Après un premier testing mené en 2017 par la fédération pluridisciplinaire de recherche "Travail, emploi et politiques publiques" (TEPP) du CNRS, SOS Racisme a mené en partenariat avec la région Ile-de-France, 4 opérations de testing :
- un premier réalisé en 2017-2018 sur l’ampleur des discriminations raciales dans l’accès au logement des jeunes actifs et des étudiants,
- un deuxième depuis octobre 2018 sur l’ampleur des discriminations raciales sur les plateformes de mise en relation entre particuliers (PAP et Le Bon Coin),
- un troisième en 2019 sur l’acceptation des consignes discriminatoires par les agences immobilières,
- un quatrième sur les pratiques des communes et des bailleurs HLM concernant l’enregistrement d’une demande de logement social.
Concernant les étudiants, le profil d’origine française ancienne a obtenu le plus grand nombre de retours positifs, 17.5% (proposition de visite ou demande de pièces complémentaires afin de prévoir une visite). Pour les autres : le profil d’origine asiatique a reçu 16% de retours positifs, celui d’origine maghrébine 14%, et celui d’origine ultra-marine et subsaharienne 11%.
Pour le deuxième testing sur des plateformes de mise en relation de particulier à particulier, le profil d’origine française ancienne a obtenu le plus grand nombre de retours positifs, 48% (proposition de visite ou demande de pièces complémentaires afin de prévoir une visite). Pour les autres : le profil d’origine asiatique a reçu 46% de retours positifs, celui d’origine ultra-marine 31%, celui d’origine maghrébine 15%, et celui d’origine d’Afrique subsaharienne 12%...
Pour le troisième testing sur les agences immobilières, des militants de SOS Racisme ont appelé 90 agences en se faisant passer pour un propriétaire fictif, dont le nom laisse apparaitre des origines françaises anciennes, souhaitant mettre en location un bien et ayant des exigences discriminatoires par rapport à la sélection des locataires. Ils demandaient systématiquement aux agences immobilières s’il était possible pour l’agence de sélectionner les dossiers en fonction de l’origine des candidats et de leur présenter que les dossiers de locataires européens et non les profils dits arabes ou noirs afin d’éviter les problèmes de voisinage. Résultat : 49% des agences immobilières refusent, mais 51% acceptent des pratiques discriminatoires en indiquant au propriétaire qu’ils pourront procéder eux-mêmes à la sélection ou en laissant le propriétaire sélectionner lui-même le candidat sur la base de ces critères discriminatoires raciaux. Parmi celles qui acceptent, la moitié font mention de l’interdiction imposée par la loi ce qui prouve qu’ils la connaissent…
Alors que le code de déontologie, publié au journal officiel le 30 août 2015, définit les "obligations de probité, de moralité et de loyauté applicables aux professionnels de l'immobilier", et prescrit "le strict respect des lois et règlements", précisant que cela inclut l'abstention de toute discrimination parmi celles mentionnées à l’article 225-1 du Code pénal, force est de constater que beaucoup de professionnels n’ont pas encore adhéré totalement à l’éthique imposée par la loi ALUR, au demeurant sur demande de leurs principales fédérations FNAIM et UNIS.
En ce qui concerne le quatrième testing relatif au logement social, SOS Racisme indique q’aucune discrimination n’a pu être constatée par mail et par téléphone. Cependant, lors des testings physiques et de la présentation du demandeur directement sur place en mairie, des discriminations ont pu être constatées en raison de l’origine et du lieu de résidence. Des personnes n’ont ainsi pas pu obtenir une information exacte concernant la demande de logement social et n’ont pas pu retirer le dossier nécessaire. De plus, l’analyse des informations disponibles sur le site internet, par mail, par téléphone et sur place révèle des pratiques disparates en fonction des mairies et des bailleurs.
Devant les résultats désastreux de cette enquête, le ministre Julien Denormandie a jugé nécessaire de réagir en déplorant auprès de l'AFP "des discriminations malheureusement beaucoup trop nombreuses et récurrentes". Il devrait convoquer dans les prochains jours "les acteurs, les agences immobilières, les associations de propriétaires mais aussi le défenseur des droits pour continuer de trouver des actions complémentaires qui permettent de lutter contre ces discriminations"… (à suivre)
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