Alors que la révision des valeurs locatives des locaux professionnels est à présent sur les rails, le gouvernement, par la voix de Bernard Cazeneuve, ministre du budget, et Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée à la décentralisation, lors d'une rencontre avec les associations d'élus et les responsables des commissions des finances du Parlement, amorce celle des biens résidentiels, qui détermine la taxe foncière et la taxe d'habitation payée par les ménages. C'est un vieux serpent de mer auquel un gouvernement devra tôt ou tard s'atteler.
Rappelons que les valeurs locatives cadastrales servant de base au calcul des impôts locaux sont déterminées en fonction de valeurs fixées en 1970 pour la taxe d'habitation et le foncier bâti ; si des actualisations sont intervenues en 1980 pour l'ensemble des propriétés, elles demeurent très insuffisantes et depuis, aucune nouvelle réactualisation n'a pu voir le jour !
Une loi du 30 juillet 1990 a bien posé le principe d'une révision générale des évaluations cadastrales, mais elle a renvoyé courageusement à une loi ultérieure le soin de déterminer la date d'incorporation des résultats dans les rôles de cette révision ainsi que, le cas échéant, les modalités selon lesquelles ses effets pour les contribuables seraient étalés dans le temps...
Même chose pour le gouvernement Fillon : une lettre de mission adressée le 30 juillet 2007 par le président de la République et le Premier ministre à Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l'intérieur de l'outre-mer et des collectivités territoriales, plaidait pour une "actualisation des bases de la taxe d'habitation et des taxes foncières à chaque changement d'occupant ou de propriétaire"...
Déjà, des médias crient au loup, annonçant des hausses de 300 à 500% ! C'est de bonne guerre mais fondé sur aucun élément tangible : en principe la réforme doit être effectuée à pression fiscale constante, une partie des contribuables voyant leur imposition augmenter quand d'autres la verront diminuer, par correction d'inégalités qui n'ont aujourd'hui pas lieu d'être ; il est à prévoir qu'on entendra les uns et pas les autres...
L'enjeu est d'actualiser les bases d'imposition de 36 millions de logements et locaux d'habitation, devenues obsolètes, les bâtiments récents se retrouvant plus taxés que les immeubles anciens de plus grand standing, simplement parce qu'en 1970 les logements n'avaient pas été rénovés et ne possédaient pas les mêmes éléments de confort ! Des logements sociaux en banlieue parisienne se retrouvent ainsi avec des valeurs locatives supérieures à celle d'appartements de même surface dans le Marais à Paris...
"C'est une réforme extraordinairement difficile à conduire (...) mais absolument nécessaire. Plus le temps passe, plus il devient indispensable d'avoir le courage de s'y atteler", reconnaît Gilles Carrez, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans des propos rapportés par l'Expansion. "J'espère qu'on arrivera à la faire avec un minimum de consensus politique", ajoute-t-il.
La réforme - qui nécessite une large collecte de données -, ne se concrétisera pas avant 2018. L'Association des petites villes de France (APVF) a souhaité qu'elle ait lieu "dans des délais raisonnables" et soit "abordée dans le cadre de l'intercommunalité". La concertation avec les élus doit se poursuivre en octobre, avec l'objectif d'inscrire le lancement de la réforme dans le projet de loi de finances rectificative votée en décembre.
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