Le
deuxième volet du projet de loi souhaite
remanier la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports
locatifs (bailleurs/locataires) et va vraisemblablement
intégrer des articles sur la location meublée.
Avec un parc locatif privé en France de
près de six millions de logements, de nombreux
propriétaires et locataires sont donc concernés.
L'utilité de la location meublée
étant aujourd'hui reconnue, il est projeté
de lui donner une définition légale,
définition qui ne fera que reprendre celle
dégagée ces dernières années
par la jurisprudence.
Intégration
des locations meublées à la loi
du 6 juillet 1989 : des dispositions contractuelles
plus rigides ?
La
location meublée pourrait être soumise
à un certain nombre de dispositions de
la loi du 6 juillet 1989 relative aux locations
vides.
Certaines
dispositions sont déjà applicables
notamment l'obligation pour le bailleur de louer
un logement décent en bon état d'usage,
d'entretien et de réparation ou encore
l'obligation de fournir un dossier de diagnostic
technique.
Étendre
l'application de la plupart des dispositions de
la loi du 6 juillet 1989 à la location
meublée peut sembler positifmais certaines
de ces dispositions non seulement ne présentent
pas d'intérêt, mais risquent d'être
un frein pour les bailleurs, entraînant
une limitation de l'offre locative meublée
pourtant indispensable aujourd'hui. A titre d'exemple,
la surface habitable est une information rarement
demandée par un locataire en meublé.
Celui-ci recherche avant tout un logement parfaitement
équipé, fonctionnel et bien localisé,
et non des mètres carrés. Il serait
plus pertinent d'imposer une présentation
complète du mobilier et des équipements
mis à disposition du locataire.
Quant
à la rémunération des professionnels
de l'immobilier, deux options sont envisagées
: soit un partage des honoraires entre bailleur
et locataire, soit des honoraires uniquement à
la charge du bailleur. Cette dernière solution
présente des risques. En effet, si aujourd'hui
les agences mettent tout en uvre pour offrir
aux locataires une prestation de qualité,
qu'en sera-t-il demain si le bailleur supporte
seul les honoraires ? On peut s'attendre à
une diminution de la qualité de service
rendu au locataire.
Enfin,
des dispositions pourraient rester spécifiques
à la location meublée, comme le
montant du dépôt de garantie demandé
au locataire qui serait limité à
deux mois de loyer, contre un dans le cadre d'une
location vide. Cela est tout à fait justifié,
le dépôt de garantie servant également
à couvrir les dégradations éventuelles
du mobilier et des équipements fournis
avec le logement. Cette disposition entérinerait
la pratique des professionnels de la location
meublée.
Une
perte de flexibilité pour les propriétaires
des locations meublées à titre de
résidence principale
Aujourd'hui
dans le cadre d'une location meublée à
titre de résidence principale, bailleur
et locataire s'engagent sur un contrat d'un an
qui se renouvèle tacitement par période
d'un an. Le locataire peut donner congé
à tout moment avec un préavis d'un
mois. Quant au bailleur, il peut donner congé
à chaque date anniversaire avec un préavis
de trois mois en motivant celui-ci (vente du bien,
reprise pour y habiter ou non-respect par le locataire
de ses obligations).
Le deuxième volet de la loi Duflot pourrait
proposer qu'après deux ans de location
meublée à titre de résidence
principale par un même locataire, la totalité
des dispositions de la loi de 1989 s'appliquent.
Or, en pratique, on constate que les locataires
restent rarement plus de deux ans dans un appartement
meublé, ce mode de location répondant
à un besoin temporaire. De prime abord,
on peut donc penser que cette disposition ne trouvera
que rarement à s'appliquer. Cependant,
elle risque d'effrayer les propriétaires
ayant besoin de flexibilité et souhaitant
récupérer leur bien à court
ou moyen terme. Cette mesure portera atteinte
à la fluidité du marché et
entrainera une diminution du nombre de contrats
de location meublée à titre de résidence
principale du locataire. Il faudrait prendre en
compte la situation du locataire et être
à l'écoute de ses besoins. A vouloir
le protéger davantage, la loi va finalement
le desservir.
Étendre
le décret d'encadrement des loyers : un
impact sur la location meublée ?
La
location meublée n'est pas soumise à
l'encadrement des loyers aujourd'hui mais le sera
certainement demain. Cela n'aura pas d'incidence
sur les prix du marché car, comme le démontrent
les derniers baromètres réalisés
par Lodgis, l'évolution des loyers du meublé
est moindre que celle de l'IRL. Cependant en pratique
les propriétaires vont se sentir contraints
et ceux qui recherchent la flexibilité
préféreront laisser leur bien vacant.
Il existe là encore un risque de voir l'offre
locative se réduire de façon significative,
au détriment des locataires à la
recherche d'une location meublée.
Quel
avenir pour la GURL (Garantie Universelle des
Risques Locatifs) ?
Nous
constatons un échec important de la GRL
(Garantie des Risques Locatifs). Cette assurance
permet au propriétaire de se prémunir
contre certains risques liés à la
location, notamment les impayés de loyers.
La condition pour en bénéficier
est que le locataire ait des ressources au moins
égales au double du montant du loyer charges
comprises. Malheureusement, dans les faits cela
s'avère insuffisant. En conséquence
le nombre de sinistres est important et le coût
de cette garantie n'a cessé d'augmenter.
La
GURL (Garantie Universelle des Risques Locatifs)
poursuit les mêmes objectifs louables :
sécuriser les propriétaires, faciliter
l'accès au logement au plus grand nombre
et fluidifier le marché locatif. Mais si
les conditions d'accès à cette garantie
sont similaires à celles de la GRL, la
GURL risque de connaître le même échec.
La
nécessité d'un cadre juridique adapté
pour la location meublée
La
mobilité professionnelle et l'évolution
des modes de vie génèrent véritablement
une demande de locations meublées. En effet
d'après le baromètre du 1er trimestre
2013 réalisé par Lodgis, 55% des
locations meublées sont destinées
à des fins professionnelles. Les entreprises
sont de plus en plus à la recherche d'alternatives
pour loger temporairement leurs salariés,
dans des conditions adaptées, qu'ils soient
en déplacement de moyenne ou de longue
durée (formations, stages, missions, salons,
etc). La location meublée répond
aussi aux besoins des étudiants et des
personnes en situation d'urgence (séparation,
travaux...).
Certaines
des réformes envisagées par la future
loi Duflot vont encadrer davantage la location
meublée mais de manière inadaptée.
Celle-ci
a pourtant besoin d'un vrai cadre juridique aujourd'hui,
d'un cadre sur mesure pour répondre aux
besoins des locataires et non d'une transposition
des dispositions de la location vide, qui risquent
de dissuader de nombreux propriétaires
de louer leur bien meublé. Dans l'ensemble,
aucune des mesures prévues ne favorisera
la location, qu'elle soit vide ou meublée.
Les locataires, que l'on souhaite protéger,
risquent au final d'être perdants...
Par
Maud Velter, Directrice Associée
de Lodgis
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