Un marché qui résiste, mais ralentit...
Alors que des instituts de prévision comme le BIPE (Bureau d'informations et de prévisions économiques) et Precepta (groupe Xerfi) annoncent depuis près de deux ans la fin de la hausse et même une baisse franche des prix de l'ancien, force est de constater que pour le moment celles-ci ne se sont pas encore produites : si l'indice mensuel des prix de l'ancien établi par la FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier) a marqué pour la première fois pendant 4 mois consécutifs, de juin à septembre, une légère baisse, à deux reprises en octobre et novembre 2007 il a connu un rebond, et le taux d'augmentation sur un an reste positif en 2007 à +3,7%, il est vrai nettement en dessous des prévisions de début 2007 qui tablaient sur une hausse de 5 à 6%.
Et encore ce ne sont que les chiffres des professionnels, établis sur les transactions qui passent par leur intermédiaire : l'indice INSEE-notaires de France, qui prend en compte le marché du particulier à particulier (tout de même plus de 50% des ventes) ainsi que le marché du neuf, affichait encore une hausse de plus de 6% à la fin du 2ème trimestre, et les notaires d'Ile-de-France maintenaient pour cette région une hausse annuelle de 6,4% à fin août !
Même résistance dans le neuf : au 3e trimestre 2007, la FPC (Fédération des promoteurs constructeurs) constate une reprise de la hausse des prix sur un an des logements en collectif ; déjà haute à la fin du 2ème trimestre (+6,5%), elle remonte à +9% en septembre 2007 par rapport à septembre 2006. Il est vrai que les prix des logements neufs dépendant en grande partie des coûts de construction et du prix du foncier, dont la hausse ne semble pas devoir se ralentir...
Si le marché immobilier n'a pas encore donné les signes du retournement annoncé, il donne cependant ceux d'une fin de cycle de hausse, notamment par le ralentissement de l'activité : celui-ci est sensible dans l'ancien, et si la FNAIM curieusement ne communique plus depuis plusieurs trimestres sur le volume des transactions (problème de fiabilité des données ou rétention volontaire ?), plusieurs acteurs témoignent d’une baisse du rythme des ventes, un allongement des délais et un attentisme de la part des acquéreurs potentiels. Ainsi le site d’annonces Se Loger, qui voyait dès octobre l'âge moyen des annonces augmenter - +14% en septembre 2007 par rapport à septembre 2006, en Ile-de-France comme en Province.
Citons aussi le réseau Century 21 (1.000 agences dans toute la France) qui annonçait en juillet un ralentissement du nombre de transactions au premier semestre 2007 - de -5% à périmètre constant par rapport au 1er semestre 2006 - et un allongement de la durée moyenne de négociation, ainsi que la FNAIM Ile-de-France qui confirmait en septembre pour la même période un ralentissement du nombre de transactions et surtout une baisse spectaculaire du nombre de mandats de vente : de 83 mandats par agence immobilière pour le premier semestre 2004, celui-ci serait descendu à 47,8 pour la même période en 2007 ! Même chose pour les délais de réalisation des mandats en Ile-de-France : de 51 jours au premier semestre 2005 on en était à 62 jours , et de 42 à 57 jours à Paris.
Ce ralentissement touche aussi le neuf : la FPC confirmait début décembre un repli de 7,8% des ventes par rapport au 3e trimestre 2006, et ne s'attendait pas à ce qu'il soit passager...
Une solvabilité en baisse des "primo-accédants", malgré le crédit d'impôt
Selon les chiffres de l'Observatoire du financement du logement (OFL), réalisé en partenariat par Crédit Logement et l'institut CSA, quelque 445.000 prêts sont accordés par an depuis 2002 à des primo-accédants, à rapprocher d'un total de 799.200 prêts immobiliers octroyés en 2006 , dont 251.600 dans le neuf et 547.600 dans l'ancien (sachant que l'acquisition d'un seul bien peut faire l'objet de plusieurs prêts), soit plus de la moitié du total. Or si les acquéreurs qui vendent par ailleurs un bien peuvent à peu près tirer leur épingle du jeu par la plus-value réalisée sur leur vente, et ne subir par conséquent la hausse des prix que sur la différence de surface ou de qualité du bien acheté par rapport au bien vendu, les primo-accédants prennent de plein fouet à la fois la hausse des prix, toujours supérieure à celle de leur pouvoir d'achat, et celle des taux d'intérêt.
