Un projet de loi "portant nouvelle organisation du marché de l’électricité" (loi "Nome") va bientôt être discuté au parlement et déjà il crée pas mal de remous : il doit en effet permettre le développement de la concurrence grâce à la mise à disposition par EDF d'électricité d'origine nucléaire aux autres fournisseurs, mais les modalités restent à trancher, à commencer par le prix auquel l'opérateur historique cédera cette électricité à ses rivaux, qui sera fixé par des décrets d'application qui devraient être publiés cet automne.
Les concurrents d'EDF considèrent que ce prix ne doit pas dépasser les 35 euros le mégawattheure, sous peine que leur offre ne soit pas compétitive. Or EDF s'est battu au cours des dernières semaines pour faire valoir auprès des pouvoirs publics que cet accès régulé à la production nucléaire ne devait pas se faire à un coût comptable mais bien à un coût économique, c'est-à-dire en couvrant les coûts complets de la filière, dont les dépenses liées à la maintenance ainsi que les investissements liés au prolongement des centrales actuelles. Conclusion : EDF ne veut pas descendre en dessous de 42 euros.
Le président d'EDF a défendu ce prix devant les députés de la commission des affaires économiques : à raison d'un investissement proche de 600 millions d'euros par réacteur sur les vingt années qui viennent, cela représente une somme atteignant presque 35 milliards d'euros. Pour y faire face, l'entreprise serait en droit de réclamer 45 euros par mégawattheure, prix par rapport auquel il a indiqué qu'EDF était prêt à faire un effort...
Les estimations réalisées par la CRE (Commission de régulation de l'énergie) diffèrent sensiblement : la CRE considère que le coût actuel de l'électricité de base d'origine nucléaire s'élève à 30,90 euros par MWh. En intégrant les éléments prévus par la loi Nome, la CRE fixe ce prix à 37,20 euros par MWh. Une augmentation sensible donc, mais loin des 42 euros réclamés par EDF.
Parallèlement, la CRE a calculé l'augmentation des tarifs induite par la nouvelle loi, pour les entreprises comme pour les particuliers. En effet, EDF vend aujourd'hui son électricité en grande partie nucléaire en moyenne à 34 euros par MWh -tarif que le nouveau président juge évidemment insuffisant, au demeurant comme l'ancien qui officiellement a perdu son poste pour l'avoir dit -, alors que les fournisseurs alternatifs, qui n'y ont pas accès, doivent acheter la leur à des producteurs au fioul ou au charbon plutôt vers 50 euros. Grâce à l'ouverture à la concurrence, EDF alignerait son tarif réglementé sur celui de vente à ses concurrents. Pour les clients résidentiels, un coût de cession de 37,20 euros par MWh impliquerait selon la CRE une majoration de 7,1% des tarifs réglementés en 2011, puis de 3,1% par an entre 2011 et 2025. Au prix de 42 euros réclamé par EDF, les hausses de tarifs seraient de 11,4% en 2011, puis de 3,5% par an entre 2011 et 2025. Ces chiffres, contestés cependant par EDF, conduiraient au paradoxe qu'un dispositif permettant de stimuler la concurrence pourrait aboutir à une augmentation des tarifs payés par les consommateurs....
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