Une pièce en trois actes...
Depuis le début septembre, il n'était plus question que de cela : le prêt à taux zéro (PTZ), le dispositif le plus populaire de l'accession à la propriété, allait être sacrifié sur l'autel de la rigueur budgétaire à court terme : remplacé par un crédit d'impôt aux "primo-accédants", son financement par l'Etat ne serait plus une dépense - un peu plus de 500 millions d'euros pour 90.000 prêts - mais une réduction de recette, qui plus est reportée à plus tard puisque ses effets ne se feraient sentir qu'à partir de 2006 !
Au demeurant ce n'était par la première fois que cette création de Pierre-André Périssol pendant son court passage au ministère du logement de 1995 à 1997 était sur la sellette avec la nouvelle majorité : un réaménagement par Gilles de Robien de ses modalités d'octroi avait déjà fait craindre fin 2003 des intentions d'en réduire la portée et surtout le coût, suscitant de nombreuses protestations des milieux professionnels (voir notre longue série de brèves). De fait, par les mesures successives inspirées par des motifs budgétaires, le nombre de bénéficiaires n'a cessé de diminuer au fil des années (il était de 145.000 en 1996), de même que le budget consacré, du fait de la baisse des taux d'intérêt...
Une fois de plus les critiques ne se sont pas fait attendre, des professionnels et notamment des constructeurs de maisons individuelles, principaux bénéficiaires du dispositif, mais aussi des parlementaires y compris de la majorité, faisant remarquer comme Gilles Carrez, rapporteur (UMP) de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qu'il permettait de "solvabiliser les ménages modestes", tandis qu'un crédit d'impôt implique que les accédants à la propriété aient déjà les moyens de se constituer un apport financier ! D'autant plus que les banques qui financent les acquisitions ont pris l'habitude d'inclure le PTZ dans l'apport personnel...
C'en était probablement trop pour le ministère du logement qui annonce depuis deux ans une relance de l'accession sociale, et pour qui cet atteinte à un de ses principaux outils commençait à faire désordre : pour Marc-Philippe Daubresse, pas question de réduire l'effort, et si crédit d'impôt il y a, ce sera comme sur les autres terrains d'action du plan de cohésion sociale pour doubler le nombre des bénéficiaires, avec un dispositif plus favorable aux très bas revenus et en l'étendant à l'ancien, que le PTZ ne permettait pratiquement pas de financer !
Si cette extension recevait un accueil favorable cette fois des professionnels de l'ancien, FNAIM en tête, un problème restait cependant à résoudre : comment faire prendre en compte par les banques un crédit d'impôt arrivant au mieux quelques mois après l'achat comme un apport personnel pour ce même achat ? Bercy a mis une partie du mois de septembre à chercher des solutions alambiquées (sécurisation du crédit d'impôt même en cas de changement de situation, versement en deux fois, etc.) pour arriver in extremis - quelques jours avant la présentation du budget le 22 - à la solution, reconnaissons-le astucieuse, qui finalement préserve à la fois le PTZ et le principe du crédit d'impôt, si opportun du point de vue des finances pour 2005 : le PTZ continuera à être distribué par les banques et ce seront elles qui bénéficieront du crédit d'impôt !
Bercy a gagné pour le court terme : le coût du PTZ disparaît partiellement en 2005 (390 millions au lieu de 550 à 590 prévus à régime constant) et n'apparaîtra qu'en 2006 sous forme de réduction de recettes pour un coût estimé au double de celui de 2004, le chiffre estimé étant de 1,2 milliards d'euros pour 250.000 bénéficiaires...
Le nouveau dispositif
A compter du 1er janvier 2005, les banques et organismes de crédit pourront accorder des "avances remboursables sans intérêt" à des accédants à la "première propriété" d'une résidence principale, sous conditions de ressources qui seront fixées par décret mais dont le principe serait d'ores et déjà fixé : l'attribution de ces avances serait fonction de l'ensemble des ressources des personnes vivant dans la résidence principale des bénéficiaires, du nombre de personnes occupant cette résidence à titre principal et de la localisation du bien immobilier, les zones où le marché est le plus tendu étant bien entendu favorisées.
Le barème d'éligibilité privilégiera les familles : le projet prévoit que "le plafond des tranches familiales" pourrait être relevé et celui des personnes seules légèrement aménagé" : ainsi, selon des informations rapportées par Les Echos (3), un couple avec un enfant dont les revenus sont équivalents à 2,5 SMIC, achetant en Ile-de-France, sera aidé dans le montage de son plan de financement à hauteur de 24.250 euros, contre 22.900 aujourd'hui, et une famille avec deux enfants en province bénéficiera de 20.000 euros, contre 18.300...
Le logement financé pourra être neuf ou ancien, sous réserve d'être "décent" (2) ; ni le bénéficiaire de l'avance ni aucun des occupants du logement ne devront avoir été propriétaire, usufruitier, ou titulaire d'un droit d'usage ou d'habitation, de manière directe ou indirecte, d'un logement à un moment quelconque antérieurement à la date d'acceptation de l'avance, sauf s'il est titulaire d'une carte d'invalidité de deuxième ou troisième catégorie, ou s'il est nu-propriétaire par suite d'une succession ou une donation consentie entre parents jusqu'au quatrième degré (article 67 du projet de loi de finances)...
Enfin, le bénéficiaire de l'avance devra respecter les conditions d'affectation du logement à la résidence principale pendant toute la durée du remboursement, faute de quoi il devra la rembourser de façon anticipée.
Les banques et organismes qui accorderont ces avances sans intérêt verront leur manque à gagner compensé non plus par une subvention mais par un crédit d'impôt sur les sociétés étalé sur 7 ans, qui prendra en compte de l'absence d'intérêt ainsi que l'étalement du versement de cette compensation : l'Etat paiera ainsi la trésorerie qu'il se ménage sans que cela apparaisse dans son endettement !
Cette durée de 7 ans devrait être aussi celle des avances accordées aux emprunteurs...
Que penser de l'extension à l'ancien ?
Réflexe de Cassandre ou risque réel : l'extension du PTZ à l'ancien ne fait pas l'unanimité, et si on l'applaudit chez les agents immobiliers - René Pallincourt au nom de la FNAIM y voit le rééquilibrage qui s’imposait "pour préserver la liberté de choix des primo accédants et favoriser la mixité sociale" et se félicite également de la prise en compte des zones de marché tendu -, d'autres craignent qu'elle ne nourrisse la hausse des prix ! C'est le point de vue exprimé notamment par un connaisseur de l'immobilier, l'ancien ministre du logement Pierre Méhaignerie, président de la Commission des finances de l'Assemblée nationale...
Cette crainte, vite relayée par la presse, est balayée d'un revers de main par le secrétaire d'Etat au logement qui non seulement récuse l'idée d'une suppression du PTZ mais invite au contraire à y voir un moteur plus puissant dans la même carrosserie - c'est le "PTZ Plus" - et la pièce maîtresse d'une politique relancée et volontariste en faveur de l'accession sociale, destinée à créer de nouvelles générations de propriétaires et alléger par la même occasion la demande de logements sociaux locatifs !
Accessoirement, l'extension à l'ancien a aussi pour effet attendu de favoriser l'acquisition dans les centres-villes et, indirectement, d'en faire bénéficier les artisans et les PME spécialisés, l'ancien nécessitant presque toujours quelques travaux de rénovation...
(1) La Tribune du vendredi 3 septembre 2004
(2) au sens du décret du 30 janvier 2002
(3) Les Echos du 24 septembre 2004
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