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ACTUS

Termites : n'en a-t-on pas trop fait ?


Le 11/2/2002
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UI - Actus - 11/2/2002 - Termites : n'en a-t-on pas trop fait ?
Une loi, un décret, des circulaires, des experts en campagne, une armée de spécialistes du traitement préventif et curatif sur le pied de guerre : il n'en fallait pas moins pour lutter contre un fléau national sinon planétaire, le termite ! On pourra certes continuer à vendre des maisons bourrées de malfaçons ou de vices cachés, et des appartements dans des immeubles à la rénovation approximative ou menaçant ruine par défaut d'entretien, mais il faudra certifier qu'ils sont exempts de termites ! Du moins dans les zones déclarées 'à risques' que les mairies ont d'ailleurs du mal à délimiter... Bref, on peut se demander si tout cela n'est pas un peu excessif, si les propriétaires des zones pointées du doigt ne sont pas injustement pénalisés, et si l'acquéreur ne devrait pas être d'abord protégé de risques plus immédiats : après tout, les termites causent moins de dégâts aux bâtiments que les entrepreneurs non qualifiés ou les propriétaires ou copropriétaires négligents...
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Il faut se rendre à l'évidence : le termite fait peur ! Organisé en colonies souterraines (les termitières géantes de nos livres de géographie ne se rencontrent qu'en Afrique), il avance caché, dévore plinthes, chambranles et poutres de l'intérieur, aime la chaleur et l'humidité de nos maisons mais, surtout, il est contagieux : comme un mal invisible, on le transporte avec soi et une maison saine peut être contaminée par du bois de chauffage ou de construction... Et il s'étend : seize départements touchés en 1953, cinquante-six aujourd'hui, et, on vous le dit partout, ce n'est pas fini ! Les zones 'infestées' étendent leur tache comme une ombre maléfique sur la carte des départements et des communes de notre beau pays, sans qu'on se demande forcément quelle est l'étendue réelle des dégâts, et si le termite est vraiment plus destructeur que d'autres charmants hôtes de nos charpentes comme les capricornes, vrillettes, et lyctus, sans compter les champignons qui ruinent nombre d'ossatures de vieux immeubles perclus d'infiltrations...

Car, à part quelques cas que tous les spécialistes citent, on n'entend parler que de plinthes rongées, d'une marche d'escalier qui cède ou une lame de parquet traversée par le pied d'un fauteuil...

Mais las ! C'est décidé : il faut coûte que coûte délimiter le fléau, mettre en quarantaine les secteurs contaminés et forcer les malades à se traiter, au besoin administrer le traitement à leurs frais (voir notre dossier) et protéger les acquéreurs qui se risqueraient quand même à acheter dans ces zones par un certificat de bonne santé, pardon un état parasitaire attestant que l'immeuble ou la maison sont exempts de toute contamination !

Et gare à celui qui, malade, n'a pas déclaré sa maladie, ou qui a frauduleusement tenté de soustraire des matériaux de constructions contaminées d'une destruction purificatrice sous le contrôle de spécialistes dûment agréés...

Le problème par rapport à cette réaction énergique est quadruple : la délimitation des zones par les mairies n'est ni simple ni innocente, les conditions dans lesquelles doivent être établis les "états parasitaires" pour les ventes de lots en copropriété sont plus que confuses, la qualification des "experts" en détection n'est pour le moment soumise à aucun contrôle digne de ce nom, et la plus grande confusion règne aussi quant aux méthodes de traitement disponibles, qui semblent différer autant par leur coût que par leur efficacité...

Un zonage problématique

Concernant la délimitation des "zones contaminées par les termites ou susceptibles de l'être à court terme", la difficulté est attestée par la lenteur avec laquelle sont pris les arrêtés : la ville de Paris, qui comporte des secteurs particulièrement infestés n'a pas encore pris les siens, et de très nombreuses autres communes se débattent dans un dilemme dont le législateur n'avait peut-être pas pris la mesure : faut-il "zoner" large, au risque de mécontenter beaucoup de monde mais avec l'avantage de tenir compte des possibilités de déplacement des charmantes petites bêtes dont on connaît la mobilité, et surtout de limiter l'effet de dévalorisation sur les propriétés concernées ?

Ou faut-il au contraire délimiter au plus juste les parcelles cadastrales où une contamination est avérée ? Au risque de les rendre temporairement invendables, et de créer des injustices flagrantes par rapport à des voisins, épargnés parce que leurs hôtes n'ont pas daigné goûter aux appâts de détection (voir notre dossier), mais en fait tout aussi menacés, car situés dans le champ potentiel d'extension ou d'essaimage de termitières qui ne sont jamais localisables avec précision !

