L’Agence Parisienne du Climat (APC) et l'Association des responsables de Copropriété (ARC proposent toutes deux d’intégrer en tant que tel l’enjeu stratégique de la rénovation des copropriétés dans le plan national de la rénovation énergétique des bâtiments. La copropriété constitue en effet un enjeu stratégique, avec 8,4 millions de logements régis par ce statut, soit 21% du parc immobilier. En zone urbaine, la copropriété est majoritaire, elle représente 87% du parc privé de la métropole parisienne (et 65% du parc privé francilien). Ainsi, traiter la rénovation énergétique pour les habitants des villes, c’est traiter les copropriétés !
A l’enjeu énergétique et climatique certain, s'ajoutent un enjeu social - 37% des ménages en situation de précarité énergétique sont logés en copropriété - et un enjeu urbain : la copropriété est en effet un outil essentiel de lutte contre l’étalement urbain et un choix d’habitat durable par excellence.
Mais il s’agit d’un segment spécifique du secteur résidentiel, et pour favoriser la massification des rénovations énergétiques sur ce segment du marché, celui-ci doit être traité en intégrant ses spécificités : temporelle - les projets s’y inscrivent dans le moyen terme -, sociale - les projets y sont par nature collectifs, partagés, solidaires - et organisationnelle : les projets s’y mènent avec un écosystème professionnel spécifique et avec une gouvernance particulière, condition essentielle du succès du projet.
Il ne faut pas avoir peur de la copropriété, dit l'APC : prise dans ses spécificités, elle se rénove. Le travail mené avec le déploiement de la plateforme CoachCopro sur 21 territoires dans les principales agglomérations françaises en donne la preuve.
La première proposition est sans surprise de fixer un objectif spécifique de rénovation pour la copropriété, et pour éviter un décrochage de la qualité des logements en copropriétés, celles-ci demandent à être traitées au même rythme que le reste du parc. Ainsi, un objectif de 100.000 logements rénovés par an semblerait légitime : 20% de l’objectif correspondant à la part occupée par la copropriété dans le parc immobilier français.
Ensuite il faut reconnaître et financer le métier d’accompagnateur de copropriétés au sein des Point Rénovation Info Service (PRIS), dans une phase d’amorçage de 3 à 5 ans. Le travail de terrain mené par plus de 200 professionnels animateurs-accompagnateurs de copropriété au niveau national est déterminant pour faire émerger le marché. Il n’a pas pour l’instant d’équivalent dans le marché. A l’heure actuelle, la majorité des rénovations énergétiques globales ne sont menées à leur terme par les copropriétés qu’après un long travail d’accompagnement de celles-ci.
Or même s’il peut et devrait contribuer au financement de ce métier, l'APC reconnaît que le secteur privé n’est pas encore en capacité de prendre en charge à lui seul cette mission car il s’agit ici de gérer le temps long des projets des copropriétés, ce qui implique des temps de retour commerciaux difficilement tenables à ce jour. Le travail mené aujourd'hui par les professionnels accompagnateurs est porté par des structures locales financées par les collectivités territoriales et l’ADEME : EIE, PRIS, PTRE, SPPEH. Pérenniser et stabiliser le métier d’accompagnateur de la rénovation énergétique des copropriétés est indispensable.
Il faut également assurer la stabilité et la visibilité des dispositifs de financement des travaux de rénovations énergétiques, pour éviter les effets de "stop & go".
L'APC se fait forte de prouver que la rénovation basse consommation est possible partout sur les territoires, en documentant avec des références significatives un travail d’observation du marché de la rénovation énergétique des copropriétés. L’observatoire de la rénovation énergétique en copropriétés de l’APC sur le territoire de la Métropole du Grand Paris en est un exemple. L’observatoire présente, avec un système de data visualisation, les grandes tendances pour le territoire, ainsi que des bonnes pratiques et des études de cas.
Le plus délicat est d'assurer une traçabilité et une cohérence des différents systèmes d’information et diagnostics tout au long du projet et de la vie de la copropriété. "Avec le développement des outils numériques chez les professionnels et les particuliers, la succession d’obligations avec l’audit, le DTG, et la future généralisation de la maquette numérique, il est temps de réfléchir à 3 ans à la consolidation d’un système d’information cohérent, ouvert et traçable. Ce système d’information permettrait un outillage complet pour l’aide à la décision et le suivi des projets et de la vie de la copropriété dans le temps", suggère l'APC.
Elle préconise enfin de développer des outils d’accélération comme les – Zones de Rénovations Concertées (ZRC)
Pour contribuer à l’accélération, les premières études menées entre Efficacity et l’APC ont mis en évidence les avantages liés à la rénovation énergétique mutualisée au sein d’un îlot. A partir d’une étude sur un cas pratique, il a été montré le potentiel de baisse du coût des travaux : achats groupés, mutualisation d’équipements et de production locale d’énergie maîtrise des coûts en amont, et les opportunités nouvelles permettant une amélioration globale de l’îlot et du quartier, et donc une augmentation de la valeur patrimoniale des copropriétés. Ces démarches sont à tester dans les deux prochaines années.
L'ARC a aussi déposé un "Livre blanc pour dynamiser l’entretien et la rénovation des copropriétés". Il résulte d’une réflexion avec une vingtaine de partenaires : la Ville de Paris, Cerqual (Association Qualitel), Energie Pulse, Flame, Nepsen/Paziaud, Tribu Energie, l’ANAH, l’ANIL, les associations Planète Copropriété, Planète Surélévation, Artprim, Scoop d’architecture Bioclimatique (Membre De Mve), Universimmo, Energies Posit’if, Sunsquare, Ozone, l’UFC-Que Choisir, le CLER, Effinergie, et Reezome.
Partant d’une confrontation d’expériences et de témoignages permettant d’identifier la grande diversité de freins qui empêchent les copropriétés, non seulement de se mettre en mouvement vers leur rénovation énergétique, mais y compris pour la conservation du bâti et la prévention de la dégradation et du déclassement des immeubles. Le Livre blanc qui en résulte (1) comporte 40 propositions de réformes réparties en six thèmes qui sont : une meilleure définition de la politique nationale en matière d’entretien et de rénovation des copropriétés, un accès plus large à l’information à destination de l’ensemble des acteurs de la copropriété, un repositionnement de la communication institutionnelle sur les avantages de la rénovation en terme de confort et de valorisation patrimoniale, une meilleure adaptation du fonctionnement de la copropriété en matière d’entretien et de rénovation, une stabilisation des aides financières, et un encadrement juridique plus strict notamment en matière de contrat d’entretien de chauffage et de convention d’empiétement (cas des ITE en limite de propriété).
De nombreuses mesures sont unanimement recommandées comme rendre obligatoire la réalisation d’un diagnostic technique global (DTG) dont le contenu serait significativement enrichi et mieux encadré, imposer aux professionnels de la rénovation (architectes, bureaux d’étude, syndics) un niveau de compétences certifié, un développement des outils (extranet renforcé, carnet d’entretien, fiche synthétique patrimoniale...) permettant aux copropriétaires de mieux connaître l’état patrimonial de leur copropriété en vue de les impliquer activement dans la rénovation de leur immeuble, inciter fortement le développement de l’assistance à maîtrise d’ouvrage publique ou privée, ou encore rendre obligatoire la mise en place d’un plan d’amortissement des travaux afin de disposer d’un fonds de travaux qui ne devra plus être fixé en fonction du budget prévisionnel mais sur la base des travaux successifs qui devront être réalisés tout au long de l’existence de la copropriété.
(1) ARC – 31 janvier 2018 : Livre blanc de la rénovation des copropriétés
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