C'est ce qui ressort d'un sondage réalisé par le Conseil régional d'Ile-de-France (1) : le logement constitue un problème majeur pour tous les habitants de la région mais plus particulièrement pour les jeunes.
Certes, trouver un logement – et le garder - est, pour une écrasante majorité de Franciliens, le gros point noir de la vie quotidienne dans leur région. Ils sont 89% à estimer "élevé" le prix des logements à la location là où ils vivent, et 58% à l'estimer "très élevé". Ce taux est même de 71% pour les Parisiens et 74% pour les habitants des Hauts-de-Seine, alors qu'il n'est que de de 44% en Seine-Saint-Denis et 46% dans le Val-de-Marne.
La limite tolérable avancée par les Franciliens interrogés, pour les trois quarts d'entre eux, serait de ne consacrer pas plus de 30% de leur budget à leur maison ou appartement. Ce qui est assez proche de la part moyenne des dépenses mensuelles que les Français consacraient en 2010 sur leur budget au logement selon l'INSEE (27%).
Mais une tranche de la population, celle des jeunes, rencontre davantage de difficultés pour se loger convenablement : pour 87% des sondés de moins de 30 ans, trouver un toit s'apparente à un parcours du combattant, dont les principaux obstacles cités sont le prix des logements (71%), les garanties demandées par les propriétaires (58%) mais aussi la rareté des logements, autrement dit leur pénurie et leur mauvaise répartition sur le territoire (31%).
Pour 37% des sondés, il faudrait proposer davantage de résidences étudiantes ou de foyers de jeunes travailleurs. Des logements dédiés qui, pour 82% des personnes interrogées n'existent pas en nombre suffisant dans la région. Ils sont nettement moins nombreux à proposer davantage d'aide à la location dans le parc privé (29%) ou à la colocation (29%). Pourtant, ils sont 78% (et 88% des 18-24 ans) à penser que le partage d'un appartement est une bonne solution face à la crise du logement des jeunes.
Les jeunes Franciliens sont confrontés à une difficulté supplémentaire : des pratiques discriminatoires dans leur accès au logement qui, pour 73% du panel, sont choses "courantes". Les principaux freins à la location à des jeunes sont la faiblesse des revenus pour 50% des sondés, et le risque perçu par les propriétaires de dégradation du logement (43%).
Pour inciter les propriétaires à louer plus facilement à des jeunes, 70% proposent spontanément la mise en place de davantage de garanties aux propriétaires.
Quand ils le sont ou s'ils étaient propriétaires, 86% des sondés sont prêts à louer leur appartement à un jeune, "si, en contrepartie d'un loyer modéré, une association assurait la recherche du locataire, la gestion locative et garantissait les impayés de loyers". Ce type de solutions existent et ne semblent donc pas être connues. Autre possibilité (29% des réponses) : donner des avantages financiers et fiscaux aux propriétaires pour les inciter. En attendant, seuls 36% des sondés se disent prêts "sans problème" à louer à un jeune s'ils étaient propriétaires.
Pour ce qui est de savoir vers qui se tourner pour combattre la crise du logement, le sondage révèle que les acteurs considérés "de confiance" sont d'abord les associations de lutte contre le mal-logement (28%) devant la commune, et le Conseil régional (18%). Interrogés sur la proposition de ce dernier d'attribuer 5% des logements qu'elle subventionne à des locataires de moins de 30 ans est par contre accueillie de façon très favorable (82%) par les Franciliens interrogés.
Ils sont en outre une très grande majorité (86%) à se dire en faveur de la création d'une autorité régionale unique réunissant tous les partenaires – publics, associatifs et privés - pour mettre en commun leurs moyens d'action face à la crise du logement. Une possibilité qui est actuellement étudiée par la Région.
Les entreprises franciliennes s'inquiètent aussi de plus en plus de la situation. La Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP), dans un rapport intitulé "Des logements pour les salariés en Ile-de-France", fait de la résolution de la pénurie un "impératif de compétitivité pour la métropole". La gêne créée aux entreprises est multiforme : difficultés à recruter, turn-over important, stress, et retards des salariés dus à un allongement des trajets domicile-travail... "Les conséquences économiques sont d'ores et déjà préoccupantes pour la région Capitale, en termes d'attractivité et de compétitivité", indique le rapport. La CCIP a constaté trois caractéristiques majeures illustrant cette crise du logement en Ile-de-France : un rapport de 3,2 logements pour 1 000 habitants contre 5,3 en moyenne au niveau national, une crise frappant aussi bien le logement social qu'intermédiaire, "les deux étant liés puisque les salariés aux revenus moyens ne peuvent ni prétendre à un logement social, ni payer les prix du marché libre", et une sortie de crise envisageable à la seule condition d'une modification des "règles du jeu sur le foncier".
La CCIP place ses espérances dans le "Grand Paris", qui a fixé un objectif de production de 70.000 logements par an en Ile-de-France. "Face aux difficultés que rencontre la classe moyenne des salariés franciliens pour se loger, face aux répercussions que nous constatons sur les entreprises, notamment en termes de compétitivité, il est indispensable de repenser la politique du logement dans sa dimension métropolitaine et de créer une nouvelle gouvernance stratégique et opérationnelle unifiée à cette échelle", souligne Pierre-Antoine Gailly, président de la CCIP. Au même titre que le quota de logements sociaux de la loi SRU, la CCIP préconise la mise en place de quotas de logements intermédiaires dans les documents d'urbanisme et de programmation, ainsi que le retour des investisseurs institutionnels via de nouvelles modalités de financement. Elle préconise également de "desserrer les contraintes en matière de constructibilité en tenant compte du contexte francilien » et de « lever les freins pesants sur le foncier en concentrant les aides sur les zones tendues, notamment en Ile-de-France".
(1) Sondage réalisé par Viavoice pour le journal Ile-de-France, du 17 au 21 octobre 2011, sur un échantillon de 1001 personnes, représentatif de la population francilienne de 18 ans et plus.
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