Non exécution d'une décision d'expulsion : l'Etat est responsable !
Le
1/12/2001
De nombreuses décisions d'expulsion restent longtemps inappliquées faute du feu vert de la préfecture pour le concours de la force publique - en clair de la police - en principe non obligatoire, mais dans la pratique systématiquement requis par les huissiers légitimement soucieux de ne pas prendre de risques... Les propriétaires victimes de locataires défaillants sont-ils pour autant condamnés à les héberger gratuitement ? Beaucoup le croient, continuant ainsi à alimenter les préventions à l'égard de l'investissement locatif et l'image répandue d'un propriétaire démuni face à des locataires pouvant tout se permettre... Or, le refus de l'Etat de prêter son concours, fondé autant sur les craintes supposées de troubles à l'ordre public que sur de réelles difficultés de relogement, ouvre droit à indemnisation du propriétaire dès lors qu'il a été requis dans les formes légales ! Ce n'est pas l'idéal, mais c'est mieux que rien...
Tout jugement de tribunal, et en particulier les ordonnances d'expulsion reçoivent une "formule exécutoire" selon laquelle "la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils en sont légalement requis"...
Qu'en jolis termes ces choses-là sont dites !
Reste que l'Etat, en fait les préfets, sont maîtres de prêter main forte ou non, suivant des considérations de nature supérieure - le risque de "troubles à l'ordre public", facile à invoquer même si l'article 50 du décret du 31 juillet 1992 oblige à motiver le refus - ou bassement matérielles comme les possibilités de relogement...
Ce n'est pourtant pas la catastrophe qu'on croit généralement pour le propriétaire, car l'article 16 de la loi du 9 juillet 1991 stipule que "l'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation" !
Le propriétaire dont l'huissier a requis la force publique dans les règles peut donc, si cette réquisition reste sans effet formuler une demande d'indemnisation à hauteur des loyers et charges impayées - attention : l'indemnisation n'est jamais rétroactive - et à défaut d'acceptation amiable saisir le tribunal administratif pour faire valoir son droit.