Le tribunal administratif de Lille a annulé le 17 octobre l'arrêté signé par le préfet en décembre 2016 fixant les loyers de référence applicables dans la commune de Lille. Cette annulation suspend les effets de l'encadrement. Prévu par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) du 20 février 2014, pour s'appliquer dans toutes les zones tendues, le dispositif d'encadrement des loyers a été cantonné en août 2014 par le Premier ministre d'alors, Manuel Valls, à la ville de Paris et aux communes volontaires. Il a été instauré à Lille au 1er février 2017 sur demande de sa maire, Martine Aubry.
A noter que le Conseil d'État avait déclaré illégale la décision de Manuel Valls d'arrêter l'application l'encadrement comme le prévoyait la loi, et ce sur recours déposé par "Bail à part, tremplin pour le logement", association présidée par Julien Bayou. Le Conseil d'État avait motivé cette annulation en rappelant que le champs d'application de la loi votée s'étendait à 28 agglomérations de plus de 50.000 habitants où il existe "un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logement" et que "la Constitution ne permet pas au pouvoir réglementaire de procéder à une mise en œuvre de la loi à titre expérimental lorsque la loi ne l'a pas elle-même prévu".
Dans l'intervalle, l'encadrement des loyers à Paris et à Lille a fait l'objet de plusieurs recours, tous rejetés. Puis la Chambre FNAIM du Nord, l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS) et l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) Nord de France - chambre régionale de la propriété immobilière Nord Pas-de-Calais Somme ont demandé à nouveau au tribunal d'annuler les arrêtés ministériels qui avaient permis la mise en place de l'encadrement. Elles contestaient notamment le fait que le dispositif a été mis en œuvre sur la seule commune de Lille.
Le tribunal a rejeté la première requête, dirigée contre l'arrêté portant agrément de l'ADIL en tant qu'observatoire des loyers pour la commune de Lille. En effet, selon le tribunal cet agrément, qui n'a pas, par lui-même, pour effet de rendre applicable le dispositif de plafonnement des loyers, n'affecte pas directement le marché immobilier ou les intérêts des propriétaires que l'UNPI Nord de France a pour mission de représenter, et encore moins ceux des professionnels représentée par la FNAIM du Nord et l'UNIS. Pour le tribunal, ces associations n'ont pas un intérêt suffisant pour demander l'annulation de l'agrément de l'ADIL.
S'agissant de la requête dirigée contre l'arrêté du préfet du Nord du 16 décembre 2016, fixant les loyers de référence, le tribunal considère que seul l'UNPI Nord de France a un intérêt lui donnant qualité pour agir, eu égard aux effets pécuniaires susceptibles de découler de la mise en œuvre du dispositif d'encadrement pour les propriétaires de logements à même d'être donné à bail sur le territoire de la commune de Lille.
Sur le fond, le tribunal donne raison aux demandeurs, jugeant que le dispositif de plafonnement des loyers ne pouvait pas être appliqué dans la seule commune de Lille. Ce dispositif, dont le Conseil d'Etat a rappelé dans sa décision du 15 mars 2017 qu'il ne pouvait pas se limiter aux seules communes qui se portent volontaires, doit être mis en œuvre dans l'ensemble de l'agglomération lilloise au sens du décret du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts. Ainsi, l'agglomération lilloise, qui comprend 59 communes, doit être regardée dans son ensemble comme constituant une "zone tendue" pour l'application du dispositif de plafonnement et, plus généralement, d'encadrement des loyers, alors même que la commune de Lille, à elle-seule, présenterait les caractéristiques d'une telle zone.
Le tribunal a en conséquence annulé l'arrêté du préfet du Nord en date du 16 décembre 2016, au motif qu'en limitant son périmètre au seul territoire de la commune de Lille il ne respecte pas les dispositions de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 et celles du décret pris pour son application.
Cette décision ouvre la voie à une action similaire à Paris s'il se trouve quelqu'un pour engager l'action, ce qui ne manquera probablement pas. Ceci étant, le gouvernement est censé appliquer la loi, du moins tant qu'elle n'a pas été modifiée, par exemple dans la grande loi logement annoncée d'ici la fin de l'année. Pour le moment aucune communication de sa part n'a dévoilé ses intentions à ce sujet, même si on a pu comprendre que le président de la République n'était pas un fanatique de l'encadrement...
|