Ceux-ci, après avoir touché un minimum historique au 4ème trimestre 2005, descendant à moins de 3,5% en moyenne sur l'ensemble des marchés, n'ont cessé de grimper depuis, le taux moyen frisant les 4% au début 2007 et s'établissant à 4,62% en novembre : 4,48% pour le neuf et 4,63 pour l’ancien. Il est à souligner que la hausse a été plus forte pour l’ancien et les travaux, les taux du neuf ayant même marqué un palier vers la fin de l'année.
Or, si une partie de la hausse des prix a pu au cours de la décennie écoulée être absorbée par l'augmentation de la durée des crédits, celle-ci a tendance à plafonner, atteignant des limites liées à l'âge des acquéreurs ou aux contraintes du refinancement du système bancaire : augmentant de 6 mois par an de 2001 à 2003 puis de 12 mois par an de 2004 à 2006, la durée moyenne des prêts a marqué le pas en 2007 et semble se stabiliser autour de 20 ans (elle était autour de 14 ans début 2001 !).
Et cette moyenne cache en fait une forte concentration des durées au dessus de 20 ans: 58,8% des prêts sont aujourd'hui d’une durée à l’origine comprise entre 20 et 30 ans, alors qu’en 2005 60,7% des prêts étaient compris entre 15 et 25 ans ! Ce phénomène est particulièrement flagrant pour les moins de 35 ans : 73,8% d'entre eux s’endettent sur des durées de 20 ans et plus, contre 20,9% en 2001 !
L'augmentation de la durée des crédits peut-elle encore se poursuivre ? En fait, au delà de la réticence naturelle des emprunteurs à dépasser des durées de 25 à 30 ans, un facteur financier jouera de plus en plus contre les prêts à très longue durée, en tous cas les prêts à taux fixe, préférés des français : le fait que les banques ne peuvent se refinancer que sur 15 ans au plus, et que dans le climat d'incertitude financière ambiante, elles prendront de moins en moins le risque de prêter à taux fixe pour des durées trop nettement supérieures...
Du coup, le taquet semble près d'être atteint : à moins d'une baisse des prix et au moins d'une stabilisation des taux d'intérêt, le taux d'effort demandé aux accédants ne peut que croître, risquant d'atteindre leurs limites de solvabilité. En 2006, l'achat d'un bien immobilier représentait en moyenne 5,1 années de revenu dans l'ancien, et 5 années pour le neuf (ils étaient respectivement de 3,8 et 3,9 années en 2003), ce qui au passage peut surprendre : désormais, l'ancien vaut plus cher que le neuf, et c'est encore plus vrai dans l'habitat individuel que dans le collectif ! Cette situation reflète surtout le fait que la construction neuve déserte les centres de villes au profit de la - souvent grande - périphérie en raison du coût et de la rareté du foncier...
Certes, le taux d'effort varie avec les régions : l'Ile-de-France est la région où le montant unitaire de l'achat est le plus élevé, avec un prix moyen de 262.400 euros, devant Paca (253.700 euros), tandis que certaines régions sont particulièrement abordables, comme la Franche-Comté (143.800 euros en moyenne) ou l'Auvergne (146.100 euros) ! Des écarts souvent plus accentués que ceux entre les niveaux de salaires !
En 2007 le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt pour la résidence principale, promis et mis en place dans le courant de l'été par le nouveau président de la République, est venu alléger un peu ce taux d'effort : l'OFL évalue son impact à une réduction de 0,65 point de taux d'intérêt. Mais la hausse des taux est venue l'effacer, si bien que l'effet de la mesure sur l'accession à la propriété sera plus vite oublié que ses conséquences sur les finances publiques ! Son résultat le plus probable risque d'être un sursis de 6 mois dans la stabilisation ou la baisse des prix du marché, ce qui le transforme en fait en une subvention aux vendeurs de 1,9 milliards d'euros en 2008 et 3,7 milliard en régime de croisière...
Un système bancaire plus secoué qu'il n'y paraît ?
La crise des prêts "subprime" aux Etats-Unis s'arrêterait-elle aux frontières de la France comme le nuage de Tchernobyl ? Rien n'est moins sûr ! Certes les banques françaises ont accordé moins de prêts à taux révisables que leurs homologues américaines, mais elles en ont accordé - notamment de 2004 à 2006 - et les emprunteurs concernés, confrontés à une forte hausse de leurs mensualités, commencent à se manifester : selon le courtier en crédits Meilleurtaux.com, on estime que plus de 100.000 ménages peuvent être directement concernés par des hausses de mensualités pouvant atteindre 20% ou plus.
