On le devine aisément : derrière cette question en apparence anodine posée tous les trois ans en assemblée générale comme le voulait la loi – faut-il ou non déposer les fonds de la copropriété sur un compte bancaire au nom du syndicat des copropriétaires ? – se cachent beaucoup de fantasmes, de malice et de vrais enjeux !
Evidemment, les syndics n’aiment pas beaucoup les comptes au nom du syndicat ; pour de bonnes et de moins bonnes raisons, qu’ils n’avouent bien entendu pas, au point de s’enferrer souvent dans des arguties cocasses qui ne renforcent pas leur crédibilité…
Beaucoup, et notamment les plus gros, s’arc-boutent encore sur le principe du compte unique. C’est le mode traditionnel de dépôt de fonds de tous les mandataires : un seul compte reçoit les fonds de toutes les copropriétés et même des mandants de gestion locative, la comptabilité du syndic, sous réserve qu’elle soit bien tenue, lui permettant d’individualiser les fonds de chaque « client » ; cela n’a en fait rien d’alarmant en soi : après tout les banques font bien la même chose et personne ne les soupçonne de détourner les fonds de leur clientèle… Mais pas question évidemment que les copropriétaires y mettent leur nez…
D’autres, plus transparents, et disposant de logiciels informatiques plus performants, proposent des formules alternatives avec des comptes ouverts spécialement pour chaque copropriété, mais au nom de leur cabinet. Le compte bancaire est consultable par les copropriétaires, de même que le rapprochement comptable. Ils peuvent ainsi vérifier un point sensible : la date effective de règlement des fournisseurs de la copropriété ! Encore que…
Si les syndics résistent tant – non sans succès, il faut le reconnaître : peu de copropriétés arrivent à imposer le compte au nom du syndicat contre leur volonté – c’est évidemment pas pour la surcharge de travail en comptabilité, les syndics proposant des comptes individualisés ouverts en leur nom n’ayant apparemment pas de problème pour maîtriser la pluralité de comptes que cela implique, mais à cause des produits financiers réalisés sur la trésorerie fusionnée de l’ensemble des copropriétés. Certes, ce poste de revenus a fortement diminué avec la baisse des taux d’intérêt, mais cela reste un appoint indispensable au compte d’exploitation de nombreux cabinets…
C’est aussi pour cette raison que les associations de consommateurs militent quant à elles de longue date pour la généralisation du compte bancaire ouvert au nom du syndicat des copropriétaires.
Elles y voient, outre une meilleure sécurité dans la gestion des fonds et leur transmission en cas de changement de syndic, la possibilité de choisir la banque et obtenir une rémunération des fonds au profit de la copropriété.
Mais, si elles avaient quelque légitimité à mener ce combat à l’époque de l’inflation et des taux d’intérêt à deux chiffres, ont-elles raison de le continuer avec autant d’acharnement alors que les placements de trésorerie ne peuvent rapporter guère plus de 5% ; à ce taux, la trésorerie courante d’une copropriété, qui dépasse rarement 1000 francs par copropriétaire ne peut rapporter dans des conditions optimales plus de 30 à 40 francs par copropriétaire et par an – inutile de préciser que le syndic ne peut en aucun cas se muer en gérant de patrimoine, et que transformer le syndicat des copropriétaires en fonds commun de placement serait contraire à l’objet même de la copropriété !
Les autres arguments sont au mieux illusoires, au pire démagogiques.
Du point de vue de la sécurité des fonds, et contrairement aux idées reçues, les trois systèmes sont rigoureusement équivalents. En effet, le syndic, de par son statut de mandataire, est seul signataire des décaissements. Il peut partir avec la caisse dans les trois cas, ce qui fait que la garantie financière – obligatoire pour la délivrance de la carte professionnelle elle-même condition sine qua non de l’exercice de la fonction – est nécessaire indifféremment quel que soit le type de compte. En fin de mandat, le compte au nom du syndicat suit la copropriété avec son contenu, mais rien n’empêche le syndic de prélever avant de le transmettre le montant de toutes ses facturations, alors qu’à contrario, en cas de compte ouvert en son nom il est tenu de remettre les fonds disponibles à son successeur dans les trois mois sous peine d’y être condamné par le tribunal avec de fortes pénalités…
Quant à l’idée que la copropriété puisse choisir sa banque et négocier ses conditions, elle est tout simplement irréaliste : le syndic ne peut en toute légitimité accepter pour des raisons purement pratiques de disperser ses opérations bancaires sur une pluralité d’établissements, nécessitant chacun la mise au point de procédures de travail spécifiques !…
Ne resterait-il dans ce combat que le désir d’ennuyer les syndics ?
Enfin, on s’étonnera aussi de l’attitude ambiguë et des errements législatifs des pouvoirs publics, censés promouvoir le compte séparé, mais sensibles au lobbying des professionnels…
Bref rappel des épisodes du feuilleton :
Acte I – loi du 31 décembre 1985 modifiant l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965 : le syndic devra « soumettre au vote de l'assemblée générale, lors de sa première désignation et au moins tous les trois ans, la décision d'ouvrir ou non un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat sur lequel seront versées toutes les sommes ou valeurs reçues par ce dernier ». Et d’ajouter qu’à défaut « de faire délibérer l'assemblée sur l'ouverture ou non d'un compte séparé dans les conditions ci-dessus définies, son mandat est nul de plein droit » !
Acte II – loi du 13 décembre 2000 modifiant le même article 18 de la loi du 10 juillet 1965 : cette fois le syndic devra « ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs reçues au nom ou pour le compte du syndicat. (…) La méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat à l'expiration du délai de trois mois suivant sa désignation ». Mais d’ajouter aussitôt que, quand la copropriété est gérée par un syndic professionnel : « l'assemblée générale peut en décider autrement »…
Nuance subtile ! Il est vrai qu’il fallait faire quelque chose, car la première rédaction de cette disposition, à défaut de favoriser de façon décisive l’ouverture de comptes séparés, avait surtout permis à de nombreux copropriétaires débiteurs d’obtenir la nullité du mandat de leur syndic, et se soustraire ainsi à ses poursuites, au motif que celui-ci avait laissé passer trois ans jour pour jour sans reposer la question du compte bancaire à une assemblée de copropriétaires, même si celle-ci avait déjà opté auparavant pour un compte séparé !… Disposition stupide s’il en est !
Mais sur le fond, les syndics ne s’y sont pas trompés et diffusent des notes internes rassurantes ; cette nouvelle rédaction allège plutôt leurs contraintes sans rien changer sur le fond…
Cherchez l’erreur…
UniversImmo.com
Commentaire posté par
Marie LAMBERT
, le
13/2/2012 à 23h48 Non, la copropriété n'est pas responsable si le syndic "fait faillite". En revanche, s'il n'a pas payé des dépenses engagées pour la copropriété, et s'il s'avère qu'il soit réellement insolvable, alors qu'en général sa caisse de garantie aura déjà cessé d'assurer sa garantie (d'où l'intérêt pour le syndicat d'exiger annuellement de son syndic la justification du règlement de sa cotisation à celle-ci)la copropriété risque d'être poursuivie par les fournisseurs en paiement des dépenses qui n'auraient pas été acquittées ; et de devoir ainsi payer 2 fois !
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Commentaire posté par
BAQUÉ
, le
16/8/2011 à 17h31 question en ayant un compte non séparé du sindick
sommes nous responsable si le sindick fait faillite
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