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ACTUS
Copropriété : radiographie d'un contentieux en forte augmentation
Le
7/2/2011
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En 2009, les tribunaux de première instance ont été saisis de 38.000 contentieux de la copropriété, contre 25.000 en 1990. C'est peu comparé au nombre de logements en copropriété estimé à plus de sept millions (0,5%), ainsi qu’au contentieux locatif (189.869 affaires). Mais le contentieux de charges impayées prend la plus grande part et augmente fortement : +18% entre 2005 et 2009, +14% pour la seule année 2009 par rapport à 2008 ! Un des effets de la crise sans aucun doute, mais aussi de la dégradation continue du pouvoir d'achat et du poids des dépenses contraintes que subissent les classes moyennes, très largement majoritaires parmi les copropriétaires.
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Le ministère de la justice a publié une analyse détaillée des statistiques de 1990 à 2009 du contentieux propre au secteur de la copropriété en France, qui représente entre 7 et 8 millions de logements. Il retrace l’évolution des demandes sur la période, ainsi que le résultat des demandes en 2009 et les délais de traitement.
Le recouvrement des charges prend la plus grande part (24.708 affaires). Les demandes de nomination d’un administrateur provisoire (copropriétés en difficulté) ont presque doublé entre 2007 et 2009 : 695 demandes contre 382 ! Les demandes en nullité de décisions d’assemblée ont totalisé 2.700 demandes, les autres contentieux restant marginaux.
Les charges impayées, principal motif de contentieux judiciaire
Le recouvrement judiciaire totalise les deux tiers du contentieux : 24.708 affaires sur 38.137 au total en 2009. Il est aussi en forte augmentation : +18% par rapport à 2005, et +14% sur la dernière année ! Les tribunaux de proximité en prennent une part croissante : 43% en 2009 contre 46% devant le tribunal d'instance (TI) et 10,6% devant le tribunal de grande instance (TGI), compétent pour des demandes initiales supérieures à 10.000 euros.
Les tribunaux ne sont pas saisis pour de petites sommes : les syndics attendent souvent longtemps (trop ?) avant d'assigner en justice ; 60% des demandes sont introduites pour des montants supérieurs à 4.000 euros, ce qui représente souvent plus de deux ans de charges courantes. Il est probable cependant que dans ces sommes figurent pour une bonne part des appels de fonds pour travaux, facteurs fréquents de défaillance : il ne se passe souvent que quelques mois entre la découverte, par les copropriétaires qui ne sont pas spécialement "branchés" sur la gestion de leur copropriété, de la nécessité d'engager tel ou tel type de gros travaux et les premiers appels de provisions. Ils n'en sont la plupart du temps informés qu'à l'occasion de l'assemblée générale qui les décide. Beaucoup ne peuvent alors y faire face. Les syndics accordent facilement des délais mais il n'est pas rare qu'à cette occasion certains copropriétaires accumulent un arriéré qu'ils ont ensuite du mal à apurer !
Toutefois, les travaux ou les grands accidents de la vie (divorces, successions), générateurs de gros arriérés, ne semblent pas être les responsables de la forte progression des contentieux pour impayés : ce sont les petites demandes en effet (moins de 4.000 euros) qui progressent le plus : elles ont augmenté de 57% depuis 2005 et sont passées de 32 à 43% du total, ce qui révèle une diffusion des difficultés de paiement.
Signe que les impayés ne sont pas dus à une contestation des charges : très peu de copropriétaires assignés se présentent à l'audience pour se défendre : 24% devant les tribunaux de proximité, 31% devant le TI, et 37% devant le TGI. Ils sont d'autant plus présents que les montants en jeu sont élevés.
Les syndics semblent toujours très conservateurs dans leur façon de gérer le recouvrement : ils font très peu usage de la procédure qui permet d'obtenir une condamnation rapide et expéditive devant le président du TGI, "statuant comme en matière de référé" (article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 créé par la loi "SRU") - cette procédure est passée de 400 cas en 2002 à près d'un millier seulement en 2009 -, et les contentieux de recouvrement sont introduits très majoritairement par avocat : seuls 11% des demandes de moins de 4.000 euros devant la juridiction de proximité sont effectuées par la procédure de "déclaration au greffe", seul mode de saisine dans la pratique qui dispense de recourir à un avocat...
Une répartition géographique très concentrée
L'Ile-de-France représente à elle seule près de la moitié des actions en justice pour impayés de charges, dont 17% pour la seule ville de Paris, 10% pour la Seine-Saint-Denis et 6% pour les Hauts-de-Seine. Paris concentre même 20% des demandes de plus de 10.000 euros devant le TGI ! Effet des charges plus élevées que dans le reste de la France, comme le montre chaque année les observatoires des charges, et aussi d'un taux d'effort pour le logement plus important chez les Franciliens que chez les autres Français, élément indéniable de fragilisation.
