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ACTUS
Acheter un loft : bons plans et pièges à 'bobos'...
Le
12/6/2001
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Pas une série branchée ou émission 'tendance' qui ne se passe dans un loft, la dernière en date des émissions vedette ne faisant que sacrifier à une mode de plus de vingt ans originaire comme il se doit d'outre-atlantique ! Originalité, décalage, libre cours donné à ses goûts décoratifs, récupération d'un environnement urbain déclassé, le loft est l'objet rêvé de ceux qui veulent s'exprimer et refusent l'habitat de tout le monde, réservé aux incorrigibles petits bourgeois conformistes... Bon plan immobilier de surcroît ? Pas sûr ! L'usine ou l'atelier pas cher qu'on achète dans un quartier dégradé mais qui deviendra branché un jour - sûrement ! - est un pari risqué que personne n'ose en réalité tenter : si le quartier n'est pas branché, il a peu de chances de le devenir ! Et s'il l'est devenu, les marchands de biens sont déjà passés par là ! Sans compter les pièges qui attendent le lofteur non préparé aux surprises des bâtiments industriels ou à celles du changement d'affectation...
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Ne nous faisons pas d'illusions : transformer un bien immobilier pour une destination qui n'était pas la sienne à l'origine est affaire de professionnels ! Et même ceux qui s'y adonnent n'ont en général pas le niveau de compétence et de rigueur professionnelle pour mener ce type d'opérations dans les règles, ce qui explique les problèmes sans nom auxquels se trouvent confrontés les acquéreurs, et aussi les copropriétaires des autres bâtiments quand les créateurs de lofts ont la bonne idée de s'exercer dans une copropriété !
Trois types de difficultés attendent le lofteur amateur, qui veut réaliser un bon coup :
- difficultés techniques : les bâtiments industriels ne se prêtent pas facilement à l'habitation : éclairage et vue extérieure, ventilation, alimentations et évacuations d'eaux, isolation thermique et phonique etc. ; par ailleurs, vu les volumes et les hauteurs, la tentation est grande de créer des mezzanines, escaliers, balcons intérieurs, avec des problèmes d'appuis, d'ancrages et de report de charges complexes ; mieux vaut en faire le tour avec un maître d'oeuvre qualifié et s'entourer de garanties pour déjouer les surprises en cours de travaux ; vaste programme !
- difficultés administratives : le changement de destination des locaux implique un permis de construire, même pour des travaux exclusivement intérieurs ; c'est au demeurant le permis de construire qui entraîne les changements de classement administratif et fiscal des locaux ; Si l'autorisation de transformation de locaux industriels ou commerciaux en habitation ne pose en général pas de problème, par contre l'administration peut poser des conditions draconiennes quant aux caractéristiques du projet qui lui est soumis (ouvertures et droit de vue, accès, esthétique extérieure, branchements, etc. )...
- difficultés juridiques : elles sont nombreuses quand l'opération se passe dans une copropriété existante ; non pas que celle-ci puisse s'opposer au changement d'affectation (voir notre dossier à ce sujet); mais en général elle doit être sollicitée pour de multiples questions techniques concernant les parties communes - canalisations et branchements, renforts de gros oeuvre, percements et ouvertures... Or la nature humaine est ainsi faite, et celle des copropriétaires en particulier, que les demandes d'autorisation s'obtiennent rarement sans contreparties !
S'il souhaite éviter une partie de ces difficultés tout en gardant sa liberté d'aménagement intérieur, l'amateur de loft trouvera sur le marché maintes surfaces brutes prêtes à aménager : ce sont des produits de marchands de biens ; lofts isolés mais plus fréquemment bâtiments entiers d'ateliers ou d'usines désaffectées restructurés et divisés en volumes aménageables au gré de chacun...
Le problème avec ces produits, c'est qu'ils sont souvent bâclés : parties communes et équipements pas aux normes, travaux effectués par des entreprises non qualifiées et fréquemment non assurées pour les ouvrages réalisés, exécution en dépit du bon sens et en tous cas des règles de l'art, certificat de conformité impossible à obtenir, autorisations de la copropriété non obtenues dans les règles ou contestées, changement d'affectation administratif non régularisé, bref toutes les facéties sont possibles et ont été vues de la part de pseudo-professionnels qui ont vite fait de disparaître dans la nature ou se rendre intouchables quand il s'agit de les mettre devant leurs obligations légales ou contractuelles !
D'autant plus qu'ils savent ne pas en souscrire de trop lourdes : les descriptifs sont en général minimalistes, et les transformations réalisées comportent un minimum de gros oeuvre, d'où pratiquement pas de garantie décennale et donc une police "dommages-ouvrage" inopérante !
Si l'on ajoute que la transformation de bâtiments existants n'est soumise à aucune des normes et règles de construction - isolation thermique et phonique, chauffage, sécurité incendie, etc. - applicables à la construction neuve, on réalise à quel point l'acquéreur est démuni...
Certes, la loi "SRU" (Solidarité et renouvellement urbains) du 13 décembre 2000 a quelque peu amélioré la protection de l'acquéreur en rendant obligatoire la communication d'un diagnostic technique "portant constat de l'état apparent de la solidité du clos et du couvert et de celui de l'état des conduites et canalisations collectives ainsi que des équipements communs et de sécurité". Le problème est que la réalisation de ce diagnostic et a fortiori sa communication au candidat acquéreur ne sont obligatoires qu'en cas de "mise en copropriété" de l'immeuble : pas si les lofts sont créés dans une copropriété existante !
Enfin, l'acquéreur d'une surface ou d'un volume brut doit aussi affronter une partie des difficultés techniques évoquées précédemment pour ses aménagements de mezzanines et autres éléments de gros oeuvre, sans compter les contraintes liées à l'installation d'une cuisine, de salles de bains et salles d'eau, etc.
Dernière solution : acheter un loft déjà ancien, dans un contexte aplani et régularisé, et le transformer à son goût ; évidemment, ce n'est en général pas la solution la plus économique ! Ou alors un produit d’architecte, haut de gamme, et forcément hors de prix ! Difficile d'être branché et malin...
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