travaille d'ores et déjà sur un nouveau texte de convention type qu'elle proposera aux opérateurs soucieux des attentes de leurs clients.
Au moment où nombre d'entre vous devront décider sur des projets de convention fibre, nos conseils restent les mêmes :
Ø rejeter toute convention qui ne répondrait pas aux exigences mentionnées dans notre document type et dans le présent document et ne pas hésiter à faire jouer la concurrence,
Ø si cette concurrence ne joue pas, différez votre décision en attendant que notre nouvelle convention type recueille l'agrément d'au moins un opérateur.
Compte tenu de l'enjeu national que constitue le plan fibre, nous espérons que le Ministre de tutelle rappellera à la raison les acteurs concernés mais, d'ici là et plus que jamais, la prudence s'impose