Activité record des banques et courtiers en crédits immobiliers au cours du 1er semestre : +44 à 46% en montants de nouveaux crédits et en nombre de prêts depuis début 2015 en niveau trimestriel glissant, selon l'observatoire Crédit Logement / CSA à fin juin... Et sans les renégociations de crédits existants !
Des vendeurs qui lâchent un peu sur les prix, des taux d'intérêt record mais aussi des rumeurs de remontée des taux dans les mois à venir expliquent cette envolée après il est vrai aussi, des trimestres de marasme. Le retour des primo-accédants et des investisseurs dans le neuf y ont ajouté ! Résultat : les banques, qui doivent aussi traiter une masse de demandes de remplacement de prêts contractés il y a quelques années à des taux nettement plus élevés, se sont retrouvées engorgées comme jamais. D'autant qu'elles ont toutes plus ou moins procédé à des compressions d'effectifs, ou au remplacement de conseillers chevronnés par des recrues moins expérimentées. Du coup, chaque dossier prend plus de temps et les délais d'obtention des offres de prêt s'allongent démesurément : le courtier Meilleurtaux.com note que le délai d’émission d’une offre de prêt s’élève en moyenne à 3 ou 4 semaines une fois l’accord de financement obtenu alors que quelques jours suffisaient en temps normal. En ajoutant le délai de l’accord de financement, la réception des courriers et le délai de réflexion obligatoire (10 jours après la réception de l’offre), un autre courtier estime qu’il faut aujourd’hui compter 70 jours en moyenne entre la demande de crédit et la possibilité de débloquer les fonds, le double du délai pratiqué en temps normal !
Quant aux renégociations de prêts immobiliers, la situation est encore pire. Beaucoup de banques ne traitent plus ou presque pour le moment ces demandes, indique Meilleurtaux. La priorité est donnée aux nouveaux crédits finançant des acquisitions qui sont soumises à une date butoir. Car le délai imparti généralement dans les promesses de vente pour réaliser la condition suspensive de crédit est de 45 à 60 jours, ce qui s'avère à présent trop court, mettant des acquéreurs en difficulté. Bien entendu, le délai contractuel peut être allongé, mais il faut l'accord du vendeur, et celui-ci peut être tenté de profiter du défaut de réalisation de la condition pour se dégager et traiter avec un acquéreur à de meilleures conditions...
Autre conséquence de cette flambée : les banques vont réaliser prématurément leurs quotas de crédits immobiliers, et lever le pied, se consacrant aux meilleurs dossiers et délaissant les autres. De nombreuses opérations ne vont donc pas pouvoir se faire risquant, après l'embellie de ce 1er semestre, d'accentuer sur le marché immobilier le ralentissement saisonnier de l'automne ! D'autant que d'autres nuages se profilent : l'insistance croissante des régulateurs du Comité de Bâle risque de mettre en cause le modèle français de financement du logement qui fait tache : des crédits à taux fixes et bas sur des durées longues, financés en grande partie sur des ressources propres des banques comme les comptes sur livret et l'épargne logement, garantis de surcroît majoritairement désormais par le système de la caution (type Crédit Logement), contredit frontalement le modèle anglo-saxon de crédits à taux variables, exclusivement hypothécaires, avec titrisation généralisée fondée sur la valeur du gage, et transfert du risque aux emprunteurs et/ou aux investisseurs.
Le Comité de Bâle a lancé une consultation sur le "risque de taux dans le portefeuille bancaire" qui restera ouverte jusqu’en septembre 2015. Elle devrait dans toutes les hypothèses conduire à instaurer une surcharge minimale de fonds propres destinée à couvrir le risque de taux sur les crédits à taux fixe. Ce qui pousserait aussi à une augmentation drastique de la pratique de la titrisation, et par voie de conséquence, d'une part un recul de la pratique de la caution, incompatible, et d'autre part une augmentation sensible des taux, afin d'offrir aux investisseurs des taux de rendement attractifs. Ce que ne permettent pas les pratiques tarifaires actuelles de banques, les crédits immobiliers étant trop souvent faiblement margés afin de gagner de nouveaux clients. D'autant que l’augmentation des taux serait accompagnée presque sûrement par un raccourcissement des durées et une sélection encore plus marquée des clientèles servies...
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