Les députés ont adopté le 6 juillet 2016 en première lecture le projet de loi "égalité et citoyenneté", porté par Emmanuelle Cosse, ministre du logement, Patrick Kanner, ministre de la Ville, et Ericka Bareigts, secrétaire d'Etat chargée de l'égalité réelle. Le principe en avait été décidé au lendemain des attentats de janvier 2015, le Premier ministre, Manuel Valls, dénonçant alors l'apartheid social favorisant dans les banlieues le développement de la délinquance et de la radicalisation islamiste, et appelant à faire progressivement tomber les barrières auxquelles est confrontée une partie de la population dans ses conditions de vie. Son contenu a pu être largement préparé lors des Comités interministériels égalité et citoyenneté des 6 mars et 26 octobre 2015.
Dans une première partie, ce projet de loi veut créer les conditions de la généralisation d'une culture de l'engagement citoyen tout au long de la vie. Il ouvre le service civique à de nouveaux viviers, crée un congé d'engagement associatif pour les actifs bénévoles, une réserve civique ouverte aux mineurs de plus de 16 ans, la reconnaissance systématique de l'engagement dans les diplômes de l'enseignement supérieur et offre une information complète sur la santé et les droits à partir de 16 ans. Les parlementaires en commission puis en séance publique ont ajouté un meilleur contrôle des écoles privées hors contrat, qui passent d'un régime de déclaration à un régime d'autorisation préalable, le financement du permis de conduire par le compte de formation professionnelle, l'aménagement du temps des étudiants engagés ou salariés, et la création d'une carte du volontaire, pour que les jeunes en service civique aient davantage de droits...
Un deuxième volet du projet de loi concerne le logement dans l'objectif de favoriser la mixité et le vivre-ensemble. Sur le premier objectif, il instaure l'attribution d'un quart des logements sociaux au quart le plus modeste des 1,8 million de candidats aujourd'hui sur les listes d'attente. Mais cette mesure s'appliquera pas aux 1.300 quartiers prioritaires de la ville (QPV) dont la définition même est le critère de pauvreté de leur population, avec des ressources ne dépassant pas 60% du revenu médian. L'enjeu de la loi est de ne pas installer les plus pauvres là où ils sont déjà en nombre et leur permettre, au contraire, d'accéder aux quartiers attractifs.
Il prescrit aussi un engagement de l'ensemble des acteurs (collectivités, collecteurs du 1% logement...) afin de reloger les ménages prioritaires (notamment les 58.000 familles reconnues bénéficiaires du droit au logement opposable, ou DALO, et qui attendent toujours), ainsi qu'une plus grande transparence dans l'attribution des logements, une réforme des politiques de loyers afin de parvenir à une mixité réelle à l'échelle des immeubles ou encore des moyens supplémentaires donnés à l'Etat pour imposer des programmes de logements sociaux, là où la volonté politique locale est insuffisante. Il met fin également au régime d'exception (livret de circulation, quota dans les communes de rattachement, etc.) sous lequel vivaient encore les gens du voyage. Des amendements ont adapté ces mesures aux situations territoriales, notamment en vue d'une application de la loi SRU à la fois renforcée et rendue plus pertinente et cohérente avec les besoins des territoires.
Enfin, une troisième partie vise l' "égalité réelle", définie comme le fait de "permettre à chacun d'être en capacité de s'insérer pleinement dans la République". Le projet de loi consacre et crée ainsi de nouveaux droits, à travers l'extension du rôle des conseils citoyens, le renforcement de la formation à la maîtrise de la langue française, l'élargissement de l'accès à la fonction publique, et le renforcement de la lutte contre toutes les formes de discrimination. Parmi les discussions qui ont enrichi ce projet de loi, deux amendements instaurent l'exigence de représentation de la diversité dans les médias, à travers l'extension du pouvoir de sanction du CSA, et la pénalisation de la contestation des crimes contre l'humanité, y compris l'esclavage et les génocides.
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