Selon les chiffres de l'Observatoire de l'endettement, les prêts immobiliers à taux variable représentent environ 20% des encours de crédit en France (contre il est vrai 72% en Allemagne, 75% en Espagne et la quasi-totalité en Grande-Bretagne...). La commission des Finances de l'Assemblée nationale a chargé l'un de ses membres d'une mission d'information sur ce type d'emprunts immobiliers, après la révélation cet automne par l'Association des usagers de banque (AFUB) qu'elle avait reçu 500 plaintes d'emprunteurs.
Pour un prêt de 150.000 euros sur 30 ans contracté au plus bas des taux en 2004, Meilleurtaux estime que le taux d’intérêt augmente de 2 points environ, ce qui entraîne une hausse des mensualités de près de 200 euros par mois et une charge supplémentaire d’environ 8% des revenus du ménage. Or les prêts révisables ont été le plus souvent utilisés par des ménages aux revenus modestes qui y ont trouvé la seule solution de financement et dont l’endettement avant même l’augmentation de l’indice de révision était égal ou légèrement supérieur à 33%. De plus, fait remarquer Meilleutaux, les prêts révisables sont souvent établis sur 30 ans, ce qui rend impossible un allongement de durée supplémentaire visant à réduire les mensualités...
Or, dénonce Meilleurtaux, si les prêts à taux révisables ont permis à de nombreux primo-accédants d'acheter en empruntant des montants plus importants que ce qu'ils auraient pu faire en taux fixes, ils ont été souvent présentés de manière trompeuse : en dissimulant aux particuliers, le fait que les taux de référence se situaient à un niveau très bas et qu’une hausse des taux était inévitable, en utilisant des mécanismes de révision des mensualités extrêmement complexes qui ne permettaient pas aux particuliers de comprendre les hausses futures attendues en termes de mensualités, et enfin en faisant référence à des clauses de conversion en taux fixe qui n’apportent aucune sécurité...
La situation est d’autant plus explosive qu'elle vient s'ajouter à un contexte d'augmentation globale des cas de surendettement : déjà 700.000 ménages étaient en cours de procédure de désendettement selon le baromètre de la Banque de France cet automne. Mais à regarder de plus près, le problème est encore plus important : 15% ménages français disent avoir des difficultés à rembourser leurs dettes, soit 7,5 millions de personnes !
Autre dommage collatéral de la crise américaine : la mondialisation de refinancement des "suprime" via les fonds spéculatifs, que toutes les banques ont découvert en plus ou moins grandes quantités dans leurs portefeuilles financiers, et dont elles doivent provisionner la dépréciation ! Prises en flagrant délit d'imprudence, elles sont brusquement devenues frileuses et, d'une part reconstituent leur prime de risque en augmentant leurs marges - qu'elles avaient sacrifié dans la concurrence acharnée qu'elles se livrent depuis des années pour s'adjuger des clients, que les crédits immobiliers rendent plus captifs que les autres "produits" bancaires -, et d'autre part deviennent plus sélectives dans l'octroi des crédits ! Certes, ce phénomène est difficilement mesurable et les banques refusent de l'avouer, mais il ressort des témoignages des agents immobiliers, et a été confirmé, à l'échelle européenne, par l'enquête trimestrielle de la BCE (Banque centrale européenne) : 31% des 82 banques européennes interrogées par la BCE indiquent que les conditions d'accès au crédit se sont restreintes au troisième trimestre 2007, contre seulement 3 % d'avril à juin de cette même année...
Confirmation également de la part des courtiers en crédit qui sont évidemment en première ligne : le courtier Meilleurtaux.com relevait dès octobre que les banques ont entamé dans le traitement des dossiers que ses agences leur soumettent, une application plus stricte de la règle d’endettement (33%), un refus plus systématique de prendre en compte des revenus dont le montant peut évoluer (même à 50%) ou non prouvés (13ème mois non encore perçu), un refus de tout dossier dont le fonctionnement de compte n’est pas sans faille (même un rejet de prélèvement peut entraîner un refus !) ! Les prêts relais font également l’objet d’une attention particulière : la quotité financée passe de 80% à 70% et progressivement à 60%, et une hypothèque est souvent demandée sur le bien en vente. A rappeler également que les banques ne prennent pas en compte le futur crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt dans le calcul de la capacité d’endettement...
Suite dans la 2ème partie...
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