Alors que les professionnels voudraient faire croire que la loi "ALUR" et l'encadrement des loyers vont conduire à la pénurie de logements locatifs, les chiffres les démentent : ainsi ceux publiés le 7 juillet par le réseau Century 21 pour le 1er semestre 2015. Il en ressort, dans un marché fortement ralenti, une tendance générale des loyers à la baisse, et une augmentation de la vacance entre deux locataires.
Les loyers moyens ont baissé pour presque tous les types de biens au 1er semestre 2015. Le loyer moyen des studios et une pièce a ainsi reculé de -1,2%, les deux pièces – les locations les plus nombreuses sur le marché - de 0,2% et les trois pièces de 1%. Les quatre pièces subissent la plus forte baisse (-4,4%) tandis que les maisons sont quasi stables sur le 1er semestre 2015 (-0,1%). Seuls les 5 pièces et plus ont vu leur loyer moyen augmenter (+2,2%), mais il s'agit de biens peu nombreux sur le marché.
En Ile-de-France (hors Paris), le loyer moyen stagne, passant de 791 euros en 2014 à 793 euros au 1er semestre 2015. Seuls les trois pièces baissent, passant de 893 à 881 euros par mois pour 63 m2. A Paris, les 2 pièces et les 3 pièces ont vu leurs loyers moyens augmenter respectivement de 2% et de 6% au 1er semestre 2015. Par contre, les studios et 4 pièces n'ont quasiment pas varié. Le deux pièces parisien est passé en six mois de 1.040 à 1.062 euros pour 39 m2. Mais si les loyers moyens parisiens montent, le loyer au m2, lui, baisse de 1,2%.
En région, la seule grande ville à afficher une tendance nette à la hausse des loyers sur la majorité des biens est Montpellier. Le loyer moyen de relocation d'un deux pièces est ainsi passé en six mois de 513 à 520 euros pour 41 m2. Mais les studios ont baissé... A l'autre extrême, à Bordeaux et à Lyon, la baisse est générale sur tous les types de biens, quel que soit le nombre de pièces. A Bordeaux, les deux pièces sont ainsi passés de 505 à 497 euros pour 45 m2, et à Lyon "toutes les typologies de logements, à l'exception des studios (stables), voient leurs loyers baisser dans des proportions relativement importantes (-4,1% pour les 2 pièces par exemple, ou encore -7% pour les 4 pièces)", dit Century 21 France, avec un loyer des deux pièces passé de 556 à 533 euros par mois pour 44 m2. Entre ces deux extrêmes, dans la majorité des grandes villes, les loyers sont stables ou en baisse selon le type de logement, sauf à Strasbourg, quasiment stable.
Parallèlement, le réseau Century 21 constate une baisse du revenu moyen des locataires, pour toutes les tranches d'âge. France entière, leur revenu moyen est passé, de 2.641 à 2.275 euros mensuels pour les relocations de deux pièces et de 2.912 à 2.417 euros mensuels pour le relocations de trois pièces ! La part des jeunes locataires est toujours largement majoritaire même si elle est en forte baisse au cours du 1er semestre 2015 passant de près de 50% en 2014 à 41%. Toutefois cette baisse est à pondérer pour prendre en compte un effet de saisonnalité, cette catégorie regroupant les étudiants dont les locations ont majoritairement lieu au 2nd semestre.
Il n'en demeure pas moins que les jeunes locataires ont tendance à rester davantage chez leurs parents, relèvent les auteurs de l'étude. Ceux qui ont quitté le foyer familial pour prendre une location ont vu leurs revenus diminuer (-15,9%) entre le 2nd semestre 2014 et le 1er semestre 2015. Century 21 constate pour la première fois que dans sa clientèle les quadragénaires (15,1%) et les quinquagénaires (9,8%) représentent plus du quart des locations, passant devant la population des locataires âgés entre 30 à 40 ans. Les conditions économiques actuelles impactent directement cette population qui préfère demeurer dans son logement plus longtemps en attendant des jours meilleurs.
Résultat de cette solvabilité fragilisée : le délai de relocation augmente et les propriétaires-bailleurs voient leur revenus locatifs diminuer avec un rendement de 3 à 4% (contre 5% en 2013).
Pas simple d'interpréter ces résultats, qui semblent plus liés à la situation économique d'ensemble et la façon dont elle touche la population candidate à la location qu'à des effets d'une politique de nature à décourager les bailleurs. Ceux-ci sont certes moins nombreux à investir dans l'ancien, mais ils sont revenus dans le neuf, occasionnant une embellie remarquée dans les ventes des promoteurs. Ces nouveaux logements locatifs font concurrence aux anciens, surtout lorsque les bailleurs ne font pas suffisamment d'efforts pour les entretenir, que ce soit individuellement pour leurs parties privatives que collectivement dans les copropriétés pour les parties communes. Il est observé depuis de nombreuses années que les copropriétés se dégradent, et les propriétaires en payent aujourd'hui le prix. Sans compter l'effet performance énergétique : il est clair que le déclassement des "passoires thermiques" est en marche, et on n'imagine pas qu'un locataire paye le même loyer pour un logement avec des charges élevées par rapport à un autre dont les charges sont moitié mois lourdes ! De leur côté, dans un climat général marqué encore par l'incertitude, les locataires à bon niveau de vie sont peu incités à bouger, ou sont tentés par l'accession, dont les conditions sont pour eux plus favorables avec une double baisse des prix d'achat et des taux. Se retrouvent ainsi sur le marché de la location en grande partie ceux qui ne remplissent pas les conditions pour obtenir un financement, et les jeunes qui décohabitent...
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