C'est ce qui ressortait le 26 janvier des chiffres de l'Observatoire CSA/Crédit Logement du financement des marchés résidentiels, réalisé avec le concours de l'OFL (Observatoire du financement du logement, opéré par l'institut CSA sous la direction scientifique du professeur Michel Mouillart. Déduisant l'activité du marché immobilier par l'observation des crédits immobiliers (l'essentiel des transactions comporte au moins un financement partiel), le montant des crédits distribués en 2010 montre que les effets de la crise ne sont pas loin d'être effacés : près de 160 milliards d'eurosde crédits ont été accordés, à comparer au plus haut atteint en 2007 de 170 milliards.
Singulièrement au 4ème trimestre il a été observé une véritable accélération : celle-ci, qualifiée de "spectaculaire" par Crédit Logement, organisme de caution qui garantit un bon tiers des prêts immobiliers, est attribuée :
- pour le neuf à l'annonce à partir de 2011 de conditions moins favorables pour le "Scellier",
- pour les primo-accédants au souhait de profiter du cumul de l'ancien prêt à taux zéro (PTZ) et du crédit d'impôt au titre des intérêts d'emprunt, tous deux remplacés à compter de 2011 par le "PTZ+", souvent moins favorable (90.000 "anciens PTZ" ont été délivrés au 4ème trimestre 2010 contre 60.000 au même trimestre un an avant...),
- et pour les autres accédants au souhait de profiter du crédit d'impôt avant sa suppression.
L'effet d'anticipation est estimé à 7,5 milliards dans ce chiffre de la production réalisée en 2010, qui manqueront bien entendu dans celle de 2011...
D'où la prévision d'un "trou d'air" au premier semestre, amplifié probablement par un démarrage lent du PTZ+ dû à l'impréparation des banques, mais pas suffisant cependant, en l'absence d'autre accident comme une remontée brutale des taux d'intérêts - peu probable - pour casser le marché et le mouvement de fond de la hausse des prix.
Autre caractéristique de la fin d'année 2010 : le redémarrage du marché de l'achat-revente, et le retour en conséquence sur le marché de catégories plus aisées (les "CSP+", cadres et professions libérales, et en revenu les plus de 5 SMIC), et relativement plus âgées, tirant vers le haut le montant moyen des opérations réalisées et le montant moyen de l'apport personnel.
Les taux d'intérêt ont fini l'année à 3,31% en moyenne, en légère remontée par rapport à un point bas atteint de 3,27%. Il est probable que ces niveaux ne seront plus atteints avant longtemps, la tendance étant à la remontée, mais celle-ci dépendra de la capacité des banques à se financer et de l'effet du resserrement des conditions de fonds propres minimaux qui leur seront imposées en 2001 comme suite à la négociation internationale dite "Bâle III". Selon le professeur Mouillart, une hausse modérée sera sans effet sur le niveau des prix, le marché étant encore capable de les absorber grâce aux "secondo-accédants", qui ont réalisé de belles plus-values. A noter que la durée des crédits s'est maintenue relativement stable, laissant aux acquéreurs le plein bénéfice de la baisse des taux d'intérêt.
Tout ceci se passe cependant dans un contexte où les revenus moyens augmentent modérément, et en tous cas moins que les prix de l'immobilier, ce qui entraîne une augmentation continue du coût relatif des opérations réalisées, exprimé en années de revenus (4,59 années dans le neuf, soit plus qu'en 2007, et 4,64 années dans l'ancien, soit un peu moins qu'en 2007), et une baisse concomitante du ratio de solvabilité des acquéreurs. Mais cela reste "tenable", le niveau des prix des logements après correction de la progression moyenne des revenus et des conditions de crédit étant resté proche de ce qu'il était il y a 10 ans, et même de 30% inférieur à ce qu'il était en 1990, juste avant la précédente crise...
Ce qui fait dire à Michel Mouillart que, quoiqu'on puisse penser du marché de l'immobilier, et notamment qu'il produit de la ségrégation et de l'exclusion, il est loin de son point de rupture, et qu'il y a encore suffisamment de catégories d'acquéreurs capables de faire face à une poursuite de la hausse !
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