La région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) arrive en second avec 21% de demandes, probablement pour des raisons similaires.
Les autres motifs de contentieux : copropriétés en difficulté et assemblées générales
De l'impayé à la copropriété en difficulté il n'y a pas loin et le nombre de demandes de désignation d'un administrateur provisoire (procédure de l'article 29-1 de la loi) sont passées de 369 en 2006 à 695 en 2009. Certes, ces chiffres restent faibles mais ces demandes reflètent des situations très compromises. Elles sont présentées par les syndics (qui perdent leur mandat dès la nomination de l'administrateur) ou par le procureur de la République. Une procédure de sauvegarde vient d'être créée par la loi "Boutin" du 25 mars 2009, pouvant - et même devant - être déclenchée en principe par le syndic, qui n'est pas dessaisi dans ce cas, dès que le montant des impayés atteint 25% des "sommes exigibles". Mais elle est trop récente pour apparaître dans les statistiques. Elle permet de faire désigner un "mandataire ad hoc" dont la mission est d'analyser les causes de difficultés de la copropriété et de proposer des mesures préventives...
Le deuxième motif de contentieux n'est toutefois pas celui-là mais la contestation des décisions d'assemblées générales, voire même la contestation d'une assemblée dans son ensemble, pour irrégularité dans les convocations (copropriétaires convoqués, formulation de l'ordre du jour, documents joints ou non joints, etc.) ou dans la tenue de l'assemblée et la formulation du procès-verbal : 2675 affaires en 2009, par définition devant les TGI.
Les autres contentieux sont en comparaison marginaux : demandes de désignation d'un administrateur pour des motifs autres que la copropriété en difficulté (la plupart du temps pour absence de syndic régulièrement désigné - 1.243 demandes), demande de remise de pièces en cas de changement de syndic (420 demandes), actions en responsabilité contre le syndicat (424), demande d'un copropriétaire pour cessation ou la sanction d'une violation au règlement de copropriété (957), même chose de la part du syndicat (950), etc.
Des délais de justice trop longs et un taux élevé de réforme des décisions en appel et de cassation
Les demandes en paiement sont traitées plus rapidement que les autres : les délais pour obtenir une décision de justice en recouvrement étaient en 2009 en moyenne de 4,2 mois devant la juridiction de proximité, 5,1 mois devant le TI, et 11,2 mois devant le TGI. La patience vaut le coup car les syndicats de copropriétaires ont obtenu satisfaction presque 9 fois sur 10 (même 94% de succès au TGI et 96% en appel !).
Les décisions des TGI sont plus souvent frappées d'appel mais seulement pour 17% d'entre elles contre 5% pour les TI. De toute évidence, l'importance des sommes en jeu le justifie. Mais les cours d'appel ne confirment la totalité des décisions déférées que dans un peu plus du tiers des cas !
La situation est différente pour les autres types de contentieux. Les durées sont beaucoup plus (trop ?) longues, notamment en TGI dont elles relèvent majoritairement : entre 18 et 22 mois, et entre 9 et 17 mois en appel ! La gestion calamiteuse par les gouvernements successifs et la grande misère de la justice ont des répercussions directes sur les justiciables, dont les droits sont compromis par des délais excessifs.
Les demandes sont rejetées en moyenne dans 37% des cas, 38% pour les demandes de nullité d'assemblée générale ou les actions en responsabilité contre le syndic ou tendant à sa révocation ; par contre, ils obtiennent gain de cause dans 75% des cas quand ils mettent en cause la responsabilité du syndicat.
Par ailleurs, plus du tiers de ces décisions vont en appel : 38% pour la première catégorie et 71% pour la seconde (actions contre le syndicat) ; les décisions déférées ne sont confirmées dans toutes leurs dispositions respectivement que dans 48% des cas pour les annulations de décisions d'assemblée et dans 37% des cas dans les actions en responsabilité contre le syndic ; les décisions contre les syndicats sont infirmées dans toutes ou certaines de leurs dispositions dans 71% des cas !
Enfin, la 3ème Chambre de la Cour de cassation a rendu 272 décisions concernant la copropriété en 2009, dans 91% des cas contre des arrêts d'appel (la Cour de cassation peut aussi être saisie contre des décisions de première instance de moins de 4.000 euros non susceptibles d'appel). 15% des arrêts d'appel ont donné lieu à pourvoi, et un quart de ceux soumis ont été cassés !
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