Sans parler de possibles favoritismes locaux qui conduirait les inspecteurs à fermer les yeux sur quelques appâts jugés insuffisamment probants...

On peut aussi s'interroger sur ce que répondra le maire dont la responsabilité sera invoquée par l'acheteur d'un terrain réputé non termité - puisque situé en dehors d'une zone susceptible de l'être - et qui y decouvrira des termites alors que vient d'être pris l'arrêté ?


Une situation curieuse dans les immeubles en copropriété

La situation créée est on ne peut plus paradoxale ! En effet, si l'obligation incombant aux vendeurs est logique quand il s'agit d'une maison ou d'un immeuble, elle l'est beaucoup moins quand il s'agit de vente en copropriété (mais l'ignorance du contexte de la copropriété est malheureusement habituel chez nos législateurs...) : la loi et le décret sont muets quant au champ exact de l'état parasitaire : doit-il porter sur les seules parties privatives vendues ou sur la totalité de l'immeuble ?

Un état parasitaire limité aux seules parties privatives vendues - c'est ce que mentionne une circulaire du 23 mars 2001 - est de l'argent jeté par les fenêtres, surtout si ce lot est situé en étage élevé, où aucun termite n'a de chances d'arriver... A moins qu'on ne compte sur la cave pour compléter la détection, mais tous les vendeurs n'en possèdent pas...

Il est vrai qu'on peut difficilement imaginer qu'on demande à chaque vendeur un état pour tout l'immeuble ! Que se passerait-il dans certains grands ensembles où se produisent plusieurs ventes par mois ? L'état parasitaire devrait-il dans ce cas concerner tous les bâtiments ou seulement celui où se situe le bien vendu ? Verrait-on dans ces ensembles fleurir un marché de négociation des états parasitaires de moins de trois mois ? Ou faudrait-il que le syndic souscrive un contrat permanent - certains organismes en proposent déjà - afin de disposer chaque trimestre d'un état à jour, à l'intention de tous les copropriétaires susceptibles de vendre au cours de la période...

Il reste que sans cela, la protection de l'acquéreur, objectif majeur de tout ce remue ménage si l'on admet la gravité du danger, est bien mal assurée...


Des experts à la qualification incertaine

La détection pose en effet un deuxième problème : l'énorme marché ouvert par l'obligation d'établir un état parasitaire a attiré un grand nombre d'experts plus ou moins auto-proclamés, dont la compétence ou l'expérience ne peuvent pour le moment être contrôlée faute d'un système de certification incontestable !
Les méthodes de détection restent d'ailleurs elles-mêmes à valider ; il paraît qu'on s'y emploie... Par ailleurs, si la loi prévoit une incompatibilité entre l'activité de diagnostic et celle de traitement, rien ne protège vraiment contre des convergences d'intérêts qui vont au delà d'une proximité intellectuelle...


Des méthodes de traitement à coût élastique et à efficacité non certifiée

Enfin, les méthodes de traitement sont aussi multiples que controversées : méthodes chimiques insecticides ou répulsives, destruction par pièges insecticides à effet biologique différé : aucune information fiable n'existe quant à leur efficacité respective et par contre les coûts s'échelonnent pour une maison de presque rien - et beaucoup de patience il est vrai - à 30.000 Euros et plus !

Si l'efficacité des barrières chimiques - ce sont les traitements les plus chers - est bonne à court terme, le produit disparaît ou devient inefficace en quelques années. Or il s'agit d'un traitement qui protège mais ne détruit pas forcément les colonies de termites. Faut-il alors traiter tous les 5 ou 6 ans ?

A contrario, les appâts biologiques assurent quand ils sont bien déployés une destruction définitive de l'envahisseur, mais ils ne sont efficaces que si on traite les terrains sur une grande étendue, et sans forcément s'arrêter aux limites cadastrales que les termites négligent royalement ! Or ni les pouvoirs publics ni les applicateurs ne semblent s'être donné des règles précises concernant ces méthodes de traitement apparues récemment ; ce sont pourtant les plus simples, les moins dangereuses et probablement les plus efficaces pour éviter la diffusion des termites ! Est-ce parce qu'elles sont aussi les moins coûteuses ?

Du coup, on ne peut s'empêcher de se demander, au risque de se faire reprocher du mauvais esprit ou une tendance agaçante à voir du mal partout, si le législateur et l'administration qui l'ont inspiré ne se sont pas laissés embarquer un peu inconsidérément dans cette aventure, encouragés dit-on par le lobby très actif des professionnels du traitement du bois, à qui de toute évidence tout cela ne peut pas nuire...
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