Dans un contexte de pénurie chronique de logements pour étudiants en résidences universitaires ou en foyers, et de loyers prohibitifs dans le parc immobilier privé des villes où les établissements d'enseignement supérieur se concentrent, la colocation est solution tentante, délicate mais avantageuse. A condition de trouver des bailleurs qui acceptent les risques réels ou supposés encourus avec un groupe de jeunes potentiellement plus turbulents ou fêtards, et moins respectueux de leur logement qu'un bon couple plus sage avec enfants... Si le bien fondé de ces craintes est à vérifier, c'est un fait, et les administrateurs de biens en témoignent quotidiennement.
C'est d'autant plus dommage que la colocation présente un indéniable avantage économique - l'observatoire CLAMEUR des loyers chiffre à 50% l'économie réalisée lorsqu'on s'installa à 3 dans un 3 pièces au lieu d'1 par studio ! - et qu'elle est plébiscitée par les étudiants, et pas forcément pour les raisons qu'on croit.
Un sondage TNS Sofres réalisé pour BNP Paribas (1) révèle l'ampleur du pessimisme ambiant quant à la difficulté de se loger - 82% des 16/25 ans considèrent que c'est aujourd'hui "difficile", 22% le jugent "très difficile" et 58% trouvent qu'il est moins facile de se loger qu'il y a 10 ans et que ce sera encore moins facile dans 10 ans -, comme quant à celle d'assumer le loyer (pour près de 7 sur 10).
Du coup, la colocation est une solution alternative envisagée avec réalisme et pragmatisme : elle répond avant tout à une nécessité matérielle, économique (une nécessité pour 71% contre un choix pour 29%). Vivre en colocation, c'est l'occasion de vivre mieux pour moins cher ! Trois sur quatre citent la possibilité de faire des économies comme une des deux principales raisons pour vivre en colocation. L'envie de ne pas être seul n'est citée que par 1 tiers seulement d'entre eux.
Ils sont réalistes aussi pour la vie au quotidien. Le respect par chacun des colocataires de ses engagements financiers comme des règles et du cadre de vie commun, doivent primer sur les dimensions humaines et festives : que chacun paye ses factures à l'heure est pour eux le principal "secret d'une colocation réussie", cité comme "indispensable" pour 78%. Viennent ensuite le respect des autres (on n'utilise pas les affaires des autres : indispensable pour 58%, chacun range ce qu'il dérange dans les pièces communes pour 57%) et quelques règles de bon voisinage et de vie commune acceptées par tous (pour 50%). Dans le même esprit, s'ajoute un nécessaire respect du cadre et des règles fixées, principale qualité du "colocataire idéal" pour 41% des jeunes interrogés.
Les premiers temps de la colocation sont difficiles, notamment trouver un propriétaire qui accepte de "co-louer" à des jeunes (difficile pour 69%) et trouver le "bon" colocataire (difficile pour 68%)... Mais à l'expérience, les charmes de la colocation se dévoilent et les colocataires s'en font des ambassadeurs quasi unanimes. Ils gardent au final de très bons souvenirs : la colocation est vue comme une bonne expérience par 76%, comme un bon moyen de faire de belles rencontres pour 62%, et près de 8 sur 10 (83%) sont prêts à recommander la colocation (30% certainement)...
Peu de chiffres ont été produits à ce jour pour quantifier son ampleur réelle, mais elle est loin l'être en proportion de son succès médiatique. L'ANIL (association nationale pour l'information sur le logement) a tenté une estimation, à 160.000 pour le nombre de ces logements et à 370.000 pour les colocataires qui les partagent, en général étudiants et jeunes actifs. Le sondage cité révèle que 73% des 16-25 ans connaissent quelqu'un au sein de leur entourage qui vit ou a vécu en colocation, que 9% déclarent vivre actuellement en colocation, et que la vie en colocation dure en moyenne 11 mois. Le plus souvent, les jeunes s'installent avec des proches plutôt qu'avec des inconnus : amis proches ou amis d'amis (62%) ou membres de la famille (12%).
(1) Etude réalisée online pour BNP Paribas du 16 au 20 avril 2010 auprès d'un échantillon de 809 personnes, représentatif de la population française âgée de 16 à 25 ans. Méthode des quotas.
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