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ACTUS
Bailleurs - locataires : la GRL se met en place mais se heurte à des réticences idéologiques
Le
25/1/2010
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Portée par l'UESL - l'organisme fédérateur des collecteurs du 1% logement - depuis 2002, et reprise dans les promesses de campagne des deux principaux candidats de la dernière élection présidentielle en 2007, réaffirmée par l'actuel président de la République, l'idée d'une sécurisation généralisée des propriétaires bailleurs en contrepartie de la disparition du dépôt de garantie et de la caution personnelle n'a cessé d'être combattue en sous-main. La GRL (garantie des risques locatifs) version 2, dont les textes d'application viennent d'être (enfin) publiés, sera-t-elle l'outil de sa mise en oeuvre ? Il faudra l'adhésion des assureurs et des courtiers, mais aussi des propriétaires bailleurs et surtout des administrateurs de biens, qui sont pour le moment le principal canal de diffusion des contrats d'assurance contre les impayés de loyers...
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De la CLU à la GRL : une idée qui vient de loin
Après de laborieuses négociations entre l'Etat, l'UESL (Union d'économie sociale pour le logement), organisme fédérateur des collecteurs du 1% logement, et les assureurs privés, les textes régissant la "Garantie universelle des risques locatifs" (GRL version 2010) ont été publiés. Longtemps annoncés, trois décrets du 23 décembre 2009 fixent les règles de gestion et de fonctionnement du fonds de garantie, le nouveau cahier des charges auquel seront soumis les contrats d'assurance dans le cadre de la nouvelle GRL, et les modalités de la garantie de l'Etat pour les publics couverts qui n'entrent pas dans le champ normal des activités de l'UESL et du 1% logement.
Le principe de la nouvelle GRL est fondé sur un contrat intitulé "contrat socle" signé entre l'assureur et le bailleur, un financement tripartite des sinistres (assureurs sur les primes perçues, UESL pour les locataires "éligibles" au 1% logement et l'Etat pour les autre locataires couverts par la garantie, et enfin un traitement circonstancié des sinistres, avec "traitement social" et maintien dans les lieux pour les locataires de bonne foi, en attendant un rétablissement de leur situation ou leur relogement dans le parc social.
La nouvelle version entrant en vigueur au 1er janvier 2010 résulte conjointement :
- d'un engagement de campagne du président Nicolas Sarkozy réitérée le 11 décembre 2007 lors d'un déplacement à Vandoeuvre-lès-Nancy, visant à faciliter l'accès au logement locatif privé par la suppression du dépôt de garantie et de la caution personnelle, compensée par une sécurisation généralisée des bailleurs fondée sur une très large mutualisation des risques,
- de la pression des assureurs désireux de reprendre la gestion de cette garantie, l'UESL et l'Etat ne jouant plus qu'un rôle de "réassureur", l'UESL via une de ses émanations, l'APAGL (Association pour l'accès aux garanties locatives), de son côté conservant son rôle dans le "traitement social" des impayés.
Qualifiée désormais d'"universelle", la nouvelle garantie couvre les locations jusqu'à 2.000 euros de loyer mensuel (hors charges ?) à la signature du bail et couvre jusqu'à 70.000 euros d'impayés et frais de recouvrement, et 7.700 euros de détériorations immobilières (3.500 euros pour les meublés).
La nouvelle GRL sera distribuée par les assureurs qui signeront une convention avec l'APAGL ; ceux-ci ne proposeront plus qu'un type de contrat quelque soit le locataire couvert.
Elle vient avec un peu de retard compléter deux mesures résultant des engagements présidentiels : la réduction à un mois du dépôt de garantie et la possibilité pour les locataires de le financer totalement et sans conditions par une avance "Loca-pass " (ou "Loca-pass dépôt de garantie"), et l'interdiction faite désormais par la loi "Boutin" du 25 mars 2009 au bailleur de demander un cautionnement aux candidats locataires autre que le "Loca-pass garantie de loyers", s'il a souscrit une "assurance garantissant les obligations locatives du locataire", ou si le bailleur est une personne morale autre qu'une "SCI familiale" (société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus), sauf si le logement est loué à un étudiant ne bénéficiant pas d'une bourse de l'enseignement supérieur.
A noter que l'entrée en vigueur de la nouvelle GRL au 1er janvier 2010 s'accompagne de l'arrêt à la même date de la distribution par les organismes collecteurs du 1% logement du "Loca-pass garantie de loyers" pour les locations proposées par les bailleurs privés ; ce dispositif ne sera plus maintenu que pour les bailleurs personnes morales lorsque les logements font l'objet d'une convention avec l'Etat ou avec l'ANAH.
Cet arrêt prématuré prend tout le monde de court ! Permettra-t-elle de donner un coup de fouet à la GRL ou ne fera-t-elle que replonger de nombreux candidats locataires dans la difficulté : ceux ne présentant pas un dossier à toute épreuve, et qui trouvaient dans le "Loca-pass garantie de loyers" un moyen de compléter leurs éléments de solvabilité ! Elle suppose que la nouvelle GRL soit adoptée en masse par les bailleurs privés alors que 100.000 logements privés seulement (sur 5,5 millions) avaient été assurés au moyen de la GRL 1ère version ! Encore faut-il que les assureurs adhèrent majoritairement et que les propriétaires s'y convertissent ; ils ne sont que 20% aujourd'hui à souscrire des garanties loyers impayés (GLI) classiques. Certes, cela fait près d'un million de logements couverts, essentiellement via les administrateurs de biens.
