La construction de logements neufs est au plus bas : les promoteurs, avec un "Scellier" en version très réduite et qui en tout état de cause s'arrête au 31 décembre, et des primo-accédants à la peine, ne vendront pas plus de 70.000 logements (contre 110.000 avant la crise) et globalement, si on ajoute les maisons individuelles et le logement social, les mises en chantier ne dépasseront pas 340.000contre 420.000 au plus haut, et loin des 500.000 que constitue l'objectif du gouvernement. Dès lors ce dernier se doit de mobiliser large et donc ne pas négliger les investisseurs privés, auprès de qui les promoteurs ont écoulé jusqu'à 65.000 logements dans les bonnes années du "Robien" et du "Scellier", malheureusement pas toujours là où il le fallait et de la meilleure qualité au meilleur coût. En tous cas pas dans le créneau du "logement accessible".
C'est ce que la ministre du logement veut corriger en préparant un nouveau régime de défiscalisation pour 2013 et les années suivantes, un "Duflot" comme l'ont déjà baptisé les professionnels pour remplacer le "Scellier" !
Il vise clairement l'achat de logements intermédiaires, qui seraient mis sur le marché à des prix accessibles et dans des zones "tendues", où il y a manifestement des besoins de logement. Il sera plus incitatif fiscalement mais, en contrepartie, il comportera des exigences sociales renforcées. Le taux de réduction d'impôt sera compris entre 17 et 20% de l'investissement, ce qui est supérieur aux taux actuellement en vigueur pour le Scellier classique (13% sur 9 ans) et pour le Scellier intermédiaire (17% sur 12 ans et 21% sur 15 ans). Un bonus est envisagé pour les bâtiments à très haute performance énergétique. La réduction d'impôt s'étalera entre 9 et 12 ans. L'investissement ne devra pas dépasser 300.000 euros. D'une façon générale, le nouveau dispositif fera partie des niches qui passeront sous le plafond global de 10.000 euros.
Les loyers seront plafonnés et devront être inférieurs de 20% aux loyers du marché. Dans un premier temps, les loyers de référence seront déterminés par les services de l'État, le temps que les "observatoires des loyers prévus dans le cadre de la mise en oeuvre de la politique globale d'encadrement des loyers soient opérationnels, agglomération par agglomération. Dans un entretien au Figaro, Cécile Duflot a d'ores et déjà annoncé que les zones concernées seront moins nombreuses que dans le zonage utilisé dans le Scellier, afin de concentrer l'incitation là où sont les besoins. Dans une intervention au congrès de la FPI (Fédération des promoteurs immobiliers) le 19 septembre, elle a précisé que les préfets pourront moduler les loyers et ouvrir le zonage aux communes où des besoins sont avérés pour mieux s’adapter aux contextes locaux. Par ailleurs, les plafonds de ressources des locataires seront baissés par rapport à ceux du dispositif Scellier intermédiaire, pour concentrer le nouveau dispositif sur les classes modestes et moyennes, notamment pour ceux qui se situent juste au-dessus des plafonds donnant accès au logement social.
"Nous visons la construction de 40.000 logements l'année prochaine", a-t-elle déclaré prudemment, suggérant que le dispositif Scellier ne devrait permettre d'en construire que 30.000 cette année ; elle omet de dire qu'il n'est plus que l'ombre de lui-même par rapport à la version d'origine, nettement plus attractive. Mais même à ce niveau modeste, il n'est pas sûr que l'objectif soit atteint, à moins que les promoteurs se surpassent pour concevoir des produits spécialement adaptés et à la rentabilité réellement attractive...
Par ailleurs la ministre a dévoilé les autres projets dans les cartons pour la le budget 2013 : parmi eux un relèvement du barème de la taxe sur les logements vacants et une extension du domaine d'application à toutes les agglomérations de plus de 50.000 habitants en situation de tension, alors qu'actuellement elle se limite aux agglomérations de plus de 200.000 habitants. "Nous allons nous inspirer de l'exemple de Lyon, où la mise en place de la taxe a été couronnée de succès et a permis de remettre des logements sur le marché", a-t-elle notamment commenté. Elle a aussi indiqué essayer de comprendre pourquoi "d'un côté, il y a trois millions de mètres carrés de bureaux vides en Ile-de-France et, de l'autre, un déficit de centaines de milliers de logements". Un dialogue est engagé avec les bailleurs sociaux pour comprendre pourquoi les propriétaires ne veulent pas leur vendre leurs immeubles de bureaux, mais il n'est pas question pour le moment d'une taxation spécifique des bureaux inutilisés...
Autre réflexion en cours : le rétablissement du prêt à taux zéro (le "PTZ+") pour les achats dans l'ancien. "Nous y pensons, mais le débat n'est pas tranché. Peut-être que nous pourrions lier son obtention au fait que l'acquéreur fasse des travaux d'isolation en entrant dans les lieux", a-t-elle précisé. En attendant le PTZ+ dans le neuf sera "recentré sur les ménages des classes moyennes et modestes qui en ont réellement besoin, et son efficacité sera améliorée via un accroissement des différés d’amortissement", a-t-elle ajouté.
Quant aux mesures propres à faire revenir les institutionnels dans le logement qu'ils ont quitté en masse, peu de précisions nouvelles. La ministre semble mettre la sourdine sur ce qui est envisagé en matière de limitation ou encadrement renforcé des "ventes à la découpe", projets qui risquent d'être contre-productifs par rapport à cet objectif...
Sans doute la rentabilité de l'investissement dans le résidentiel est à améliorer, par une meilleure maîtrise du coût du foncier mais aussi de celui de la construction : "des travaux menés par mes services sont actuellement en cours pour identifier et mesurer quelles pourraient être les économies de coût de construction de logements que rendrait possible une adaptation des exigences réglementaires techniques", a précisé la ministre. Et d'en appeler à l'innovation, tout en évoquant des ajustements réglementaires pour contrer "le développement des recours quasi-systématiques pour retarder, voire annuler des projets de construction"...
Enfin, concernant l'ISF il est confirmé un retour à l'ancien barème avant la réforme appliquée en 2012 : les taux d'imposition progressifs iraient à nouveau 0,55% à 1,8%, selon les différentes tranches de patrimoine. Mais le seuil d'entrée à l'ISF resterait de 1,3 million d'euros. Et pour éviter le caractère confiscatoire que ne manquerait pas de reprocher le Conseil constitutionnel, l'impôt serait plafonné à 80% ou de 85% du revenu du contribuable. Mais la ristourne obtenue grâce au plafond devrait elle-même être plafonnée...
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