Un rapport de la Cour des comptes publié le 17 juillet fait le bilan d'application de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003, qui avait l'ambition en refondant la "politique de la ville" de réduire significativement les écarts de développement pénalisant les quartiers prioritaires. Un engagement fondé sur un choix prioritaire : celui de la rénovation du cadre de vie, concrétisé par le programme national de rénovation urbaine (PNRU), mettant en oeuvre plus de 40 milliards d'euros d'investissements sous l'égide de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) créée pour l'occasion (prévus d'être financés par les collectivités territoriales pour 10 milliards, l'Etat relayé par le "1% Logement" pour 12 milliards, les bailleurs sociaux pour 18 milliards).
Le résultat 10 ans après est jugé décevant par la Cour des Comptes : les inégalités persistent entre quartiers, et pire : en matière d'emploi, les écarts se sont même accrus ! En cause une politique insuffisamment pilotée, tant à l'échelon interministériel, que local : sur le terrain, les préfets n'ont pas pu jouer un véritable rôle d'animation, la répartition des rôles entre les collectivités locales est trop imprécise, et les intercommunalités, qui pourtant serait un échelon de mise en œuvre pertinent, n'ont pas encore trouvé leur place dans le dispositif.
Autres critiques : l'effort de rénovation urbaine est mal articulé avec le volet social de la politique de la ville, la mobilisation des politiques publiques dans les quartiers est faible, et la répartition des moyens spécifiques de la politique de la ville n'est pas satisfaisante. Les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) mis en place à partir de 2006 ne sont pas selon la Cour le cadre territorial cohérent de la politique de la ville pour lequel ils ont été créés...
La Cour des comptes juge également que "la géographie prioritaire retenue est trop complexe et la dilution des interventions trop importante sur un trop grand nombre de zones ont pénalisé le dispositif". Même le PNRU, la vitrine de la politique de la ville des deux derniers quinquennats, patine : même s'il faut tenir compte de ce qu'il ne s'achève qu'en 2014, la Cour juge néanmoins que ses objectifs quantitatifs ne sont pas atteints : seules 53% des démolitions prévues sont réalisées, et seulement 30% de l'offre est reconstituée ; également, seuls 39% des logements prévus sont réhabilités. Par ailleurs, la Cour des comptes juge la diversification de l'offre insuffisante.
Quant au coût, même mobilisés en totalité (il reste encore 6 milliards à trouver), les fonds prévus ne permettront pas l'achèvement de tous les projets programmés dans les conventions, note la Cour des comptes, qui parle de décalage entre les objectifs initiaux et les moyens financiers disponibles.
Les recommandations redessinent en creux les critiques formulées : engager rapidement la réforme de la géographie prioritaire, concentrer l'effort sur les zones les plus en difficultés et harmoniser les zonages légaux et contractuels, soutenir l'action administrative interministérielle, renforcer le rôle de l'Etat local en regroupant, dans les territoires prioritaires, l'ensemble des personnels et des moyens de la politique de la ville sous la responsabilité des préfets, mobiliser les intercommunalités, réformer les modalités d'évaluation des actions, établir un bilan précis des engagements du PNRU, mieux prendre en compte les objectifs sociaux dans des contrats uniques de la politique de la ville, poursuivre le rapprochement de l'ANRU et de l'ACSE (Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances), et poursuivre le rééquilibrage territorial des crédits spécifiques de la politique de la ville dans les 6 départements les plus difficiles (Bouches-du-Rhône, Essonne, Nord, Rhône, Seine-Saint-Denis, Val d'Oise)...
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