Après avoir adressé au Premier ministre, en mai dernier, un recours gracieux resté sans réponse, le CLER - Réseau pour la transition énergétique, la Fondation Abbé Pierre, France Nature Environnement et l'UFC Que Choisir ont déposé au Conseil d'Etat une requête en annulation du décret du 9 mars 2017 relatif aux caractéristiques du logement décent.
Ce décret, était prévu par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Il devait définir le critère de performance énergétique minimale à respecter pour qu'un logement puisse être considéré comme "décent", en plus bien entendu des caractéristiques antérieures de salubrité, confort, sécurité, etc., et un calendrier de mise en œuvre échelonnée. Les associations dont le CLER avaient dès la parution de ce décret dénoncé "des normes de qualité dignes du 19ème siècle". De fait, le décret manque pour le moins d'ambition : le logement est qualifié d'énergétiquement décent s'il comporte une bonne étanchéité à l'air et une aération correcte ; il n'est pas fait mention de dépense énergétique.
Les demandeurs considèrent d'une part, que ce décret est inefficace pour mettre les logements locatifs sur la voie de la performance énergétique, "les propriétaires n'étant pas incités à réaliser des travaux dont il leur est impossible de déterminer s'ils seront de nature à rendre leur bien conforme à la loi", et qu'il ne favorise pas d'autre part la protection des locataires les plus défavorisés de factures exorbitantes et des risques qu'un logement mal isolé et mal chauffé fait peser sur leur santé. Ils demandent au Conseil d'État de mettre fin à cette insécurité sociale et juridique inacceptable, les passoires énergétiques ne devant plus être considérées comme des logements "décents".
Parallèlement, le collectif "Vive l'APL " regroupant de nombreuses associations, fédérations et unions syndicales, a déposé mercredi 11 octobre un recours au Conseil d'État contre le décret et l'arrêté datés du 28 septembre 2017, relatifs aux aides personnelles au logement (APL), et prévoyant notamment la baisse de toutes les aides personnelles au logement de 52 euros par mois.
Ce recours vise, selon le collectif, à faire reconnaître que le pouvoir réglementaire, en prenant une mesure d'une telle portée sans que celle-ci ne soit débattue devant le Parlement a empiété sur une compétence qui appartient au seul législateur. Par ailleurs, selon les demandeurs, cette mesure porte atteinte aux principes constitutionnels de dignité de la personne humaine et d'égalité devant la loi. En effet, la baisse des APL réduit la possibilité d'accès à un logement pour les personnes en situation de précarité et réduit leur chance de s'y maintenir pour celles disposant d'un logement. De plus, la réduction du montant des aides concerne l'ensemble des allocataires sans distinction et impacte de manière plus importante les personnes les plus vulnérables. Le décret et l'arrêté contestés remettent en cause le principe selon lequel, la réduction ou la suppression des prestations ne saurait être effectuées sans préserver l'équilibre entre les exigences de l'intérêt général et la sauvegarde du droit au respect du versement d'une prestation. Enfin, ces textes remettent en cause la sécurité juridique des baux en cours, bailleurs et locataires ayant choisi de conclure le contrat en considération du niveau des prestations existant au moment de la signature du bail.
A noter aussi que le décret contesté prévoit pour la première fois la possibilité de moduler les aides par simple arrêté ministériel, ce qui permet au gouvernement de s’affranchir de la consultation du CNH (Conseil national de l'Habitat) composé de représentants des bailleurs, des locataires et des associations de lutte contre le mal-logement...
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