Un nombre croissant d'études alerte depuis quelque temps le grand public et les autorités sanitaires sur la pollution de l'air intérieur des logements, qui n'a apparemment rien à envier à celle de l'air des villes les polluées ! La revue Que Choisir (1) met en avant une étude de l'INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques), établissement public placé sous la tutelle du ministère de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire, qui montre que les pesticides (insecticides, fongicides, herbicides) sont présents, en masse, même en ville, en plus des substances toxiques déjà connues comme celles émanant de produits d'entretien, de matériaux de construction ou encore de certains meubles.
31 insecticides, fongicides et herbicides ont été recherchés dans 450 prélèvements (air, poussières de sol, résidus de peau et urine) effectués au domicile de 130 enfants vivant en Île-de-France. Résultat : 94 % des logements contiennent au moins un pesticide. Le lindane est le plus présent : 88 % des logements examinés en recèlent, alors que cet insecticide puissant longtemps utilisé dans les produits de traitement antiparasitaire des charpentes et dans les shampoings antipoux est interdit depuis plusieurs années, car potentiellement cancérogène ou perturbateur endocrinien !
Selon l'INERIS, les pesticides peuvent pénétrer dans les maisons et les appartements de diverses manières : portés par le vent après avoir été répandus dans des champs, des jardins ou sur des arbres situés à proximité du logement, diffusés par les occupants eux-mêmes (utilisation d'insecticides sur les plantes d'intérieur, par exemple), ou par le biais de traitement des charpentes employés par des professionnels, etc. Ainsi, l'étude de l'Ineris montre que les habitants des logements dans lesquels se trouvent des plantes d'intérieur (et donc plus à même d'utiliser des produits chimiques pour les entretenir) sont plus susceptibles que les autres de garder des résidus d'insecticides sur la peau. Les chercheurs ont par ailleurs trouvé dans les urines de 70 % des enfants au moins un dialkylphosphate, une substance souvent associée à l'utilisation de traitement antitermite.
Le problème est d'autant plus inquiétant que, comme le précise l'Ineris, chaque Français passe en moyenne 22 heures sur 24 dans des espaces clos (maison, bureau, école, etc.) et que, si les effets à plus ou moins long terme de ces substances sur la santé sont encore mal connus, leur toxicité est avérée. L'Ineris demande donc une évaluation plus approfondie des expositions à certains pesticides.
L'UFC (union fédérale des consommateurs, éditeur de la revue Que Choisir) a dénoncé à plusieurs reprises la présence dans les logements d'autres substances toxiques, comme le formaldéhyde, une substance classée cancérogène pour les muqueuses nasales et respiratoires et particulièrement irritante et allergène, utilisée notamment dans les moquettes, les papiers peints, les tissus et les bois agglomérés. C'est également le cas des éthers de glycols séries E et P, présents dans de nombreux produits de consommation courante (cosmétiques, produits d'entretien, peintures) mis en cause en raison de leur toxicité sur la fertilité, les malformations foetales et la toxicité sanguine et rénale. Ou encore les composés organiques volatils (Cov) qui, bien qu'irritants, allergènes et parfois cancérogènes, sont utilisés dans des matériaux de construction, des produits d'entretien et autres désodorisants et parfums d'ambiance...
(1) Que Choisir, mardi 13 mai 2008 - n°259
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