Ce sont les deux mesures phares mises en avant depuis sa mise en chantier mais il s'agit de plus que cela : le droit des "sûretés" est toiletté en profondeur et la réforme touche aussi bien les "cautionnements", les "gages" sur les biens meubles matériels, les "nantissements" sur les biens incorporels (actions, fonds de commerces, etc. ) et les hypothèques dans leur ensemble, conventionnelles ou judiciaires.
Au chapitre des "sûretés personnelles", en plus du cautionnement qui reste inchangé, il est créé deux nouveaux types de sûretés : la "garantie autonome" ("l'engagement par lequel le garant s'oblige, en considération d'une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande soit suivant des modalités convenues" - cette garantie se distingue du cautionnement dès lors que le garant doit payer "une somme" et non exécuter la dette du débiteur principal ; dans les baux d’habitation, elle ne sera autorisée "qu'en lieu et place du dépôt de garantie" et dans la limite des deux mois de loyer imposés par l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989) et la "lettre d'intention" ("l'engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l'exécution de son obligation envers son créancier").
Au chapitre des "sûretés réelles mobilières", on retiendra surtout des réaménagements et des simplifications, ainsi que la reconnaissance des "pactes commissoires" (permettant au créancier de se faire attribuer le bien en cas de réalisation du gage ou du nantissement), et de la propriété retenue à titre de garantie (clause de réserve de propriété).
A celui des "sûretés immobilières", même remarque, avec conservation des privilèges spéciaux et notamment du privilège immobilier spécial en faveur des copropriétés (il été craint un moment que celui-ci fasse les frais de la "simplification" !), et codification de l' "antichrèse" ("l'affectation d'un immeuble en garantie d'une obligation" - elle emporte usufruit sur le bien au profit de celui en faveur de qui elle est constituée) ; l'hypothèque est également toilettée et simplifiée (avec possibilité pour le créancier hypothécaire, au lieu d'engager une procédure de saisie immobilière en cas de non-paiement, de demander en justice ou faire jouer un pacte commissoire dans la convention d'hypothèque pour obtenir l'attribution de l'immeuble dès lors qu'il ne s'agit pas de la résidence principale du débiteur).
Enfin, il est effectivement créé l’ "hypothèque rechargeable », variante de l'hypothèque conventionnelle classique permettant d'offrir successivement ou simultanément la même hypothèque en garantie de plusieurs créances présentes ou futures : le rechargement de l'hypothèque n'est qu'une faculté qui doit être prévue dans l'acte constitutif de l'hypothèque ; celle-ci est nécessairement constituée pour un montant maximal prévu dans l'acte constitutif comme pour toutes les hypothèques conventionnelles y compris en garantie de créances futures ; le rechargement peut avoir lieu au bénéfice du créancier originaire ou de tout autre créancier mais dans la limite maximale des remboursements effectués ; comme l’hypothèque originelle, la convention de rechargement doit être passée par acte notarié et publiée ; une hypothèque inscrite antérieurement à l'entrée en vigueur de l’ordonnance peut être transformée en hypothèque rechargeable sous réserve de la rédaction d'un avenant et sa publication.
Enfin, l’ordonnance crée le très attendu "prêt viager hypothécaire", défini comme le "contrat par lequel un établissement de crédit ou un établissement financier consent à une personne physique un prêt sous forme d'un capital ou de versements périodiques, garanti par une hypothèque constituée sur un bien immobilier de l'emprunteur à usage exclusif d'habitation et dont le remboursement - principal et intérêts - ne peut être exigé qu'au décès de l'emprunteur ou bien lors de la cession ou du démembrement de la propriété de l'immeuble hypothéqué" ; les besoins d'une activité professionnelle sont exclus à peine de nullité.
Le texte retient le principe du plafonnement de la dette à la valeur de l'immeuble estimée à l'échéance du terme (décès, vente ou aliénation, remboursement anticipé) ; si la dette est inférieure à la valeur de l'immeuble, la différence entre cette valeur et le montant de la créance est versée, selon le cas, à l'emprunteur ou à ses héritiers.
Le but de "libérer le crédit" est manifeste dans l'esprit de la réforme, le gouvernement étant convaincu que les français n'y recouent pas suffisamment, notamment en comparaison avec d'autres pays européens, et qu'une augmentation de l'endettement est de nature à favoriser la croissance ; il a été également convaincu, notamment par un groupe de travail présidé par le professeur Grimaldi, qu'une simplification dans la mise en oeuvre des "sûretés" - garanties dont le but est d'assurer au créancier, principalement banque ou organisme de crédit, le remboursement de sa créance en cas de défaillance du débiteur - était "essentielle au bon fonctionnement de l'économie, car c'est en offrant au créancier des garanties sérieuses de remboursement, que celui-ci sera enclin à ‘faire crédit", comme l'a expliqué le ministère de la Justice dans un communiqué.
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