Si les assureurs transforment rapidement ces contrats en contrats de GRL et font la promotion de la nouvelle formule, l'objectif affiché par l'APAGL de 400.000 logements couverts fin 2010 et 2 millions à un horizon de 3 à 5 ans n'est pas hors d'atteinte, mais ce n'est pas gagné d'avance...
Une opposition idéologique
Depuis la "CLU" (Couverture logement universelle) prônée par la gauche en 2002, l'idée d'une garantie universelle des bailleurs rencontre l'hostilité des milieux conservateurs, exprimée par l'UNPI (Union nationale de la propriété immobilière), union de chambres départementales ou régionales de propriétaires revendiquant plus de 200.000 propriétaires, en général bailleurs de plusieurs logements.
Avec des nuances toutefois : en 2007 la même UNPI qui avait "massacré" la CLU réclamait une Garantie universelle, mais à condition qu'elle soit généralisée à tous les propriétaires (donc obligatoire), et financée aussi - pour le principe - par une cotisation prélevée sur les locataires.
Aujourd'hui, après avoir conclu en 2008 une convention avec l'APAGL pour faciliter l'adoption de la première GRL par ses adhérents, l'UNPI semble avoir oublié cette demande et tire à nouveau à boulets rouges sur la nouvelle GRL : elle la considère peu utile, car dans les secteurs tendus les bailleurs n'en n'ont pas besoin pour trouver des candidats, et dans les secteurs peu tendus les locataires peuvent aussi plus facilement trouver un logement dans le parc public, ce qui lui fait dire que "la GRL ne sera efficace que là où elle est inutile"...
Autre argument sans justification chiffrée : la GRL va exploser en vol, et ce n'est pas le moment d'augmenter les déficits...
Mais surtout l'UNPI reproche au dispositif de de ne pas faire contribuer le locataire alors que selon elle, "c'est lui qui bénéficie de la garantie", affirmant même que cette conception "repose sur un fondement immoral" ! Erreur de raisonnement révélatrice, car en fait dans l'appréciation de ces propriétaires, la garantie contre les impayés est de nature à inciter les locataires à considérer qu'ils peuvent se dispenser de payer leur loyer. "Il est tout à fait anormal de faire supporter l’essentiel du financement de la GRL par le bailleur, alors que c’est le locataire qui est assuré et qui va bénéficier du contrat", peut-on lire en toutes lettres dans le communiqué de la fédération.
Cet argument de la "déresponsabilisation" du locataire par l'effet d'une garantie n'est pas, il est vrai, l'apanage des chambres de propriétaires, il est repris par une partie des administrateurs de biens et il était exprimé encore en décembre au congrès de l'UNIS, leur premier syndicat professionnel. En toute contradiction avec l'expérience dont eux-mêmes peuvent témoigner : la "garantie loyers impayés" classique (GLI) existe depuis près de trente ans, elle couvre près d'un million de logements et il ne lui a jamais été reproché de déresponsabiliser les locataires !
A noter que l'autre grand syndicat professionnel d'administrateurs de biens, la FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier) a fait le chemin inverse : après avoir violemment critiqué la GRL 1ère version, elle admet aujourd'hui ouvertement sa nécessité sociale et encourage ses adhérents à la distribuer...
La déresponsabilisation : un argument qui ne tient pas
Loin d'être le fait de cigales irresponsables, les impayés sont de plus en plus majoritairement causés par des accidents économiques : selon l'APAGL, qui traite les impayés de la GRL 1ère version, et qui continuera à traiter ceux des locataires à contrat de travail précaire ou à taux d'effort supérieur à 28%, 30% des impayés soumis surviennent après une perte d'emploi et 25% suite à une diminution de ressources ou de prestations ; et dans les 45% restants, les accidents de la vie tiennent une part importante : séparations, maladie.
Du coup, le traitement "social" des impayés est inévitable, et constitue, comme le savent les services de recouvrement professionnels, la solution la plus efficace pour les propriétaires : il permet au mieux de mettre en place des dispositions qui permettront au locataire de passer un cap difficile et de revenir à une situation de compte normale, et au pire de mettre en place une solution de relogement. Au demeurant, 50 à 60% seulement des dossiers traités par APAGL suivent ce processus, s'appuyant sur le réseau des CIL collecteurs du 1% qui peuvent assurer une prestation de proximité et qui peuvent jusqu'à un certain point disposer de contingents réservés dans le parc géré par leurs filiales HLM.
Contrairement à ce qui a été dit ici et là, et qui inquiète les propriétaires, le maintien dans les lieux dans ce cas n'est envisagé que pour une période d'un an maximum. Au delà, et aussi dans le cas où le locataire défaillant ne coopère pas ou que sa situation est irrémédiablement compromise (40% des dossiers), le traitement de l'impayé suit le processus judiciaire classique, n'ayant jamais été question, pas plus avec la GRL qu'avec la GLI depuis trente ans qu'un locataire soit laissé en place et qu'on lui permette de loger sans payer sans rien entreprendre !
- A lire : notre fiche pratique « Garantie universelle des risques locatifs (GRL) version 2010»
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